Séminaire de Préparation du Séminaire d’hiver 2016, La technique psychanalytique de Freud 3/3

3è séance : REMEMORATION REPETITION PERLABORATION 1914

Quelques définitions :

Remémoration : faire une commémoration (rememoratio = commemoration)

Répétition : copie, repetitio = action de redemander, reclamation, redite, action de faire remonter en arrière

Perlaboration 😕 perlabor : glisser à travers/ travers

Durcharbeitung ? étudier à fond, travailler sans interruption, se frayer un chemin

1 – rappel sur l’abandon de l’hypnose

Freud commence par faire un rappel historique sur l’évolution de la technique :

  1. la catharsis et l’hypnose : reconstituer les processus psychiques impliqués dans le symptôme afin de les amener à se décharger dans une activité consciente = rappel du souvenir et abréaction

  2. abandon de l’hypnose et de l’abréaction

  3. découverte de l’association libre = deviner à partir des associations libres du patient ce dont il n’arrivait pas à se souvenir

  4. continuer la recherche des faits ayant provoqué la névrose en renonçant à déterminer un seul facteur ou un problème particulier

  5. se focaliser sur l’actuelle surface psychique du patient

  6. appliquer son art d’interpréter principalement à reconnaître les résistances et les faire connaître au malade

  7. quand le patient découvre ses propres résistances, il retrouve le souvenir oublié, en comblant les lacunes de la mémoire et en dépassant les résistances du refoulement

On pourrait dire que pour Freud à ce moment du développement théorique l’objectif premier est la remémoration qui viendrait combler les trous de l’inconscient, et du coup l’objectif de l’analyse serait de liquider l’inconscient dans une utopie où le sujet aurait enfin accès à tout le matériel infantile. Mais la remémoration de l’histoire infantile atteint vite une limite qui empêche l’accès au matériel infantile : à la place vient la répétition qui conduit le sujet à répéter dans l’actuel des séquences douloureuses de son passé.

2 –l’oubli et la souvenance : qu’est ce qu’on oublie?

  1. les évènements qui ont été conscients

• L’oubli d’impression, de scènes d’évènement vécus se réduit généralement à une dissociation

→le patient quand il se remémore l’évènement, souligne «  je n’ai jamais cessé de savoir tout cela mais je n’y pensais pas »

→mais il y a peu d’éléments qui reviennent

→les souvenirs-écrans : ils contiennent tout l’essentiel de la vie infantile «  il ne faut que savoir l’extraire à l’aide de l’analyse ; ils représentent les années oubliées de l’enfance aussi justement que le contenu manifeste des rêves en représente les pensées

Freud évoque les souvenirs écrans, il a travaillé ce concept dès 1899 dans un texte «Souvenirs d’enfance souvenirs écrans » et en 1910 sur « Un souvenir d’enfance de Léonard de Vinci. Ce sont des souvenirs qui restent émergés alors que tout de l’enfance a été oublié (amnésie infantile), ils se caractérisent par leur prégnance visuelle et auditive et surtout ils sont racontés. C’est par le langage que le passé oublié se connecte à l’actuel et au souvenir.

Les adultes de l’entourage ont oublié cet évènement, seul l’enfant a le souvenir vivace de cet évènement ancien très anodin en apparence et qu’il a gardé tout ce temps en mémoire. Le contenu est souvent banal alors que les évènements importants sont oubliés, ce travail de substitution est l’effet du refoulement. Derrière le caractère anodin se cache une profusion insoupçonnée de significations.

De plus le souvenir écran est parfois une scène d’enfance qui vient servir de support aux fantasmes actuels.

Freud dit que ces souvenirs doivent leur persistance au fait qu’ils représentent autre chose, d’autres évènements que ceux qui sont rapportés et ce par rapport d’association. Ces souvenirs-écrans recouvrent autre chose de plus fondamental pour l’enfant par mécanisme de déplacement et de condensation. Freud utilise le terme d’écran qui indique à la fois sa fonction de masque et sa fonction de réception de la projection de cet évènement. Freud les rapproche du rêve par leur constitution sensitive mais aussi par la reconstruction ultérieure de ces vestiges de l’enfance. Freud dans ce texte précise qu’un souvenir est une reproduction consciente, ce qui est oublié n’est pas effacé, l’oublié c’est ce qui ne revient pas à la conscience mais qui peut revenir dans la répétition. Ces premiers souvenirs conscients de l’enfance ne montrent pas la réalité de l’infantile, la trace mnésique a été retraduite à une époque ultérieure (époque d’évocation) sans avoir accès à l’originaire. Ainsi Freud nous indique qu’il n’est pas nécessaire de se souvenir de tout pour retrouver ce qui a fait l’enfance d’un homme, il suffit d’analyser ces restes que sont les souvenirs d’enfance pour retrouver cette part immergée où le sujet trouve son ancrage mais aussi les moyens de résoudre ses contradictions.

En ce sens l’oubli est un travail psychique qui se fait à notre insu et il n’est jamais vraiment réussi.

Un souvenir d’enfance de Léonard de Vinci

Ce souvenir  «  il me vint à l’esprit comme tout premier souvenir qu’étant encore au berceau, u vautour est descendu jusqu’à moi m’a ouvert la bouche de sa queue et à plusieurs reprise a heurté mes lèvres de cette même queue ». Freud à partir de ce rêve montre que le souvenir ne révèle en rien la réalité, il est une fantaisie qui condense une multitude de significations

– image de la fellation et de la passivité qui serait la matrice de l’homosexualité de LdeV

– une réminiscence de la tétée maternelle et de l’intensité érotique de leurs relations

LdV aurait réélaboré la réminiscence de la tétée en un fantasme homosexuel passif

-c’est aussi la marque des investigations sexuelles dans le temps où tout le monde a un pénis

Dans ce texte Freud compare le souvenir au récit historique, ce serait une sorte de légende qui représente une certaine réalité du passé. A partir d’une réalité oubliée le souvenir est reconstruit et remanié ultérieurement dans l’après-coup. On pourrait dire que l’on se souvient pour ne pas se rappeler. L’aptitude à se souvenir est coextensive à un désir d’oublier.

b- les fantasmes, idées connexes et émois

Freud dit qu’on peut se souvenir de quelque chose qui n’est jamais tombé dans l’oubli car il n’a jamais été conscient : ici la conviction de cet évènement est indépendante du souvenir

c- l’oubli comme suppression des connexions

Il évoque la névrose obsessionnelle où l’oubli repose sur des mécanismes de suppression des liens entre les idées, et d’isolation de certains souvenirs.

Le névrosé n’a aucun souvenir des liens et fantasmes, tout est coupé, isolé et ce n’est que par le travail d’analyse sur les productions de l’inconscient : rêves, symptômes, que le névrosé pourra refaire ses connexions.

L’autre voie d’accès à l’inconscient est la répétition, c’est une forme où la mémoire exhorte à se rappeler mais nous n’en avons aucun souvenir

3 – La répétition : se rappeler sans se souvenir

La mémoire (inconsciente) et le souvenir (conscient) sont deux espaces différents et qui s’excluent mutuellement. On n’a pas conscience de la mémoire, elle s’exprime dans la répétition et elle ne se donne à voir au sujet que par l’ensemble des formations de l’inconscient : transfert, rêve, symptôme. Les souvenirs ne sont que des tenant-lieu de cette mémoire (fantasmes). Se rappeler = faire appel à la mémoire telle qu’elle peut s’inscrire dans le rêve et le transfert, ce n’est pas se souvenir. Le souvenir, lui est conscient, c’est en soi une trahison de la mémoire. Le souvenir est du matériel sédimenté, reconstruit et fantasmé. On ne cesse de se rappeler à notre insu de choses dont on n’a pas le souvenir. D’ailleurs les réminiscences les plus tenaces sont celles laissées par des processus n’ayant jamais atteint la conscience. La mémoire se manifeste par un travail de déplacement, de déformation qui vient troubler la conscience. En cela la réminiscence du traumatisme est maintenue par la volonté de l’oublier.

La répétition n’est pas une reproduction à l’identique

Il n’est généralement pas possible de faire ressurgir des incidents importants de la petite enfance

C’est le rêve qui les fait connaître et c’est l’interprétation ultérieure qui permettra au patient de les comprendre.

Avec la technique analytique le patient n’a aucun souvenir de ce qu’il a oublié et refoulé et ne fait que le traduire en acte. Ce n’est pas sous forme de souvenir que le fait oublié reparaît, mais sous forme d’action. Le malade répète cet acte sans savoir qu’il s’agit d’une répétition.

La compulsion de répétition est là est une manière de se souvenir.

Il ne s’agit pas de souvenir de quelque chose d’oublié mais de refoulé. Le refoulé fait retour jusqu’à ce que le refoulement soit levé.

Il faut attendre ce texte pour que Freud dégage vraiment le concept de compulsion de répétition « Wiederholungzwang »

-wieder = encore une fois, à nouveau

-holung= répétition, révision

-wiederholen = aller rechercher, reprendre, répéter

-zwang = coercition, contrainte, force

Ce mot parle donc de quelque chose à reprendre, à aller chercher dans l’avant mais aussi à faire sortir de force, une poussée qui pousse à dire ou à faire. On retrouve le même terme zwang dans la névrose de contrainte « névrose compulsionnelle ».

« Le zwang représente un irrépressible reconnu qui ne peut être empêché quelle que soit la manière dont il survienne » dictionnaire freud-lacan

Cette compulsion de répétition de l’analysant c’est ce qui cherche, qui pousse à faire coïncider le passé et l’actuel dans l’espace de la cure.

Quel est le lien entre répétition et transfert et résistance ?

  1. le transfert est en soi un fragment de répétition

  2. la répétition est un transfert du passé oublié sur la personne et toute la situation présente

  3. la compulsion de répétition a remplacé l’impulsion au souvenir

  4. plus la résistance est grande plus la répétition se substitue au souvenir

  5. (différent de l’hypnose où la suppression de la résistance est supprimée et fait surgir les souvenirs directement)

Le transfert est la traduction en acte (de parole ou moteur), d’un évènement refoulé du passé qui réapparaît et se répète dans la relation actuelle au psychanalyste.

Au début de l’analyse les souvenirs ressurgissent facilement, quand la résistance commence à se montrer, les souvenirs se font rares et sont remplacés par la mise en acte : «  le malade tire de l’arsenal du passé les armes avec lesquelles il va se défendre contre la continuation de l’analyse, armes dont nous devrons une à une le déposséder »

Qu’est ce que le patient répète ?

« Tout ce qui, émané des sources du refoulé, imprègne déjà toute sa personnalité : ses inhibitions, ses attitudes inadéquates, ses traits de caractère pathologiques et…tous ses symptômes »

« Nous devons traiter sa maladie non comme un évènement du passé mais comme une force actuelle agissante. C’est fragment par fragment que cet état morbide est apporté dans le champ d’action du traitement et tandis que le malade le ressent comme quelque chose de réel et d’actuel, notre tache consiste principalement à rapporter ce que nous voyons au passé »

L’interprétation vise donc à ramener l’actuel au passé.

Jusqu’en 1920, pour Freud ce qui se répète ce sont des souvenirs, et cela s’inscrit au niveau des processus primaires. Cette répétition sert d’obstacle à la remémoration. Il croit encore pouvoir lever l’amnésie infantile.

Ce n’est qu’après 1926 que Freud évoque la pulsion de mort, une compulsion de répétition au niveau de l’inconscient qui insiste au-delà du principe de plaisir.

La compulsion de répétition n’est plus un échec à l’intérieur de la cure mais un échec structural du fait que l’objet retrouvé ne sera jamais complètement satisfaisant ; il faudra toujours répéter et tourner autour de ce manque.

Lacan leçon du 29 janvier 64 « 4 concepts » « …nous verrons comment c’est de la répétition, comme répétition de la déception, que Freud coordonne l’expérience, en tant que décevante, avec un réel qui sera désormais, dans le champ de la science, situé comme ce que le sujet est condamné à manquer, mais que ce manquement même révèle »

Avant le traitement

Le patient se plaint de sa maladie mais la dénigre et la sous-estime.

Il fait la politique de l’autruche : il refoule : il traite de la même façon ses symptômes, que l’origine des troubles : il choisit d’ignorer la cause et le sens de ses symptômes

Le traitement analytique s’oppose à cette ignorance et ce mépris :

Le psy invite le malade à penser sa maladie comme « une ennemie digne d’estime, comme une partie de lui-même dont la présence est bien motivée, où il conviendra de puiser de précieuses données pour sa vie ultérieure »

L’analyse vise à réconcilier le malade avec le refoulé ce qui provoque une tolérance à l’état morbide : un droit à être malade

On pourrait dire que le symptôme n’existe vraiment que de cette réconciliation du patient avec le refoulé.

Aussi l’aggravation des symptômes est normale et nécessaire « on ne peut pas terrasser un ennemi absent ou hors de portée »

La résistance va utiliser cette mise en exergue des symptômes : « elle abuse de la permission d’être malade »

  1. augmentation massive des symptômes

  2. apparition de motions pulsionnelles plus archaïques

  3. risque de passage à l’acte du sujet dans sa vie réelle qui occasionne des désastres

Avec cette question du passage à l’acte, on ne sait pas s’il évoque le passage à l’acte ou l’acting out. Lacan définira l’acting out comme un transfert sans analyse, ce qui a échappé à l’analyse du transfert et qui se réalise dans les évènements de vie du sujet. L’acting out n’a de sens que dans son rapport à la règle fondamentale « abstenez- vous de mettre en acte ce dont vous vous rappelez même si vous n’en n’avez pas le souvenir ». En effet le transfert est bien un acte mais un acte de parole. L’acting out c’est aller jusqu’au bout de cet acte et le vivre. L’acting out est de l’ordre de la monstration, du donner à voir et non du donner à entendre

Le passage à l’acte sera lui défini comme une analyse sans transfert, le PàA dit une vérité du sujet, un sujet qui tente par l’acte de réordonner quelque chose de sa subjectivité mais qui ne permet pas le travail de formation de l’inconscient à cause de l’absence de transfert, de l’absence d’adresse.

C’est dans le maniement du transfert que l’on trouve le moyen d’enrayer la compulsion de répétition et de la transformer en une raison de se souvenir.

« On rend la compulsion inutile en limitant ses droits en ne la laissant subsister que dans un domaine circonscrit : l’arène du transfert, où la répétition pourra se manifester librement et où elle pourra nous révéler tout ce qui se dissimule de pathogène dans le psychisme du sujet.  On peut alors conférer à tous ces symptômes morbides une signification de transfert nouvelle et à remplacer sa névrose ordinaire par une névrose de transfert dont le travail thérapeutique va le guérir.»

C’est la première fois que Freud évoque cette névrose de transfert dans le sens non pas nosographique (les névroses de transfert étant : hystérie d’angoisse, de conversion et la névrose obsessionnelle) mais dans un sens processuel de l’analyse.

Par le biais du transfert la névrose du patient va se concentrer dans la relation avec le médecin. « Tous les symptômes du malade ont abandonné leurs significations originaires et se sont réorganisés autour d’un nouveau sens qui consiste en une relation au transfert »

Le déplacement que permet le cadre de la cure et le transfert vont créer une formation nouvelle, où le patient répète son aménagement défensif son histoire mais transformée en une nouvelle édition.

On parle de névrose de transfert quand la névrose infantile est ravivée dans la situation analytique et pas seulement les fantasmes isolés les désirs ou angoisses. Elle a un caractère processuel. L’élucidation de la névrose de transfert devrait permettre la découverte de la névrose infantile. Dans un premier temps Freud pense donc que la névrose clinique doit devenir névrose de transfert qui permettra la découverte de la névrose infantile. Nous sommes dans ces années dans l’idée qu’il faut lever le refoulement + les résistances pour faire surgir les traumatismes, les désirs et le passé oublié ; ceci permet la reviviscence du complexe d’Œdipe et la levée de l’amnésie infantile. Le travail analytique est donc un processus de remémoration d’un passé oublié susceptible d’être reconstruit.

Mais dès 1920 dans «  Au-delà du principe de plaisir » Freud souligne qu’il ne faut pas laisser trop s’installer cette névrose de transfert : « le médecin s’efforce de limiter le plus possible le domaine de cette névrose de transfert, de pousser le plus de contenu possible dans la voie de la remémoration et d’en abandonner le moins possible à la répétition….En règle générale le médecin ne peut épargner à l’analysé cette phase de la cure. Il est forcé de lui laisser revivre un certain fragment de sa vie oubliée mais il doit veiller à ce que le malade garde une certaine capacité de surplomber la situation qui lui permette malgré tout de reconnaître dans ce qui apparaît comme réalité le reflet renouvelé d’un passé oublié » 

Le transfert crée un domaine intermédiaire entre la vie réelle et la maladie : une maladie artificielle accessible au traitement. « A partir de la répétition dans le transfert, des voies connues conduisent alors au réveil des souvenirs ». Quand les résistances sont surmontées les souvenirs apparaissent tous seuls.

Pointer la résistance, la répétition au patient ne suffit pas : ça n’a souvent aucun effet. «  En donnant un nom à la résistance on ne la fait pas pour cela immédiatement disparaître ». Il faudra refaire plusieurs fois le tour, donc la perlaboration pour que cela ait effet de changement.

Lacan va faire de la répétition une vraie fonction, un opérateur logique incontournable au point de le dénommer comme un des quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse.

4 – L’idéal la remémoration : parler au lieu d’agir

Le médecin cherche, lui, à rapatrier les souvenirs dans le domaine psychique. « Il cherche à maintenir sur le terrain psychique les impulsions que le patient voudrait transformer en actes »

Le travail de remémoration = liquider ce que le patient voudrait décharger par une action »

Le transfert permet un « attachement utilisable de quelque façon, le traitement est en mesure d’empêcher tous les actes itératifs du malade et d’utiliser in statu nascendi les intentions de celui-ci en tant que matériaux pour le travail thérapeutique »

Le médecin interdit au malade, selon la règle d’abstinence, de prendre aucune décision importante pendant le traitement.

Ce concept de remémoration est en lien avec celui d’après-coup. C’est une autre façon de faire exister le passé. En recherchant une causalité à ce qui nous arrive dans le passé.

5 – La perlaboration : processus dans la cure qui permet de se remémorer au lieu de répéter, processus du changement structurel intrapsychique. « Remettre cent fois sur le métier le même matériel »

Freud évoque par deux fois le concept de perlaboration, en 1914 dans « Répétition, remémoration perlaboration » et en 1926 dans «  Inhibition, symptôme et angoisse »

« Il faut laisser au malade le temps de bien connaître cette résistance qu’il ignorait, de la perlaborer, de la vaincre, de la poursuivre malgré elle et en obéissant à la règle analytique fondamentale, le travail commencé »

Il s’agit là pour le patient de perlaborer l’interprétation de l’analyste ; il faut du temps pour que le travail de symbolisation enraye les pulsions, et que le moi abandonne le refoulement et assume le retour du refoulé.

« Ce n’est que par la perlaboration que le médecin et le patient parviennent à découvrir les pulsions refoulées qui alimentent la résistance. Le patient est alors seulement en mesure de se convaincre de l’existence et de la force de cette dernière »

Le médecin doit être patient et ne peut ni forcer, ni éviter.

La perlaboration des résistances est une tache ardue pour le patient et une épreuve de patience pour le médecin, c’est pourtant elle qui exerce sur le patient la pus grande influence modificatrice et qui est la particularité de la méthode psychanalytique. Elle est l’équivalent de l’abréaction dans l’hypnose.

Avec le travail de perlaboration la répétition ne serait plus compulsion de répétition mais cette répétition dans le transfert deviendrait une tentative d’élaboration.

La perlaboration serait elle alors ce pont entre répétition et remémoration ?

Ou bien la remémoration implique-t-elle aussi un travail de perlaboration ?

Article de la FEP « la perlaboration dans le traitement psychanalytique » 8ème conférence de la FEP 1989

« La perlaboration est un temps ou l’analyste laisse le patient le temps de se plonger dans cette résistance qu’il connaît maintenant et qu’il doit surmonter. Elle implique de la part de l’analysant de se plonger pour un certain temps émotionnellement dans cette résistance qu’il connaît intellectuellement, l’analyste lui doit continuer à poursuivre son travail jusqu’à ce que les motions pulsionnelles refoulées qui alimentent la résistance soient découvertes dans le travail commun.

La répétition et la remémoration sont des actes complémentaires, liés entre eux de façon dynamique : tous deux reproduisent le passé et le rendent accessible au travail analytique. En respectant la règle fondamentale le sujet se remémore et sous l’effet de la résistance il répète. Le souvenir représente le passé significatif en tant que passé. La remémoration implique la distinction des images passées et actuelles. La répétition reproduit le passé mais ne le représente pas, passé et présent ne sont pas distingués. Les souvenirs font du présent ce qu’il est, l’ici et maintenant. La répétition empêche elle de vivre le présent effectif. Pour Freud c’est justement dans ce qui est répété et qui ne peut être remémoré que vit «  la motion pulsionnelle refoulée » qui alimente la résistance et rend nécessaire la perlaboration. La perlaboration a ainsi sa place entre la répétition et la remémoration, elle permet une désintrication du passé et du présent et la sortie de la compulsion de répétition. »

Lacan dans les 4 concepts fondamentaux de la psychanalyse : « la boucle doit être parcourue plusieurs fois, qu’il n y a aucune autre manière de rendre compte du terme de durcharbeiten, de la nécessité de l’élaboration, si ce n’est à concevoir comment la boucle doit être parcourue plusieurs fois. » leçon du 24 juin 64

Questions :

Est-ce qu’on pourrait associer la répétition à l’instant de voir

La perlaboration au temps de comprendre

La remémoration au moment de conclure/d’agir

Est ce que répétition/remémoration/perlaboration sont des opérations chronologiques ? Ou bien sont elles des opérateurs logiques ?

Lacan leçon du 29 janvier 1964

« L’expérience lui démontre (à Freud), ensuite qu’à l’endroit du sujet, il rencontre des limites, qui sont la non conviction, la résistance, la non guérison. La remémoration comporte toujours une limite. Et sans doute, on peut l’obtenir plus complète par d’autres voies que l’analyse, mais elles sont inopérantes quant à la guérison. C’est ici qu’il faut distinguer la portée de ces deux directions, la remémoration et la répétition. De l’une à l’autre, il n’y a pas plus orientation temporelle qu’il y a réversibilité. Simplement elles ne sont pas commutatives, ce n’est pas la même chose de commencer par la remémoration pour avoir affaire aux résistances de la répétition, ou de commencer par la répétition pour avoir une amorce de la remémoration. C’est ce qui nous indique que la fonction-temps est ici d’ordre logique et liée à une mise en forme signifiante du réel. La non-commutativité, en effet, est une catégorie qui n’appartient qu’au registre du signifiant.