affiche ici: HAMAD_MAI_15
vendredi 29 mai 2015 – 20 h 30
Centre Culturel Agora Tête d’Or – 93 rue Tête d’Or – LYON 6
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Enseignement de l’ALI- Provence – Ghislaine Chagourin – Année 2010-2011
Séminaire sur la féminité, la maternité et leurs articulations au «pas tout » et au phallus
séance du 15 novembre 2010
Le thème de ce séminaire m’a été inspiré par les journées de Mars 2010 sur l’Unité spirituelle de la Méditerranée. Unité spirituelle supposée autour des 3 monothéismes dont nous avons pu constater qu’elle restait problématique sauf sur ce qu’il en est de la jouissance : « jouissance objectale d’un côté, narcissique de l’autre »1 comme a pu le dire Charles Melman en conclusion des journées. Donc frontière entre « Islam » et « Occident » par outrance de consommation d’un côté et outrance narcissique de l’autre indiquant que l’altérité et la borne phallique ne jouent plus leurs rôles et que les lois du langage ne sont plus repérées comme structurales ni déterminantes dans la constitution du sujet. Ce qui rend difficile voire impossible tout discours entre les deux rives. Pour ma part, il m’a semblé que si l’altérité et la borne phallique ne jouaient plus leur rôle c’est que dans le social, quelque chose autour de la question du féminin fait problème. Car comment entendre cette « jouissance objectale » sinon comme une jouissance sans limite, organisée hors borne phallique autour d’objets de consommation qui ne causent plus le désir mais poussent à l’addiction par exemple. Et comment entendre la « jouissance narcissique » autrement que comme une jouissance qui ne fait aucune place à l’Altérité et donc au féminin. Pourtant Lacan avec le « pas toute » de la position féminine nous a montré que l’Un ne va pas sans l’Autre sans que cela se réduise à une complémentarité imaginaire mais tient de la logique de la sexuation à savoir que , comme a pu le dire Charles Melman lors des mêmes journées, « le petit a, c’est ce qui fait que le Un n’est pas Tout»2c’est aussi ce qui permet d’échapper au tout phallique du totalitarisme ou au pas du tout phallique de la psychose. Alors, qu’en est-il aujourd’hui de la féminité et de son articulation au masculin ? Pour cela je vous propose 4 volets que j’ai découpés ainsi :
1/ Lundi 15 novembre : une séance introductive sur Construction de la féminité (outils de base de Freud à Lacan)
2/ Lundi 17 janvier : Rencontre du féminin à l’Adolescence avec S. Lesourd. Clinique
3/ Lundi 21 mars : Féminité et maternité, avortement et déni de grossesse. A partir de l’affaire Courjeault et autres exemples cliniques
4/ Lundi 16 mai : Féminité, matriarcat, patriarcat, NEP. Conséquences cliniques et politiques du pas tout.
Freud a découvert l’inconscient et la psychanalyse en travaillant avec des femmes et notamment des femmes hystériques. Il s’est intéressé à la féminité et a tenté d’en percer les modalités de construction psychique tout en parlant de « continent noir » et en disant que « l’énigme de la femme » dont les hommes parlent serait en fait l’expression de leur bisexualité. Comment entendre cette bisexualité qu’il dit plus importante chez les femmes? Mais il ne s’estimait pas très satisfait de ce qu’il avait réussi à théoriser notamment du fait que c’était, « incomplet et fragmentaire » et que « cela (ne) rend(ait) pas toujours non plus un son agréable ». Freud a donc essayé de dire la féminité alors qu’avec Lacan, on verra que ce qui se passe du côté des femmes si ça ne peut pas se dire, ça peut s’écrire. Lacan va aussi « sortir les femmes du préjugé freudien qui fait d’elles des hommes castrés » (une femme n’est pas un homme castré. Elle est pas-toute, nuance, Virginia Hasenbalg, 2010). Lacan éclaire les travaux de Freud sous une autre lumière qui prête moins le flan aux accusations de phallocratisme de misogynie ou de réductionnisme à l’anatomie qui ont été faites à Freud pas plus tard qu’avec Onfray. Dans Encore, Lacan lui-même disait concernant « la chère femme » que « Freud [qui] ne lui fait pas la partie belle » mais il le prend au sérieux sur ce qu’il a pu entendre dans sa clinique et dans le lien social.
Comment se construit cette féminité selon Freud ? Il a mis en évidence une sexualité infantile organisée autour de ce qu’il appelle le primat du phallus tant chez le garçon que chez la fille. Concernant ce primat du phallus il avoue ne pouvoir bien le décrire que chez le garçon ce qui est à entendre comme un universel mais qui est descriptible pour « pas tous ». La sexualité infantile est donc une sexualité qui vise à une satisfaction (le développement de la fonction sexuelle, 1938) et non à la reproduction et qui intéresse le devenir et l’organisation des pulsions sexuelles dès les premières années de la vie (jusqu’à 5 ans environ). Ainsi, il y a 3 stades d’organisation de cette sexualité infantile: le stade oral, le stade anal et finalement, le stade phallique. Le processus d’organisation de la sexualité est dit diphasé par Freud (le développement de la fonction sexuelle, 1938) car la phase infantile est suivie d’une phase de latence (eu égard à la sexualité) et l’organisation se parachève à la puberté avec l’accès à la génitalité et à l’opposition masculin-féminin. Serge Lesourd qui fait une lecture lacanienne de Freud a repris cela en disant que l’adolescence est ce passage où l’adolescent, garçon ou fille, devrait rencontrer « cette part de lui-même ignorée dans son enfance, le féminin ». Nous y reviendrons. L’adolescence consistant en une réorganisation de la sexualité qui avant était régie par une « libido d’essence mâle » comme a pu l’avancer Freud quand il dit que le stade phallique est un moment déterminant pour la construction du sujet en tant que sexué car dans cette phase : « un seul organe génital, l’organe mâle joue un rôle » (L’organisation génitale infantile, 1923). Au stade phallique: le pénis et le clitoris fonctionnent de la même façon (tumescence, détumescence) mais Freud rapporte que le clitoris est perçu comme un « pénis rabougri » (l’abrégé de psychanalyse, 1938). Freud dit qu’au stade phallique, « l’organe génital féminin semble n’être jamais découvert » (L’organisation génitale infantile, 1923) et que « la petite fille est un petit homme » (La féminité, 1933). Sur le plan clinique on vérifie bien qu’une petite fille ignore tout de son vagin y compris au sens anatomique. Si tel n’est pas le cas et qu’elle a par exemple des gestes obscènes sans pudeur, on retrouve, des abus sexuels ou des situations dans lesquelles la petite fille a pu voir des films pornos par exemple ce qui ne l’empêche pas d’avoir des théories sexuelles infantiles dont le vagin est forclos. La méconnaissance du vagin n’et pas à rabattre sur une question anatomique, c’est plutôt lié à l’idée que tout le monde a un phallus y compris la mère. Par ailleurs, quand Freud parle de l’organe mâle, il faut entendre le phallus au sens de symbole et non pas au sens de la réalité anatomique, au sens de pénis comme c’est souvent entendu et comme les travaux de Freud l’ont donné à entendre. Au point qu’Onfray, à la suite de nombreux autres détracteurs, traite Freud de misogyne notamment sur le fait qu’il ait dit en 1912 « le destin c’est l’anatomie » (du rabaissement généralisé de la vie amoureuse, 1912).
Comment Freud explique que seul le phallus joue un rôle ? Cela vient de ce que pour la fille comme pour le garçon, le premier objet d’amour c’est la mère et que le garçon ou la fille ont ce même désir inconscient de faire un enfant à la mère ou d’en mettre un au monde pour elle, cela étant plus prégnant chez la petite fille précise Freud (désir d’enfant qui n’est pas à confondre avec le vœu conscient de vouloir un enfant). Sur le plan clinique, il est effectivement très fréquent de recevoir aux urgences des enfants (filles et garçons) se plaignant de maux de ventre incompréhensibles pour les pédiatres et qui sont l’expression de ces vœux inconscients. Ces maux de ventre surviennent par exemple au moment de la grossesse de la maman ou après la naissance d’un petit frère ou d’une petite sœur. J’ai même rencontré une petite fille de 5 ou 6 ans qui avait développé une phobie des insectes qui était l’expression d’un tel vœu : elle avait peur de voir sortir une « phasme » de sa manche, équivalent imaginaire d’un accouchement. Bref, Freud avait bien entendu que les enfants ont un désir tout sexuel à l’égard de la mère bien qu’il ne s’agisse pas d’un désir sexuel au sens adulte et génital. La mère est d’autre part elle-même perçue comme détentrice d’un phallus, ce qui correspond à une théorie infantile, quelque soit le sexe, de la possession universelle du phallus. On conçoit qu’un tel propos pris au niveau anatomique puisse attirer les critiques. Au point qu’Onfray, toujours, met ces développements sur le compte des relations « tortueuses » de Freud aux femmes : relation incestueuse à sa mère puis à sa fille Anna, adultère avec sa belle soeur. Alors que l’on doit entendre cela comme la question de ce qui fait universel et du rapport que l’on entretient à cet universel.
Comment la fillette va devenir une femme dans ce contexte phallique décrit par Freud ? Il précise que c’est plus compliqué pour une fille de devenir une femme que pour le garçon de devenir un homme car elle doit accomplir 2 tâches de plus que le garçon et c’est l’attachement tendre préoedipien qui est déterminant pour l’accès à la féminité, c’est-à-dire l’attachement premier à la mère puis l’oedipe. Ce que Lacan a repris sous l’angle des premières interactions avec le grand Autre maternel (ou ses substituts) et notamment avec le stade du miroir.
Quelles sont ces 2 tâches supplémentaires, décrites par Freud, qui incombent à la fillette?
1ère tâche supplémentaire : elle doit changer de zone directrice: c’est-à-dire passer du clitoris – qui fonctionne au stade phallique comme un petit pénis – au vagin. « Le clitoris doit céder sa sensibilité, et du même coup son importance, au vagin, totalement ou en partie » (La féminité, 1933). Sur le plan clinique, beaucoup de femmes disent n’avoir d’orgasme que clitoridiennement et se demandent si c’est bien normal, si elles ne sont pas frigides. En tout cas, la formulation freudienne sonne comme un traité d’anatomie qui convoque l’imaginaire, càd la question de l’image corporelle que Lacan a repris avec le stade du miroir. Si on l’entend sur un plan plus métaphorique, on retiendra l’idée de la nécessité d’un passage d’une position phallique à une position Autre qui échappe en partie à la dialectique phallique (quelque soit le sexe anatomique) pour accéder à la féminité.
2ème tâche supplémentaire, elle doit changer d’objet d’amour, et aussi de sexe d’objet d’amour, c’est-à-dire passer de l’attachement préoedipien à la mère à l’attachement au père. Ceci se fait, dit Freud, quand elle s’aperçoit que la mère est castrée et qu’elle réalise son « infériorité » sur le garçon en cela qu’il est détenteur du pénis et pas elle. Elle se considère alors castrée comme la mère (Freud parle de « castration accomplie »). Voilà en quoi Freud fait d’une femme un homme castré. Ce terme « d’infériorité » de Freud n’est pas à prendre comme la preuve de sa misogynie mais comme le témoignage de ce qu’il a entendu et que l’on entend toujours dans l’inconscient sous diverses formes et quelque soit le sexe: mépris des femmes pour les hommes et pour les femmes, mépris des hommes pour les femmes, manque d’estime personnelle et de confiance en soi des femmes etc. Freud précise que la fillette tient sa mère pour responsable de ce manque de pénis et de sa castration ce qui va provoquer sa haine à l’égard de sa mère. Elle va alors succomber à « l’envie de pénis » qui, dit Freud, « laisse des traces indélébiles » dans son psychisme et n’est que très difficilement surmontée. Cette envie de pénis, ce pénisneid, est ce qui la fait entrer dans l’oedipe (la fillette rentre dans l’oedipe par la castration) et va éventuellement la conduire à la féminité. Du coup cela pose le problème du déclin de l’oedipe pour la fille : en effet comment renoncer au pénisneid sans sortir de la féminité? Freud disait qu’il n’y avait pas de motif de destruction de l’oedipe chez la femme alors que chez le garçon, le complexe d’oedipe disparaît sous l’effet du complexe de castration par la constitution d’un surmoi.
L a petite fille dispose de 3 façons pour réagir à cette « envie de pénis »:
1/ la blessure narcissique est telle qu’elle va rejeter l’amour pour sa mère, et refouler ses aspirations sexuelles, c’est l’inhibition sexuelle ou la névrose,
2/ elle peut développer ce que Freud appelle un fort complexe de masculinité càd refuser de renoncer à une sexualité phallique. Cela peut parfois déboucher sur une homosexualité manifeste ultérieure ou constituer le lit d’une homosexualité secondaire par régression à ce complexe de masculinité,
3/ La voie féminine normale est lorsqu’elle se tourne vers le père comme détenteur de ce pénis dont elle a envie. Elle ne deviendra femme que lorsque cette envie de pénis se sera muée en désir d’enfant (qui existait déjà avant) et que pour atteindre son but, elle s’identifiera à la mère. Càd en acceptant la castration de la mère, en la voyant comme celle qui a pu obtenir le pénis du père (qui a causé son désir) c’est-à-dire comme une femme. Cette identification pose de nombreux problèmes sur le plan clinique. Freud dit que peut-être l’envie de pénis même quand elle est remplacée par le désir d’enfant reste un désir masculin et que c’est peut-être un désir féminin par excellence ! Cela est intéressant car nous verrons avec Lacan qu’une mère est dans un rapport particulier au phallus.
Dans tous les cas, pour Freud, les avatars ultérieurs de la féminité sont des séquelles de la période masculine antérieure et de l’envie de pénis qui en résulte. Pour lui c’est donc l’envie de pénis qui règle la sexualité féminine. Cette envie de pénis peut se présenter sous diverses formes qui vont du désir inconscient de posséder soi-même un pénis à l’envie de jouir du pénis dans le coït ou encore, par substitution, au désir d’avoir un enfant. Bref, la féminité rime avec une certaine insatisfaction que seule la maternité peut venir alléger puisqu’elle correspond à une appropriation du pénis à travers l’équivalence symbolique enfant-pénis. Avec « l’envie de pénis », Freud témoigne de ce qu’il a entendu dans la clinique mais se fourvoie dans une impasse imaginaire qui rejoint celle couramment répandue (toujours de nos jours) qui confond différence de position et différence de valeur ce qui effectivement est difficilement surmontable. Confusion qui se forge sur une notion de complétude de type « tout » ou « nul » que la psychanalyse grâce aux mathématiques et à Lacan a pu relativiser. Toutefois, par l’emprunt de ces diverses formes, on voit bien qu’avec Freud, le pénis s’élève déjà à la valeur de symbole. C’est en effet autour du symbole phallique que s’organise la sexualité humaine, cela vaut pour tous. Ce « tous » est important, il induit un universel sur le plan logique. C’est ce que nous amène Lacan qui pour sa part et dans un esprit d’élargissement de la notion de sexualité va proposer le terme de sexuation. C’est-à-dire la façon dont dans l’inconscient, au-delà de la sexualité biologique, les 2 sexes se reconnaissent et se différencient. Cette question de la sexuation relativise la notion freudienne de l’envie de pénis puisque Lacan va encore accentuer la dimension de symbole du phallus. Lacan dans le séminaire Encore va proposer des formules de la sexuation qui supposent au moins comme préalable une redéfinition du phallus, ou de la fonction phallique, et une interrogation sur sa dimension d’universel. Puisque ce tableau montre comment le sujet a à se déterminer par rapport au phallus, à la castration et à la jouissance. Phallus ici est pris au sens de fonction phallique ou plus exactement de fonction de la castration. Elle porte symboliquement sur le phallus en tant qu’objet imaginaire (pas réel ou anatomique).
Position masculine le sexe anatomique |
Position féminine le sexe anatomique |
___ x Φx
x Φx
|
___ ___ x Φx ___ x Φx
|
$
Φ |
s (A)
a La
|
Les quantificateurs :
: il existe
: quelque soit, pour tous
x : un être parlant, on voit que cette lettre se situe aussi bien d’un côté que de l’autre du tableau ce qui traduit bien que Lacan se démarque de l’idée d’une essence, d’une nature masculine ou féminine.
Φ: grand phi, fonction phallique, phallus symbolique
$ : le sujet de l’inconscient, le sujet divisé
Certaines formules sont surmontées d’une barre pour indiquer la négation de la formule. Le haut du tableau donne plutôt la répartition collective entre hommes et femmes alors que la partie basse est plutôt éclairante des relations privées entre un homme et une femme.
DU CÔTE HOMME:
Haut du tableau : 1ère ligne à gauche:
On peut lire: Il existe un x tel que non phi de x. Autrement dit: il y a un x qui n’est pas soumis à la castration, à la fonction phallique. c’est à dire que du côté homme, tous partent, tous s’ordonnent à partir d’un ancêtre, d’un père non castré. C’est le père de la horde primitive de Freud, c’est le père mort. C’est à dire que c’est ce père symbolique, tyrannique, qui a l’origine des temps régnait sur une horde de femmes dont il était le seul à avoir la jouissance, le commerce sexuel. Ses fils, sous peine de mort, n’avait pas droit aux femmes. un jour, ils se révoltèrent, tuèrent et mangèrent le père afin de pouvoir jouir des femmes. Mais ils furent vite pris de remords et se rendirent vite compte qu’ils se déchireraient à leur tour entre eux pour pouvoir jouir des femmes. Ils firent alors un pacte, celui de s’interdire – au nom du père mort – la jouissance des femmes du père afin de pouvoir vivre en paix et en communauté. C’est ce pacte qui rend possible la civilisation, la vie en groupe et plus largement en société. Ce pacte symbolique, c’est la castration, c’est l’interdit de la jouissance des femmes du père et donc de la mère mais il autorise une jouissance bornée par le phallus. Du côté homme c’est donc le passage pour tous, sauf un, le père, par la castration qui va permettre au sujet d’accéder au commerce des femmes et à la jouissance des biens. C’est en acceptant un interdit qu’il y a autorisation à une certaine liberté sexuelle.
Haut du tableau : 2ème ligne à gauche traduit cet universel de la castration du côté homme: quelque soit x, pour tous x, phi de x:. Il faut en passer par la castration. pour avoir le droit d’être un homme. Ces 2 formules indiquent que l’exception paternelle confirme la règle universelle phallique.
Dans le bas du tableau à gauche: Lacan place le sujet en tant que divisé, ce qui veut dire en tant qu’aux prises avec son inconscient et son désir.
C’est aussi là que trône le grand phi, la fonction phallique, la référence phallique. Du côté homme, on se prévaut de cette référence. Du côté homme, c’est le phallus qui fait la bannière sous laquelle on se rassemble.
On comprend bien alors la crainte que peut avoir un être parlant dans cette position, de ce côté ci du tableau, de le perdre (c’est imaginaire). Ce qui fait dire à Lacan, qu’un homme « n’est pas sans l’avoir ». Le défaut est du côté de l’avoir.
Dans le bas du tableau, il y a aussi cette flèche qui part du S barré vers l’autre côté du tableau, le côté féminin, vers le a. Dans le discours psychanalytique, cette flèche écrit la formule du fantasme. C’est à dire qu’un sujet en position masculine va trouver ce qui détermine son désir du côté féminin. C’est ce qui fait dire à Melman « le petit a, c’est ce qui fait que le Un n’est pas Tout»3.
DU CÔTE FEMME:
De ce côté pas d’ancêtre, c’est ce que l’on peut lire sur la première ligne des formules (en haut à droite): Il n’existe pas de femme qui échappe à la castration et à la fois, la 2ème ligne nous indique que « pas-tout » x est soumis à la fonction phallique. Ce « pas-tout » est à entendre comme cela: du côté femme on est pas entièrement soumise à la dialectique phallique, quelque chose y échappe. Et ceci est un grand apport par rapport à l’universel phallique de Freud. La dialectique phallique ne pèse pas de la même façon selon que l’on se tient du côté homme ou du côté femme.
C’est à dire que la castration est abordée de façon singulière du côté femme. On le conçoit puisque la petite fille aborde la castration, sous l’angle imaginaire de la privation et de la frustration, cette privation est attribuée à la mère phallique avant d’être transférée sur le père. A son propos, Lacan dira, une femme « est sans l’avoir » mais « n’est pas sans l’être » dans le sens où elle va être un semblant de phallus pour un homme puisque ne l’ayant pas, elle va faire fonction de signifiant du désir en tant qu’objet a.
Il n’y a donc pas de bannière sous laquelle puissent s’inscrire les femmes, c’est ce que traduit le « La »: « La femme n’existe pas », elle n’a pas vocation à faire universel.
le bas du tableau à droite : Comme on vient de le dire, une femme va faire fonction de signifiant du désir, c’est à dire que le « a » va s’inscrire de son côté. Elle va incarner pour un homme ce qui cause son désir. Alors bien sûr cela ne veut pas dire que pour être du côté femme il faut être l’objet d’un homme. Mais du côté femme, il y a ce qui détermine le désir d’un homme. Alors vous me dirai mais une femme, elle fantasme aussi ! Oui mais fantasmer pour une femme, c’est se glisser dans le fantasme d’un homme. Sinon c’est fantasmer comme un homme et on sort du côté femme du tableau. Etre femme c’est toujours pour un homme sinon la question ne se pose pas. D’où le fait que l’on puisse dire pas l’Autre sans l’Un.
Le point suivant dans le tableau côté femme c’est le S (A). C’est quelque chose de nouveau par rapport à Freud. Cela vient de ce fait qu’une femme n’est pas toute dans la dialectique phallique. Du côté femme, il y a un signifiant du manque. C’est à dire que c’est en tant que manquant qu’une femme va avoir à faire au phallus.
On voit bien les 2 flèches qui partent du « La » barré: d’un côté; elle franchit la ligne, elle va vers le côté homme, pour un accès au phallus, à la jouissance phallique et de l’autre, elle a à faire au phallus en tant que manquant. C’est à dire qu’elle va avoir accès à ce que Lacan a appelé la jouissance Autre. Cette jouissance est typiquement féminine. Un exemple de cette jouissance: la jouissance des mystiques.
Il faut bien percevoir qu’il y a des passages d’un côté à l’autre du tableau, on ne cesse de naviguer d’un côté à l’autre, ce n’est pas figé. Il n’y a que des semblants d’hommes et de femmes. D’autre part, il permet de repérer qu’on ne peut pas parler de rapport sexuel, rapport pris au sens mathématique, on ne peut parler que de fornication puisque « la femme n’existe pas ». Pour faire rapport, il faut 2 entités. Seul prévaut le phallus. Par contre il y a un rapport entre un avoir phallique et un être phallique: un homme pour une femme est celui qui détient le phallus, une femme pour un homme est le phallus mais de façon imaginaire. Ce qui nous différencie, les hommes et les femmes c’est plus en terme de jouissance : La jouissance sexuelle est une jouissance de type phallique, à laquelle ont accès les hommes et les femmes, qu’ils soient d’un côté ou de l’autre du tableau. La jouissance Autre est une jouissance typiquement féminine, uniquement du côté femme, ce qui ne veut pas dire qu’il n’y ait pas des hommes au sens anatomique qui y aient accès.
1 Charles Melman, Galéjades, conférence faite lors des journées de l’ALI des 13 et 14 mars 2010 à Marseille, « l’Unité spirituelle de la Méditerranée est-elle plus essentielle que l’apparence de sa diversité »
2 Charles Melman, Galéjades, conférence faite lors des journées de l’ALI des 13 et 14 mars 2010 à Marseille, « l’Unité spirituelle de la Méditerranée est-elle plus essentielle que l’apparence de sa diversité »
3 Charles Melman, Galéjades, conférence faite lors des journées de l’ALI des 13 et 14 mars 2010 à Marseille, « l’Unité spirituelle de la Méditerranée est-elle plus essentielle que l’apparence de sa diversité »
Je voudrais remercier les organisateurs de ces journées et en particulier Edmonde Luttringer pour son accueil et Elisabeth La Selve, pour cette proposition de travail sur la Parité.
Intervenir à Marseille reste toujours pour moi à la fois un vrai plaisir et une façon d’avancer dans ma réflexion sur la question du POLITIQUE!
Je dois vous dire qu’Elisabeth La Selve ne m’a pas donné le choix du sujet! Elle m’a confiée un sujet bien difficile avec lequel je me débats depuis bien longtemps. Un pouvoir féminin dans l’institution? Cette formulation s’appuie sur une antinomie, comment articuler pouvoir et féminin ou le pouvoir et le féminin, , mais surtout comment relever cette question et ouvrir les formules de la sexuation.
Il est vrai que ces cinquante dernières années nous pouvons observer un bouleversement dans les références signifiantes du fait de la transformation des rôles sociaux des hommes et des femmes qui ont généré un bouleversement des repères fondamentaux de la différence réduisant toujours plus dans le discours social, cet écart, jusqu’à ce que nous nous réunissons pendant deux jours autour de cette question, » La parité : Est-ce un progrès d’être tous semblables ».
Cependant nous pouvons nous poser la question de savoir, s’il y a eu une révolution pour les femmes depuis justement la Révolution Française et l’avènement de l’ère démocratique éclairée par la déclaration des droits de l’homme. Je vous rappelle qu’à cette époque les femmes n’ont pas été inclues dans le « suffrage universel ». Et la Révolution Française consolide alors l’exclusion des femmes, comme l’avait fait la démocratie grecque.
Ce n’est qu’en 1944 en France que le droit de vote sera accordé par le Général de Gaulle du fait en grande partie de la participation des femmes à la résistance. Et il n’en reste pas moins que le vote des femmes a représenté un certain pouvoir politique.
Aussi les relations entre les hommes et les femmes ont bien changé ces dernières décennies dans un grand nombre de pays, dans la famille et dans l’institution de travail. Et dans ces deux domaines, le statut des femmes est devenu un enjeu dans les relations politiques, avec les polémiques que nous connaissons. La question du Droit des femmes est au centre des politiques nationales et internationales qui ont conduit par exemple à considérer l’éducation des femmes et l’égalité des droits entre les sexes à la fois comme des indicateurs et des moyens essentiels pour le développement économique et social. Pourtant aujourd’hui nous pouvons constater un recul des droits de femmes en Europe, et dans le monde. Je vous renvoie à l’actualité, en Espagne, en Inde…Mais aussi dans l’arrière pays niçois où la précarité des femmes élevant seules leurs enfants restent bien préoccupante pour l’ARS quant à l’accès aux soins ou au logement.
Nous avons donc connu une certaine « métaphysique des sexes » qui distingue les hommes et les femmes au sein de l’humanité, les Hommes étant les représentants de l’universel et les femmes du particulier, les femmes du côté de la nature, les homme du côté de la raison. Existe-t-il une autre façon de penser la différence, dans l’inégalité? Et les femmes au cours des siècles ont su peu à peu démentir ces énoncés en s’affirmant et en conquérant progressivement des espaces qui avaient été déclarés inaccessibles à leur nature. Et les pensées de l’égalité, pour ne pas contrevenir à leurs présupposés affirmeront qu’il ne s’agit pas d’inégalité mais de spécificité.
Car qu’est ce qu’une femme? Féminin qui se dérobe c’est le cas de le dire toujours à moi, car je n’ai pas à ma disposition un signifiant qui viendrait le dire. Mais aussi insistance d’une nouvelle question que je peux entendre aujourd’hui à la fois chez les hommes et les femmes dans les cures au 21° : « que veut un homme? »: Et je me demande parfois si c’est bien toujours sur l’énigme de la féminité que s’engagent les hommes et les femmes dans l’analyse ? Car après le droit des femmes, le droit des enfants, le droit du Père, c’est bien le droit de l’homme qui va émerger, d’un pousse à l’homme, cette question épineuse de l’exercice difficile d’un pouvoir féminin dans l’institution en est peut-être une manifestation? Et cette question le pouvoir féminin représente- t-ilun pouvoir en tant que tel ?
N’ayant pas à ma disposition de signifiant de « La femme » pour répondre à cette question et prenant en compte qu’une femme ne peut s’inscrire sous le registre de l’exception comme c’est le cas du côté mâle qui fonde le « pour tous », je ne peux m’appuyer que sur certains points de la théorie analytique que je ne développerai pas ici, à savoir : d’une part, le tableau de la sexuation qui réfère les deux sexes à l’instance phallique, d’autre part ce qui en découle, la question du semblant, des apparences et aussi des identifications qui permettent de mener plus loin la réflexion sur la différence sexuelle.
En revanche, comment ce signifiant « Pouvoir » et ses représentations peuvent être mis au travail dans mes articulations et donner comme le dit Lacan dans le « Synthome », donner un petit coup de pouce à la langue. En effet comment considérer la question du pouvoir: comme une fonction, qui serait de l’ordre d’un exercice ou comme un objet qu’il faudrait acquérir? Comment conjuguer le pouvoir, comment nouer le pouvoir: le « pouvoir de », le « pouvoir sur », le « pouvoir contre », le « pouvoir avec »…Mais il reste évident pour moi que ce signifiant « Pouvoir » s’articule à cet autre signifiant le « Phallus » qui représente de tout temps ce signifiant de la puissance avant tout imaginaire et symbolique quand il permet de rendre compte de la fonction de la parole. Aussi, pour les femmes leur rapport au pouvoir a été avant tout un rapport à une prise de parole.
Comment donc un pouvoir et donc une parole que l’on qualifierait de féminin, viennent y répondre? C’est à dire un pouvoir qui s’exercerait d’un au-delà, d’un ailleurs de la logique phallique? Un pouvoir pour une femme qui s’exercerait entre le centre de la fonction phallique et cette absence d’elle même, faute d’un signifiant qui la représenterait ? Et non un pouvoir qui viendrait répondre à un impératif sociétal renforçant de ce fait les deux visages du surmoi féminin soit une volonté de jouissance , soit un renoncement à cette satisfaction. Des portraits de femmes politiques illustrent très facilement cette position..
Mes hésitations pour trouver un titre ; j’avais d’abord pensé à: « Une vie bien mal rangée »… ensuite j’ai indiqué « De la contre-culture à l’anti pouvoir d’une femme », mais un ami m’a fait remarquerqu’il y avait deux négations contre et anti qui laissaient entendre qu’avec cette question, je ne faisais que du « sur place »! Alors au fil de mes lectures je suis en mesure d’avancer l' »a »-pouvoir d’une femme, en bon lacanien écrivez le comme vous l’entendez. Mais évidemment vous entendrez que mon propos quant à cette question du ou d’un pouvoir féminin dans l’institution, tentera de s’articuler autour de la castration, mais aussi de la lettre.
La Loi symbolique repose t-elle toujours sur deux bords? Celui de l’ordre phallique et celui de ceux qui s’y soumettent, un côté masculin, et celui des pas-toutes, de ceux qui ne sont pas entièrement pris dans une logique phallique. Si l’un de deux bords vient à être défaillant, le sujet au moment où il construit son identité sexuée inconsciente pourrait bien se retrouver dans une errance, dans une recherche éperdue de son positionnement désirant face à l’autre de la relation. (Je vous renvois ici au travail de Serge Lesourd, » La Construction Adolescente » et « Adolescences, Rencontre du féminin » je vais m’appuyer sur ce travail dans la reprise de Totem et Tabou).
Cette difficulté c’est bien ce que nous observons, pas seulement dans la clinique des adolescents mais aussi chez les sujets pris dans la modernité, cette ambivalence, d’un bord à l’autre est même devenue un discours positivé, une forme de lien social, c’est notre lien social actuel. Et si il nous apparait à nous psychanalyste relever de la psychopathologie, il est le discours courant, le discours promu de notre société.
Aussi les femmes qui assument des fonctions importantes et qui vont voir l’analyste, sont-ellesparfois prises dans cette difficulté quant à leur positionnement. Elles ne savent plus sur quel pied danser? Par exemple, une femme travaillant à un poste important dans l’industrie, se plaint qu’elle n’y arrive pas avec ses équipes composées de femmes, alors que régulièrement elle leur dit combien elle a besoin d’elles, alors, je lui fis remarquer cela, et elle me répondit: » je ne veux pas être une salope de chef »!
Pourtant si nous nous référons à « Totem et Tabou », les femmes portent la loi symbolique, au même titre que les hommes justement pas parce qu’elle sont entièrement concernées par la logique phallique , elles n’y sont prises que de manière contingente langagière, de ce fait leur statut est hors langage .Elles sont porteuses de la Loi, car femmes elles ne sont pas toute, cela n’indique pas pour autant un côté moins, mais entendons plutôt que la femme à une étendue du côté de la jouissance, elle n’est pas toute, pas toute phallique. La féminité ne doit pas être conçue comme toute appréhendée dans la logique de la castration, mais révèle une étendue du côté de la jouissance, une jouissance Autre.
De ce fait en tant que femme elles sont une incarnation mythique du féminin inconscient, elles ouvrent à un ailleurs, à un au-delà de la Loi, au delà sans lequel la Loi même ne serait que tyrannie du maître. La Loi symbolique, en effet, ne peut trouver son effet pacifiant qu’à la condition qu’existe aussi une non croyance à l’absolue de la loi. Faut-il entendre là, qu’un voile peut se lever sur la castration et qu’une remise en cause de « l’au moins un » peut s’effectuer c’est à dire une remise en cause d’une relation à la fonction phallique qui pourrait exister sans la croyance en l’exception de la fonction.
Pierre Christophe Cathelineau dans son intervention « Quels choix éthiques pour l’institution », nous l’avait fait entendre. Mais cependant à mon sens, il a oublié de tenir compte que cette remise en cause de la croyance en l' »au moins un » dans notre modernité et de toujours, revient aussi à la charge des femmes? Et justement cette remise en question pourrait aider une femme à trouver un positionnement féminin dans l’exercice d’un pouvoir féminin et non féministe j’y reviendrai.
Mais je peux vous dire que ce n’est pas gagné:
Car comment envisager la question du pouvoir féminin hors du contentieux qui existe entre les hommes et les femmes, ce contentieux étant souvent déterminé par des circonstances historiques particulières. Comment envisager la question du féminin sans celle du masculin, c’est à dire tout en prenant en compte la question de la différence des sexes qui restent -mais jusqu’à quand- une des modalités dominantes de la différence en générale, est-ce que c’est toujours sur ce trait là que va s’appuyer la question de la différence.
Dans » l’Homme sans gravité » Charles Melman s’interrogeait et relevait que le « discours de la science apporte à l’éthique une sorte de rectification, …, à tel point qu’on peut se demander si finalement, l’inconscient gardera forcément son statut sexuel, sa réalité sexuelle, voir même que l’inconscient pourrait ne plus avoir de réalité sexuelle. Si l’on abandonne cette référence faite au nom du père pour venir donner un sens sexuel à ce qui est refoulé, à ce qui est tombé de la chaine littérale, nous pourrions très bien obtenir qu’il n’ait plus de signification sexuelle qui le caractérise aujourd’hui. » (P169)
Dans la vie privée ou la vie publique cette question de la différence semble toujours s’articuler au sexuel, mais de quelle façon? Elle est souvent entendue, interprétée à partir de la problématique du pouvoir et des minorités, donc en terme de dominé/dominant, d’un pouvoir de l’un sur l’autre.
Car en chacun d’entre nous quant à cette question, les stéréotypes psychosociologiques et les préjugés de tous ordre restent très puissants. En tant qu’analyste pouvons nous considérer les femmes comme une minorité. Elles sont la moitié de l’humanité et cette différence sexuelle qualifiée aujourd’hui de petite différence est un opérateur qui produit pourtant une classification et donc par la même de la classe. Les Hommes d’un côté, les Femmes de l’autre comme dans tous les grands systèmes classificatoires, c’est un des fondement de l’ordre social. Ce paradigme de l’Altérité s’appuie sur le fait qu’il n’y ait pas de premier ou de second sexe, mais s’appuie sur le fait que les deux éléments soient autres, hétérogènes l’un par rapport à l’autre.
Mais justement nous devrions être attentif aujourd’hui à ce qui tombe et comment, de la chaîne littérale car le sexuel est sur la scène publique et non plus sur la scène privée, c’est une question biopolitique que Michel Foucault a traité à sa manière par exemple dans ce livre: « La volonté de savoir, droit de mort et pouvoir sur la vie » et l’hypothèse de Charles Melman commence à s’illustrer dans la clinique.
J’ai reçu dernièrement une petite fille de 8ans, car elle avait, sur l’ipad de sa grand mère, été visiter certains sites en tapant: « sortir du ventre », « minou », « sexe », et donc lui était apparu des scènes très « hard » qu’elle avait montrées à sa maman, laquelle affolée, me l’a amenée. Des enseignants lors d’une supervision remarquaient que quelques petites filles dans les classes de cp ce1, là ou on commence à lire et à écrire ne pouvaient s’investir correctement dans les apprentissages car elle passaient leur temps scolaire à se masturber sans pouvoir rien en dire. Alors qu’une fillette de Cm1 a pu expliquer qu’elle ne pouvait suspendre sa pratique facilement, car c’était devenu une addiction!
Mais revenons à Totem et tabou ; que nous enseigne ce mythe sur la question qui nous anime ? Ce mythe de toute pièce crée par la psychanalyse, celui du meurtre du père de la horde primitive pourrait nous permettre dans une relecture, d’avancer sur la question de l’institution voire même de l’institution analytique. Notons néanmoins que si pour Freud il s’agissait de poser le meurtre mythique du père jouisseur comme principe de la loi, à suivre Lacan, l’Oedipe n’est plus qu’un cadre mythique de référence pour mettre en place les limites de l’opération analytique, ces limites sont aujourd’hui bien dépassées!
Mais la relation du sujet à l’Autre et aux autres s’exprime toujours le plus souvent dans une relation d’aliénation. Ce mythe illustre la structure du lien intersubjectif dans le social et maintient la valeur d’universel pour chaque sujet, pris dans les rets de l’échange langagier au temps où il doit soutenir seul son désir dans son rapport au monde comme au temps de l’adolescence et à mon avis pour un homme comme pour une femme voilà « le pouvoir » qu’il a à exercer, voilà peut-être la seule parité à promouvoir, mais certainement le chemin qu’un homme ou une femme empreinte pour assumer son désir dans son rapport au monde et à l’autre n’est certainement pas le même et justement la psychanalyse à la lumière du social se doit de renouveler cette question.
Au sein de l’organisation sociale, des organisations de travail y compris l’institution analytique, celle que je connais en tout les cas, cette souffrance (parfois la mienne) que nous entendons dans le rapport à l’institution, ce que nous pouvons relever en tant que clinicien, c’est cette nouvelle forme de pathologie qui en grande partie se réfère à la question du narcissisme, du repli sur soi, de l’individualisme et/ou à l’inverse du collectivisme. L’inconscient collectif dans notre société de bien être va redevenir à la mode!
En effet cette prise narcissique souvent engluée dans un imaginaire collectif témoigne de la difficulté voire d’une impossibilité à accéder à la dimension symbolique du manque c’est à dire la castration. Et nous observons dans les groupes y compris analytiques et entendons des analysants ou lors des supervisions d’équipes, une violence latente, une difficulté dans l’échange avec les pairs, une difficulté dans la pacification nécessaire à une rencontre qui ne soit pas duelle ou en miroir, ni donc mortifère. Car ce qui est refusé c’est la culpabilité liée au meurtre organisateur des liens sociaux, à cette responsabilité qui est à assumer chacun pour soi, dans le risque d’être à son tour tué individuellement, si le sujet vient à prendre la place laissée vacante.
Et quant à la question du couple, la violence conjugale se retrouve aujourd’hui sur la scène publique comme le sexuel! Cette question est devenue une urgence sociale. Les victimes d’un côté, les monstres de l’autre! Et, il n’est pas évident que le refoulement concernant cette question puisse faire son travail.
Et donc nous observons la difficulté pour les sujets d’assumer leur propre désir non plus à partir des signifiants sexuels -homme, femme- ou encore des signifiants parentaux ou sociétaux ou ceux tout aussi bien de l’entreprise voire même ceux de l’association analytique mais une difficulté à assumer leur propre désir à partir de leurs propres signifiants maîtres. Et gare à ceux qui en recherche de nomination pour leur désir se permettent de les exprimer, voire même de faire acte de parole ou groupe à leur tour, ils seront sujets à des procès d’intention qui portent justement sur le signifiant, dans une récusation même de la fonction du signifiant c’est à dire la différence. Apparaît alors une nouvelle forme de « centralisme démocratique moderne « qui organiserait et nommerait le groupe. Cette forme de centralisme démocratique collectiviserait le signifiant, c’est à dire les signifiants maîtres deviendront le bien commun.
Mais comme les signifiants n’appartiennent à personne, ils sont en libre circulation, espérons alors un petit coup de pouce à la langue comme le dit Lacan, d’un inconscient particulier, celui d’une femme par exemple car Lacan nous rappelle également dans le séminaire « Le sinthome », que c’est l’ensemble des femmes qui engendre la lalangue. Voilà un certain pouvoir! Car c’est la mère qui introduit l’enfant au symbolique à condition bien sûr qu’elle se réfère au désir d’un homme.
Cet « ensemble des femmes » formulation de Lacan dans le « synthome » demanderait à être repris et travaillé lors du séminaire d’été .
En fait dans cette question de la parité c’est cette question de l’inventivité du signifiant qui est touchée, le signifiant réduit au neutre, réduit au même, un troisième sexe mais neutre venu de Suède. Il y a plus de 10 ans, Monsieur Melman rappelait que même si l’altérité était récusée dans les revendications diverses pour assurer une identité de communauté et d’appartenance, l’altérité est évidemment interne au langage lui-même, à la langue en tant que telle, « On aura beau trépigné, mettre en place les lois que l’on voudra, cela ne changera pas et nos rapports resterons régis, organisés par cette dimension de l’altérité, par la disparité. » (P 140)
Est-ce que le langage lui même ne serait pas aujourd’hui entamé, est-ce que le jeu de la langue et de la parole, la place qu’y occupe le féminin, c’est-à-dire la lettre ne seraient pas entamés, congelés comme les paillettes de sperme ou les embryons en attente… Cette lettre n’est plus distribuée. En effet une femme qui se situe au champ de l’autre fait-elle toujours signe pour un homme, révélant de ce fait le manque, le désir et garantissant ainsi les lois du langage , de la parole et l’Altérité!
Cela me renvoie bien sur à « la lettre volée » à laquelle Lacan revient dans le séminaire « Un discours qui ne serait pas du semblant »: » je cite: « ce n’est pas rien de mettre en avant la lettre dans un certain rapport de la femme avec, ce qui, de la loi écrite, s’inscrit dans le contexte où la chose se place, du fait qu’elle est, au titre de la reine, l’image de la femme conjointe au Roi. Quelque chose est ici improprement symbolisé, et typiquement autour du rapport comme sexuel. C’est dans ce contexte que le fait qu’une lettre lui soit adressée prend la valeur que je désigne de celle de signe. » Et Lacan poursuit: « car ce signe – la lettre- est bien celui de la femme pour ce qu’elle y fait valoir son être, en le fondant hors la loi, qui la contient toujours, de par l’effet de ces origines, en position de signifiant, voire de fétiche. »
Qu’en est-il de ce temps nécessaire de la rivalité qui permet de rêver, de penser pour enfin agir le meurtre du père de la horde primitive par les frères et rajoutons aujourd’hui les sœurs coalisés. Et surtout est-ce qu’une femme en tant qu’objet du désir de l’homme et de ce fait objet exclu de structure pour maintenir cette altérité, mais aussi garantir ce jeu de la langue, ne serait pas en voie de disparition.
Car Il semble que la jalousie quant au père détenteur de toutes les femmes ne soit plus de mise aujourd’hui, car notre société de consommation promet certainement à l’homme des objets peut-être bien plus jouissifs qu’une femme! En effet nous pouvons relever la multiplicité des modes de jouissance sexuelles non corrélées à la différence homme-femme et à la norme œdipienne dans la psychopathologie de la vie amoureuse aujourd’hui.
En fait c’est bien l’interdit de l’inceste qui n’est plus aujourd’hui l’enjeu psychique du lien social dans la famille, le social ou les organisations de travail. Ce refus du meurtre du père, d’un acte fondateur ou refondateur de l’ordre symbolique en jeu dans l’inventivité même de la langue peut nous apparaître en fin de compte comme une non-acceptation de cette symbolisation du manque et de la fonction fictive du phallus.
C’est à dire qu’aujourd’hui les femmes « toute femme » n’agissent plus de la mise en place de cet au-delà phallique de la loi, de ce manque symbolique voire même et de cette dimension du semblant qui leur permettraient l’exercice d’un pouvoir sans remettre en cause la loi universelle comme telle, mais tout en s’appuyant sur la formulation de cette loi même et dévoilant cette loi comme fiction elle pourrait y réintroduire une dimension autre que cette loi ignore qui a avoir justement avec l’inventivité du signifiant et la création de la lalangue. Cette dimension de semblant de ruse en quelque sorte implique un savoir du manque et son acceptation. Elle suppose une familiarité avec la fonction de castration dans la relation avec l’objet.
Mais aujourd’hui les femmes sont bien plus sujettes à un impératif, une volonté de jouissance quand elles s’engagent dans le pouvoir. Cette volonté de jouissance reste accrochée pour beaucoup à cette recherche d’un réel qui ne soit pas du semblant qui viendrait pointer un défaut du symbolique. D’autres désirent le phallus et uniquement lui allant jusqu’à l’incorporer en tant qu’il est le signifiant du pouvoir et donc imaginaire; prises dans l’enjeu phallique du pouvoir, elles restent identifiées à ce trait, congelée. Le masque de la mascarade est devenu le masque du botox. Aussi ces femmes , en politique dans l’entreprise, dans l’institution accrochées au pouvoir sont alors incapables de le lâcher.
Citons alors Lacan: « Ce sont les conséquences dans la position de la femme de ceci, que ce n’est qu’à partir d’être une femme qu’elle puisse s’instituer dans ce qui est inscriptible de ne pas l’être, c’est à dire qui est restant béant de ce qu’il en est du rapport sexuel. D’où il arrive ceci, si lisible dans la fonction combien précieuse des hystériques, qu’elles sont celles qui, sur ce qu’il en est du rapport sexuel, disent la vérité…pour ce qui est de faire le Touthomme, elle en est aussi capable que le tout homme lui même, à savoir par l’imagination » (Un discours qui ne serait pas du semblant)
Quel est donc le rôle des femmes dans le mythe de Totem et Tabou qui aujourd’hui ferait scandale! Car Freud et cela ne nous étonnera pas situe les femmes en position d’objet du désir des hommes autant pour les pères que pour les fils. C’est là que nous dégageons dans ce mythe, la femme comme un pur objet de désir, une « pure » victime en quelque sorte, du désir incestueux. Nous comprenons la nécessité logique pour Freud de la mettre à cette place là, à cette place les femmes s’inscrivent dans la logique de la jouissance phallique d’échange des biens et de plaisirs.
Cependant pensez-vous que la femme soit si innocente que cela? Pourquoi dans le lien social cette position d’exclusion ne lui convient pas? Qu’en est-il alors du désir de la femme? Qu’en est-il surtout du désir de la Mère? Certainement ce désir comme tout désir, reste inconscient dans tous les cas mais il Ex-iste. Qu’en est-il du désir de Jocaste , d’Antigone , elles avancent dans leur histoire en mettant en jeu leurs désirs, voire même en mettant en jeu leur irréductible accrochage au désir. Est-ce spécifique aux femmes cet irréductible accrochage du désir? Est-ce que les hommes savent mieux y faire avec cette question là? Mais nous savons aussi, quel ravage produit le désir de la mère quand il n’est pas dialectisé par la métaphore paternelle. Et surtout une mère a tout intérêt à maintenir la croyance dans l’exception de la référence phallique, c’est en partie ainsi qu’elle assure son pouvoir.
Ces considérations amènent pour moi, la question dans notre lien social, de la place actuelle des femmes dans l’organisation symbolique, aujourd’hui elles participent à la fois au pouvoir mais peuvent occuper une place quant à la responsabilité à prendre dans la construction d’un lien social.
Pourtant, Totem et tabou les excluent de cette affaire là et pose même une impossible parité. Cependant les femmes dans ce mythe, nous l’avons vu, occupent une place majeure car elles garantissent l’au-delà de la borne phallique. Car dans le mythe freudien les femmes désirent ailleurs que vers le phallus dans sa version imaginaire, de ce fait elles ne sont pas toute dans cette attente du Père, qu’il soit mort ou vivant, pas toute dans cet enjeu de puissance.
Comment poursuivre et relever cette antinomie -Pouvoir et féminin- et bien justement en en passant par le politique! C’est à dire l’inconscient. Le politique concerne ce qui relève de l’exercice du pouvoir dans l’état, dit le dictionnaire; j’y substitue le social, la société, voire l’institution.
Si le politique n’est pas un discours en tant que tel, au sens où Lacan a défini les quatre discours, nous devons néanmoins souligner que le politique fait trou autant dans le réel, l’imaginaire et surtout le symbolique, de ce fait le politique vient dans le symbolique remanier les places. Comment à partir de ce constat lire le changement des places entre les hommes et les femmes – s’il a eu lieu – qu’un certain mouvement politique nommé « la contre culture » dont est issu le FEMINISME. Le Féminisme a introduit dans notre modernité cette formulation dont les conséquences nous font parler aujourd’hui: LE POLITIQUE EST PERSONNEL .
Oui je voudrais vous parler du féminisme qui, il est indéniable à contribuer sur le plan social à l’émancipation des femmes, vous avez compris que j’essaie de me déplacer en prenant en compte la scène psychique et la scène sociale tout en essayant de ne pas rabattre l’une sur l’autre. Car cela me semble important pour comprendre comment les débats sur la parité sont devenus le discours courant de notre lien social, rabattant la différence sexuelle, non sur un deuxième ou troisième sexe mais sur un seul sexe. Le féminisme a fait trou autant dans le symbolique, l’imaginaire et le Réel et a modifié la place des femmes dans l’organisation symbolique et leur rapport au pouvoir. (Vous trouverez en annexe un développement sur l’histoire du féminisme, je ne peux pour des raisons de temps le reprendre ici).
Dans mes rencontres de travail autour de la violence entre les hommes et les femmes dont je fais référence dans l’article « Du réel dans le couple : Amour, sexe et violence », j’ai rencontré des difficultés pour soutenir un positionnement clinique et analytique dans l’accueil de ses femmes, j’ai mesuré dans le travail avec les collègues juristes, assistantes sociales, chargées de mission, éducatrices formatées par le discours actuel de la parité, du genre entre autre et bien, j’ai pu mesurer la férocité que les femmes entre elles peuvent déployer. Le pouvoir de l’analyste n’a valu là que d’un « a » pouvoir, au sens d’un « a » privatif!
Car la loi de la mère et ses variantes sur les filles et les fils dans la vie institutionnelle est légion! Pourtant concernant les filles, elles devraient ne rien avoir à craindre, car cette menace de castration que La Mère professe ne la concerne pas effectivement, car elle n’est de toute façon pas réelle. Mais Lacan va plus loin: au-delà de la mère, il y a sans doute un Père qui peut menacer sa fille de castration. Seulement voilà, cette menace n’a pas d’effet parce que ce père « au-delà » est un père idéal, non réalisé! C’est la figure d’un père symbolique mort!
Quant au fils je ne parlerai pas pour eux, je rapporterai les paroles d’un patient qui concernant la place qu’il occupait dans sa famille, a pu la désigner ainsi « homme de paille ou homme de main » ou « homme de paille de paille de fer », et de rajouter mais où est-donc « l’homme de fer »!
Dans le social, j’ai rencontré là le pouvoir féministe autre figure de la loi de la Mère mais certainement pas un pouvoir féminin! Et j’ai pris en compte combien le féminisme dans sa dimension politique a participé de cette congélation de la lettre et du féminin dont je vous parlais. Aussi soutenir, aussi bien une position féminine, c’est à dire se référant à un au-delà de la référence phallique et une position analytique – de ne pas viser à nourrir le symptôme- a été bien compliqué pour moi dans cette expérience.
Et si je me suis retrouvée en difficulté, comme me le pointe Monsieur Melman, c’est bien parce que je me suis comptée dans l’ensemble des femmes!
Car la féministe femme qui croit encore au progrès et imagine pouvoir changer le monde a balayé le mythe freudien. Les féministes ont ouvert le règne du pouvoir des femmes. Ce pouvoir est référé soit à une jouissance sans limite, soit au phallus imaginaire niant la castration de la Mère. De ce fait la féministe femme maintient comme une VERITE la référence phallique, Femme peut désormais ex-ister dans le social, la VERITE peut se faire femme, mais dans le même mouvement la lettre en tant que signe du féminin et de l’altérité est passée à la trappe!
Et qui donc occupe désormais la position féminine? Qui peut donc se déclarer féminin, se parer pour ainsi dire du féminin et récuser la logique de l’Altérité?
Je vous laisse répondre!
Pourquoi enfin vous parler du Féminisme et bien parce que je ne peux que vous parler du lien social dans lequel j’ai été moi même prise et dont je suis les effets, un discours qui me détermine certainement le discours de la contre culture : le féminisme.
En effet Femme née en 1960 pendant la guerre d’Algérie, mes parents ont rapporté en France de leur jeunesse endeuillée par la guerre un pik-up et quelques disques de rock, de jazz et de chansons engagées, mais je ne les ai jamais vu les écouter, j’ai du en cachette comme pour beaucoup d’autre chose d’ailleurs faire marcher ce pik-up et entendre les voix des Platter, de Juliette Gréco… Vers 1965, puis 1968, 1969, je me souviens à la télévision, des discours du Général De Gaulle, il représentait tout ce qui contre quoi il fallait s’inscrire.. Tout en allant au catéchisme, j’ai donc bénéficié de cette contre culture, tout contre le général De Gaulle, mais aussi tout contre Dieu, j’ai grandi dans une opposition, dans une lutte contre cette idée de la domination avant tout des classes compte tenu de l’histoire de ma famille mais cette révolte, cette opposition viscérale, l’expression certainement de mon désir irréductible ne faisait qu’exacerber en retour chez moi une soumission. Ce discours de la contre culture m’a permis d’ancrer l’idée qu’il fallait que je fasse des études, qu’il fallait être du côté de la culture voire même du politique et qu’en tant que femme je me devais d’avoir un métier pour fonder mon indépendance pourtant à 20 ans je devins maman…
Et c’est certainement les effets de ce discours, la contre culture qui m’a amené en analyse, coincée entre cette opposition tout contre qui me donnait pourtant un point d’appui mais dont je ne savais pas me servir, car je restais dans cette croyance en la norme phallique et en même temps toujours en opposition je ratait à chaque fois la possibilité d’exercer un pouvoir sur le mouvement même de ma vie. Je restais dans la privation qui me commandait en tant que femme Est-ce que j’y parviens mieux aujourd’hui ? Je n’en suis pas si sûre!
Aujourd’hui comment le discours analytique, le discours déterminé par la place centrale qu’occupe le sujet de l’inconscient pourrait m’aider dans le mouvement de mon désir pour soutenir cette position que je nomme l' »a » pouvoir d’une femme, dans l’exercice de mes responsabilités.
Cette position de l' »a » pouvoir d’une femme m’apparait bien plus du côté du Réel que du semblant. A condition justement que le phallus – ce signifiant du manque de sens » ne sature pas le rapport d’une femme au réel. Mais laisse vacant le jeu de la lettre, ce point là serait à reprendre avec la lecture du « sinthome », dans ce séminaire nous entendons la fonction du phallus comme celle qui, entre deux ronds enlacés mais non liés, ferait exister un trou. Le vrai trou que Lacan dénote du mathème A (barré). Ce positionnement suppose certainement pour une femme, une forme d’ignorance, d’absence de signification, ou encore de solitude car la symbolisation de la femme fait défaut, défaut de parole. Pourtant une femme, à partir de ce point d’où s’origine sa privation réelle, et à partir de ce vrai trou pourrait bien trouver un point d’appui pour soutenir un pouvoir pour le mouvement de son désir.
Car dans le trajet d’une analyse comme le souligne par exemple Serge Lesourd le sujet se retrouve confronter au manque du signifiant, et l’analyste se refusera de nommer le sujet à une place, tout en refusant toutes les places où le sujet se nomme. Ainsi confronter à cet éprouvé du manque de signifiant et au-delà de la borne phallique qui a pu être entamée par le travail de la parole, peut alors se découvrir une dimension subjective jusqu’alors ignorée, celle du féminin en soi, de la part féminine inhérente à chaque sujet.
Et dans le mouvement de son désir, une femme, n’étant pas toute prise dans la castration, qui peut donc l’arrêter? Un homme, le Père, le phallus? A la fin d’une cure que devient pour elle cet aphorisme du lien social « Il n’est de phallus que du père mort depuis toujours ».
Dégagée d’une part de la loi de Créon, de cette croyance en la figure de l’exception et d’autre part de la loi d’Antigone et de son irréductible désir, une femme pourrait alors se déplacer dans un mouvement qui l’amènerait du pôle phallique celui qui peut donner un petit coup de pouce à la langue sans quoi la langue ne serait pas vivante et de cet au-delà, qui peut devenir un espace de création et non de conquête, de lutte. Alors ce curseur qu’est » Le phallus » ne serait plus désormais la cause mais la condition.
Car une femme devrait bien avoir plus d’un tour dans son sac pour s’en servir!
ANNEXES:
La contreculture désigne un ensemble de manifestations culturelles, d’attitudes, de valeurs, de normes utilisé par un groupe, qui s’oppose à la culture dominante ou la rejette. Le terme a été créé en 1969 par le sociologueTheodore Roszak. Il s’applique à un phénomène structuré, visible, significatif et persistant dans le temps.
Dans les années 1970, le terme contreculture est utilisé pour qualifier les mouvements contestataires de la jeunesse à l’encontre de la domination culturelle de la bourgeoisie et du puritanisme sexuel :
– mouvements d’extrême gauche, maoïsme,
– révolution sexuelle,
– mouvement hippie.
La contreculture était alors représentée dans les médias par le journal Libération, les magazines Actuel, Novamag, les premières radios libres…
Exemples de mouvements pouvant être associés, selon les époques, à la contreculture :
– le féminisme,
– la musique contestataire,
– l’underground artistique,
– les arts de la rue,
– le dadaïsme,
– le surréalisme,
– le situationnisme.
Il n’est pas rare de voir les personnes les plus créatives ou certaines des composantes de la contreculture récupérées par la culture dominante et le système marchand. Ainsi apparaissent de nouveaux produits fabriqués industriellement issus de la contreculture comme les blue-jeans usés.
LE FEMINISME:
En m’appuyant sur l’article de Claude Zaidman, « Le Féminisme » Genre et Socialisation, je retiendrai les points suivants:
Le féminisme est issu de ce mouvement appelé La contre culture, mouvement des années soixante, c’est dans le passage du discours politique anticapitaliste, antifasciste et internationaliste de la gauche marxiste des années 1960 en France, et des « nouveaux mouvements sociaux » des années 70 que le mouvement féministe s’est imposé.
Le terme féminisme recouvre plusieurs réalités je reprendrais la définition de Claude Zaidman : « Courant d’idées et luttes concernant les droits des femmes, le féminisme devient, dans certaines périodes historiques, un mouvement social et politique pour l’émancipation des femmes. Il désigne aussi un corpus de différentes théories », Notons qu’il est plus facile de définir le féminisme par: « ce contre quoi il lutte », que de décrire au positif le commun dénominateur des perspectives de toutes les composantes du mouvement des femmes.
Le mot d’ordre d’alors dans les années 60-68, c’était « le personnel est politique », cette formulation à contribuer à transformer le champ politique et jusqu’à nos jours avec ce que nous vivons dans notre pays depuis quelques années concernant la famille, la sexualité. Ce mot d’ordre alors très populaire peut être entendu de différente façon, car il recouvre des sens différents,
Mais pour les militantes de cette époque, leur engagement politique commençait par l’affirmation de leur propre existence comme sujet dans sa spécificité, s’agissait-il du sujet de l’inconscient? »Je ne crois pas bien que les freudo-maxistes ont pu faire l’amalgame. Pour elles, il ne s’agissait plus de s’effacer en tant qu’individu, d’une part, en tant qu’individu socialement et culturellement spécifié d’autre part, alors que le marxisme requérait de s’effacer devant « la lutte principale ». Le MLF a été un des éléments moteur de la revendication identitaire, mais n’a pas pour autant répondu à la question « que veut une femme » et a laisser les Dora du MLF devant le mystère de leur féminité!
Ce mot d’ordre « le personnel est politique » a unifié les femmes en montrant le caractère politique de toutes les formes d’oppression des femmes, dans l’ensemble de leur existence, vie privée, vie publique. Mais là où le féminisme rencontre pour l’analyste un écueil, c’est qu’il continue à prétendre à une portée universelle alors que les femmes ne constituent pas une groupe social comme un autre, une minorité parmi d’autre, cette vocation universaliste s’exprime d’abord par la non mixité du mouvement des femmes! Comment rétablir la différence entre les femmes elles mêmes?
C’est alors qu’a réapparu une nouvelle forme de hiérarchisation des inégalités et des luttes: la lutte contre la domination masculine, pensée comme universelle, est posée comme principale par rapport aux luttes des « minorités ».
Dans les années 70, après 1968, se différencie du MLF issu de 68 le « nouveau Mouvement de Libération des femmes » qui met au centre des ces objectifs comme son nom l’indique, le libération plutôt que l’égalité » de quoi les Femmes ont-elles à se libérer?
Dans les années 1980, les mouvements féministes se caractérisent par des divisions internes mais aussi par un nouveau rapport à l’Etat. Aussi le mouvement des femmes se morcelle en associations, groupes de pression divers, voire même il « s’institutionnalise » jusqu’à poser la question d’un féminisme d’état. Aujourd’hui le féminisme comme théorie politique de la représentation sociale, politique et symbolique des femmes a acquis droit de citée dans les débats de la démocratie occidentale et dans les organismes internationaux.