Frank Salvan, LES MORTS

LES MORTS

 Ce texte est une tentative de sensibilisation à la lecture de Joyce, à la connaissance de sa vie, son œuvre et leur entremêlement (si je puis dire).

J’ai tenu, à vous parler d’un des écrits de Joyce que je considère comme pivot dans son œuvre. Il s’agit de la dernière nouvelle de « Gens de Dublin » intitulée « Les morts ». Pourquoi ? Est-ce l’émotion éprouvée à la découverte de ce texte ? Ce que je savais de la vie de Joyce ? Avançant dans la lecture de Joyce et des lectures sur Joyce, j’ai depuis été conforté, par les points de vue de certains analystes, sur l’importance de ce texte.

De quoi nous parle-t-on dans ce récit ? :

A Dublin, une soirée à l’époque de Noël (certains analystes mentionnent l’épiphanie) dans la maison de deux sœurs, Kate et Julia qui vivent avec leur nièce Mary-Jane, se retrouvent amis et parents et surtout Gabriel, un neveu, Gretta, sa femme, couple sur lequel se fixe l’objectif dans la seconde partie de la nouvelle.

Discussions, danse, musique, chants, repas avec le discours d’usage obligé. L’attention est souvent portée sur Gabriel. Chargé du discours il manifeste à la fois fierté et inquiétude et son propos sera un bel hommage, quoiqu’un peu conventionnel, à l’hospitalité irlandaise. Mais Gabriel est parfois quelque peu distant. Nous reviendrons peut-être sur ce sentiment de malaise comme prémonitoire.

Puis l’attention se porte sur le couple Gretta- Gabriel au moment où les convives prennent congé de leurs hôtesses.

Je vous lis la fin de la nouvelle à l’instant où Gabriel au rez de chaussée, à la recherche de sa femme, l’aperçoit en haut de l’escalier et semble ne pas la reconnaître…

Remarquons la subtilité du récit à ce moment : Il ne la reconnaît pas, de ne l’avoir jamais connue et le dramatique est qu’il va apprendre à la connaître par la suite.

LECTURE

« Gabriel n’était pas allé à la porte avec les autres… c’est ainsi qu’il appellerait le tableau s’il était peintre » (Les Morts, p297 T1 Pleiade du milieu de page… fin de la page).

Petit commentaire avant de poursuivre.

Ce passage de la nouvelle est remarquablement illustré dans le film d’Angelica Huston intitulé « Gens de Dublin » qui traite de façon très fidèle au texte et à son esprit la dernière nouvelle « Les morts ».

Je reviens sur la phrase « Il se demanda ce qu’une femme, debout dans l’escalier, écoutant une lointaine musique, symbolise. »

Si je résumais en une formule lapidaire ce paragraphe je l’intitulerais « Contagion du désir ». En effet Gretta est sidérée par l’objet a voix à l’écoute du chant (la fille d’Aughrim) qui la replonge dans le souvenir de son amour et c’est l’objet a regard qui sidère Gabriel, à son tour. Lui aussi voudrait figer cet instant en une peinture qu’il intitulerait « lointaine musique »

Belle transmission et mutation de l’objet a. C’est la vision de sa femme désirante qui attise le désir de Gabriel.

Je me suis souvent demandé comment Gabriel pouvait ne pas reconnaître immédiatement Gretta parmi les convives de cette fin de soirée. Comme je vous l’ai déjà dit, la suite du récit va nous montrer que Gabriel ne connaissait pas vraiment Gretta. C’est tout l’art de Joyce que de créer ce moment d’incertitude.

Je résume la suite : remerciements, salutations et départ de Gretta et Gabriel ; ils se dirigent vers leur hôtel en compagnie d’autres convives.

En route Gabriel, empli de désir, se remémore des souvenirs tendres de sa vie avec Gretta. Je cite le passage d’un souvenir qui l’assaille :

« Dans une lettre qu’il lui avait alors écrite, il avait dit : Pourquoi de tels mots me paraissent si ternes et si froids ? Est ce parce qu’il n’est point de mot assez tendre pour être ton nom 

Telle une lointaine musique, ces mots qu’il avait écrits des années auparavant se portaient vers lui du fond du passé.»

J’insiste sur cet extrait car il s’agit d’une phrase que l’on trouve dans la correspondance de Joyce à Nora1. On voit là comment vie et écrit sont intimement mêlés dans l’oeuvre de Joyce. Il nous parle de lui au travers des pensées de son personnage, c’est ce qui fait la force et la beauté de la fin de cette nouvelle.

Les voici maintenant à l’hôtel, dans leur chambre,

Gabriel questionne Gretta sur sa tristesse. Eclatant en sanglots, elle dit :

« Oh je pense à cette chanson, La Fille D’Aughrim. »

Au travers du dialogue qui s’engage Gabriel va découvrir de réplique en réplique que Gretta aimait un jeune homme de santé délicate, Michael Furey, qui chantait souvent cette chanson. Il mourut peu de temps après son départ de Galway où elle vivait, pour Dublin. Et elle apprend à Gabriel, saisi d’une vague terreur à cette révélation, « je pense qu’il est mort pour moi ».

Je me suis permis de résumer de façon sommaire ces échanges d’une gradation subtile mais je vous invite à lire ces pages d’une grande finesse.

LECTURE de la fin de la nouvelle :

«  Ainsi il y avait eu dans son existence cet épisode romanesque : un homme était mort pour elle …

tandis qu’il entendait la neige tomber, évanescente, à travers tout l’univers, et, telle la descente de leur fin dernière, tomber, évanescente, sur tous les vivants et les morts. »

Je considère cette dernière nouvelle comme une œuvre pivot dans l’œuvre de Joyce ; elle est écrite à la fin des Gens de Dublin après l’échec de son séjour à Rome mais bien après les autres nouvelles du recueil. Et ceci à un moment où Joyce va assumer un statut d’exilé permanent. Il signe là un texte de grand écrivain. C’est à cette période qu’il réécrit « Stephen le Héros » pour en faire le « Portrait de l’artiste en jeune homme » ; il va écrire « Les exilés », « Ulysse » et « Finnegans Wake ».Toute son œuvre à venir pourra être considérée comme des chants de l’exil et Ellman son biographe présente « Les morts » comme le premier des chants de l’exil.

Lisant et relisant « les morts » je suis arrivé à penser cette nouvelle comme un rêve de Joyce. Son contenu serait le rêve manifeste et me substituant à Joyce, j’ai tenté de faire le travail du rêve pour découvrir deux ou trois choses de l’art de Joyce.

J’en commente quelques éléments.

  1. Ce travail (du rêve) nous permet d’identifier dans l’écrit les différents acteurs proches de l’entourage de Joyce (père, amis irlandais, en particulier l’importante Mrs Ivors puisque c’est elle qui renvoie à la référence symbolique à l’Ouest, le pays de Gretta, c’est à dire de Nora, le pays de l’Irlande authentique, en conflit avec le choix de l’exil vers le continent.

  2. Le chant « la fille d’Aughrim » renvoie au fantasme d’enfant mort. C’est un fantasme que l’on retrouve dans de grandes œuvres : Mort à Venise de Mann, Les affinités électives de Goethe, les Kinder Totenlieder de Mahler…

  3. Ce chant joue par ailleurs un rôle important dans le couple Nora-Joyce comme chez Gretta-Gabriel. Joyce était tourmenté par un amour d’adolescence de Nora, histoire similaire à celle de la nouvelle : mort du jeune Michael, ami de Nora, comme le Michael de la nouvelle. Le parallèle rêve – réalité est étonnant. En outre Joyce ressemblait au Michael de la réalité.2 Cet épisode de la vie de Joyce et Nora est plusieurs fois transposé dans les autres écrits de Joyce.

  4. Le personnage de Gabriel est une belle condensation de Joyce père (le discours de la réception est une réplique de ce que faisait le père de Joyce ) et de James Joyce lui même (épisode de la fille d’Aughrim).

  5. Le rêve révèle des conflits inconscients qui agitent l’esprit de Joyce au moment où il est prêt à s’exiler définitivement : choisir la vie en Europe et sa modernité ou faire le voyage vers l’Ouest, le pays authentique de Gretta-Nora, pays de l’amour absolu, même si la mort arrive tôt pour achever le voyage. Dans une lettre à Nora restée à Trieste pendant un court séjour de Joyce à Dublin, il lui écrit : « Je pars pour Cork demain matin mais je préférerais aller vers l’ouest, vers ces étranges lieux dont les noms me font trembler quand tes lèvres les prononcent, Oughterard, Clare-Galway, Coleraine, Oranmore, vers ces champs sauvages du Connacht où Dieu a fait pousser « ma belle fleur sauvage des haies, ma fleur bleu sombre trempée de pluie » ». 3

  6. Pour illustrer le caractère onirique de la nouvelle, je finirai par l’épisode du bruit sur la vitre que j’ai souligné pendant la lecture. Gretta l’évoque dans le récit de son adieu à Michael qui mourra quelques jours plus tard et Joyce le reprend à la toute fin du récit quand Gabriel épuisé, en larmes, s’endort. Cette fois, c’est la neige qui provoque ce bruit à l’instant où Gabriel a cru voir au travers de ses larmes le fantôme de Michael entouré d’une cohorte de morts. La neige recouvre morts et vivants et apaise le conflit mort – vivant qu’avait attisé sa frustration de n’avoir pas vécu un amour aussi absolu que celui qu’a vécu sa Gretta-Nora.

J’ai ainsi choisi de présenter ce texte majeur qui clôt Dubliners comme un rêve et j’ai essayé de repérer quelques éléments du travail du rêve.

Cependant, les nombreux éléments personnels de la vie de Joyce évoqués dans la nouvelle, et repris plusieurs fois dans son œuvre à venir, suggèrent de considérer « Les morts » comme une tentative d’autoportrait de l’auteur, je pense à un titre qui pourrait être « Portrait de l’artiste en amant ». C’est aussi une lecture possible.

1 James Joyce Lettres à Nora P 64-66 et note de fin.

2 Ibid.,Lettre du 3 décembre 1909 p 132-137 et R. Ellmann : Joyce 1 p.293 TEL Gallimard

3 Ibid., Lettre du 11 décembre 1909 p.150 dernier §;

Mireille LACANAL-CARLIER : Commentaire du texte de P. C. CATHELINEAU « Quel choix éthique pour l’institution ? »

Introduction

Pour commenter ce texte, j’ai pris appui sur Encore, RSI et le Sinthome de Lacan, les textes de J.C.Cathelineau Topologie : Discours et noeuds  ALI 21/08/2013  et Se passer du Nom-du-Père, à condition de s’en servir 04/04/2013 ainsi que de la conférence donné par Lacan à la faculté universitaire Saint Louis à Bruxelles, le 9 mars 1960 « A cette place, je souhaite qu’achève de se consumer ma vie » titre donné quand le texte fut publié en 1986 et dont le titre original est «  La psychanalyse est-elle constituante pour une éthique qui serait celle que notre temps nécessite ? »

(Lire p 2)

« …comment se fait-il que ces hommes, support tous et chacun d’un certain savoir ou supporté par lui, comment se fait-il que ces hommes s’abandonnent les uns les autres, en proie à la capture de ces mirages par quoi leur vie, gaspillant l’occasion laisse fuir son essence, par quoi leur passion est jouée, par quoi leur être , au meilleur cas, n’atteint qu’à ce peu de réalité qui ne s’affirme que de n’avoir jamais être déçu ?

Voilà ce que me donne mon expérience, la question que je lègue, en ce point, sur le sujet éthique.»

J.C.Cathelineau pose la question du choix éthique du nœud borroméen à 3 ou du nœud borroméen à 4  individuellement et collectivement.

Nous verrons que le propos n’est pas tant au niveau d’un choix mais bien celui d’une éthique, une éthique du désir qui nous engage à lire autrement dégager de notre fantasme et de l’allégeance à l’Au-moins-Un ;

Il appuiera son propos sur ce que la psychanalyse lacanienne me semble-t-il vise avec les opérations d’aliénation et de séparation dans la cure, à savoir que le sujet puisse vivre, responsable de ses actes par rapport à son désir inconscient, avec d’autres, responsables eux aussi de leur désir.

Je laisserai le dernier mot à Charles Melman, ou plutôt les trois derniers, qui nous indiquent l’évidence qui guide sa voix.

Commentaire du texte de Pierre Christophe CATHELINEAU «Quel choix éthique pour l’institution ?» Clôture du séminaire été 2013

Qu’est ce qui justifie ce titre : le choix éthique ?

Certains pensent que c’est un débat idéologique, d’autres sont mal à l’aise qu’en à ce choix entre nœud à 3 ou nœud à 4.

Nous verrons que le choix ne se situe pas à ce niveau là.

Les partisans du nœud à 4 prennent appui sur la dernière séance de RSI et 1ére du Sinthome où Lacan élabore une théorie de la nomination à savoir

(lire p 179 RSI)

« C’est entre ces 3 termes,………..donner comme substance au nom du père. »

Imaginaire : inhibition

Réel : angoisse

Symbolique : symptôme

et une théorie du symptôme qui nécessite la mise en place d’un rond 4ème.

Ainsi pour ces derniers le nœud à 4 serait une réponse aux impasses du nœud à 3: noeud à 3 rendrait indistinctes entre elles les consistances, elle les homogénéiserait, rien ne les distingueraient entre elles.

Il serait le nœud à 3, le nœud préliminaire de la paranoïa (nœud de trèfle)

Mais ni le nœud à 3, ni le nœud à 4 ne sont une idéologie car ils ne constituent pas, à l’inverse des visions du monde aucun système d’idée car ce ne sont pas des idées mais le Réel, si l’on suit Lacan.

Ils ne constituent pas en soit un modèle du réel, il s’agit du Réel et c’est bien cela le problème.

Revenons à RSI, Lacan nous rappelle que chez Freud le Réel, le Symbolique et l’Imaginaire ne sont noués que par le 4ème rond que Lacan appelle la réalité psychique, le Nom du Père, le complexe d’Oedipe.

Et Lacan de s’interroger si c’est indispensable ce 4ème rond.

Il en donne une réponse (lire P 85 RSI)

« Il est certain que, sans qu’on puisse……….un progrès dans la consistance. »

Il emploie le mot controuvé ( au début de la page 85) : c’est inventer au sens péjoratif du terme et il se demande si c’est un progrès le nœud à 3 par rapport au nœud à 4.. Ce n’est pas un progrès du fait qu’il soit 3 mais un progrès dans l’imaginaire, un progrès dans  la consistance.

La consistance Imaginaire du nœud borroméen où le R, le S et le I sont dits consistants du fait de tenir réellement ensemble.

C’est la définition de la consistance : ce qui tient ensemble, ce qui tient réellement.

Et il conclue ( p 85 lire fin RSI)  « Il est bien certain que dans l’état …………….l’état présent. »

Lacan revisite le complexe d’œdipe à la lumière du nœud à 3 en disant qu’il est implicite dans le nœud.

Ainsi l’échappement du 4ème ne supprimerait pas le complexe d’Oedipe et il nait du surmontement en 2 points du Réel sur le Symbolique. Il présentera cela comme la fin de la cure.

« Fin de la cure qui par ce surmontement permet de se passer du 4ème.»

On se passe du 4ème par ce surmontement en 2 points du S par Réel pour passer au noeud à 3.

Le rond 4ème n’est pas nécessaire, il est contingent. C’est l’effet d’une écriture, d’une écriture inconsciente. Il peut s’écrire ou ne pas s’écrire.

(Nécessité, ce qui ne cesse pas de s’écrire. Contingence, ce qui ne cesse pas de ne pas s’écrire.)

Pourquoi est-il possible de dire que les psy sont à la croisée des chemins à la foi d’un point de vue topologique, éthique et clinique parce qu’il leur est donné de pouvoir choisir entre le noeud à 3 ou le noeud à 4 pour guider leur pratique ?

C’est dans la façon dont chacun conçoit sa propre fin de cure et celle de ses patients.

Pourquoi choix éthique voulu par Lacan ?

Le choix en psy relève toujours d’une dimension éthique car il engage pour le psy son désir et la façon dont sur ce désir il ne cède pas. Le désir de l’analyste n’est pas le désir de normaliser, de soigner, de guérir.

(lire extrait Séminaire sur l’Ethique Lacan)

« C’est parce que nous savons mieux reconnaître la nature du désir qu’une révision éthique est possible. Parce que c’est le désir de l’analyste qui est le moteur de l’expérience analytique et que c’est un désir averti.

 Il n’y a pas d’autre bien que ce qui peut servir à payer le prix pour l’accès au désir.

Le désir de l’analyste n’est pas un désir pur, c’est un désir d’obtenir la différence absolu.»

Ce choix est pour Lacan une hérésie qui signifie choix en grec ancien et qui procède depuis Aristote d’un acte volontaire.

Lacan va qualifier Joyce d’hérétique : c’est à dire que Joyce va choisir d’aller jusqu’à n’avoir plus soif et appréhender un bout de réel.

Il le dit également de lui même et l’on entend résonner RSI en hérésie pour autant que c’est son choix qu’il nous invite à suivre.

Un choix déviant par rapport à la norme admise, la religion admise et il soulignera que pour lui son symptôme c’est le réel.

Le Nœud à 4 c’est celui de la nomination Symbolique, Réelle ou Imaginaire et il rend possible l’inscription d’un Nom du Père comme nomination Symbolique ou Réelle ou dit Lacan la mise en place d’une suppléance (dès RSI).

Que ce soit dans RSI ou dans le  Sinthome la nomination réelle ou symbolique, le Nom du Père renvoie à la fonction du père dans la religion et dans la famille avec la triangulation œdipienne.

Pour caractériser cette dimension essentielle retournons aux  mathèmes de la sexuation.

Ce rond 4e pour autant qu’il est situable de ce statut d’exception se traduit dans les mathèmes par

« Il existe au moins 1 X qui nie phi de X ».( document tableau sexuation)

«  C’est là ce qu’on appelle la fonction du père en tant que celui ci n’est d’aucune façon inscriptible. Le tout repose donc ici sur l’exception posée comme terme sur ce qui, ce phi de x, le nie intégralement. » ( p101 « Encore » Points tableau de la sexuation)

Topologiquement, les consistances des ronds RSI sont superposées sans être nouées entre elles et c’est le rond 4ème qui vient traverser l’intersection des trois et établir un lien entre ces trois. Ce 4ème est une exception structurante que constitue le Nom du Père. En passant par les mathèmes nous pouvons voir qu’elle prend cette exception appuie sur la jouissance phallique considérée comme le point d’appui de l’Autre jouissance (p 101 Encore La barré)).

A ce stade la seule issue d’une cure comme le proposait Freud et d’aimer et de travailler. C’est à dire indiquer que si tout procède de l’exception, le père n’en est que le type, le pauvre type en général

(si trop d’exceptions : voir le cas de Freud avec Schreiber).

Le rond 4ème permet de positiver l’objet du fantasme car qui dit jouissance phallique dit arrimage de ladite jouissance au fantasme (cf mathèmes). La traversée par le 4ème de ce qui ne sera plus le trou central entre RSI. Le trou central est traversé par le Nom du Père : c’est un trou habité auquel a à faire alors le sujet. Dans le trou il n’y aurait plus seulement l’objet a mais également le Nom du Père.

D’où la question quel ensemble au sens mathématiques le Nom du Père permet-il de définir ?

Le Nom du Père définit un ensemble fermé à l’intérieur duquel se conçoit un universel.

La mise à plat du nœud permet de comprendre que ce type d’exception détermine un dehors et un dedans, une frontière entre ceux qui sont éligibles à la même castration et les autres,  ceux qui en sont exclus, natifs d’une autre origine, les fous, les femmes….ceux qui n’appartiennent pas au clan.

Le Nom du Père comme le rappelait Melman implique la ségrégation et l’exclusion c’est la norme mâle.

Au Nom du Père comme  4ème sont ainsi associés les effets des discours et en particulier les effets de domination et de ségrégation (cf intervention « Discours et nœuds »21/08/13 Cathelineau).

Après ces considérations pourquoi le nœud à 3 est-il une alternative crédible, un choix éthique pour dépasser ce qui apparaît comme le symptôme de la névrose ?.

C’est-à-dire un choix éthique pour dépasser le symptôme de la névrose.

Lacan situe lui-même dans le symptôme le rond 4ème comme un symptôme sinon comme le symptôme. Il parle de suppléance dans RSI, et de symptôme dans le Sinthome.

Qu’est-ce que cela signifie soutenir la structure au delà du 4ème ?

C’est faire un sort à l’Au-moins-Un. Dans le nœud à 3 chaque consistance constitue l’exception sans  qu’aucune ne fasse exception plus que l’autre.

C’est transposable au nœud à 4 qui peut être figuré par une chaîne. Le nœud à 4 est aussi borroméen que le nœud à 3.

De quel nœud le discours du maître dépend-il ?

Dans la première leçon du Sinthome, Lacan répond et évoque le nœud à 4 et le faux trou formé par ce qu’il appelle le Symbole et le Symptôme

(p 31 lire Leçon du 18 novembre 1975).

« C’est bien en tant que le discours du maître………..il n’y a je dirai qu’un faux-trou. »

Lacan passe d’une théorie des discours à une théorie des nœuds pour penser l’économie de l’objet a.

Dans le nœud à 3 est donné à un homme, un père de soutenir sa fonction en mettant une femme en place d’objet a pour lui.

C’est la définition qu’il donnera d’une femme comme symptôme.

Le symptôme comme père – version.

Quelle économie de la jouissance résulte du nœud  à 3 différent du noeud à 4 ?

C’est l’ek-sistence des jouissances qui prime et non plus la jouissance phallique. L’économie de la jouissance est ordonnée par l’ek-sistence des jouissances les unes par rapport aux autres. Des jouissances comme réelles sans en privilégier une par rapport aux autres.

Dans le nœud à 3 les trois dimensions RSI cernent l’objet a qui si il est représenté par une femme, en tant qu’elle est prise dans le fantasme, ouvre sur un pur trou.

Lacan évoque le trou fait par le S dans le R, il le situe également à la jonction de I et R.

Melman rappelle qu’il suffit de remarquer que les trois consistances sont trouées et qu’elles serrent un point central.

Ce trou créé par le serrage des trois consistances serait le point d’aboutissement éthique qui décentre les jouissances. (et entre autre la jouissance phallique).

Pour faire de l’objet a et du trou l’enjeu d’une fin de cure, il faut lire la mise à plat.

Le trou est bordé par RSI, par l’ek-sistence du R, l’ek-sistence du S, l’ek-sistence du I. Le trou se soutient de cette ek-sistence et renvoie à un non-être, Lacan parle de désêtre.

Le trou se soutient de cette dimension si importante dans RSI de l’ek-sistence.

Ainsi Lacan dans le Sinthome définit le sujet comme serrage des trois dimensions.

Ce trou n’est pas le rien (comme l’objet cause pour l’anorexique) mais ce dont se supporte la structure au-delà du semblant.

C’est un vide mais articulé au S au R au I. Conséquence éthique à faire reposée sur le trou, la logique du nœud : il n’y a pas de prima ni de la jouissance phallique, ni de la jouissance Autre, et encore moins du sens.

Le vide relativise et dépasse ce prima des jouissances et rend caduque leur élection éthique.

Le trou met à distance le fantasme et constitue son au-delà : ce que devrait être l’enjeu de la direction de cure et la fin de sa cure.

Alors voulons- nous une institution normale ?

Une institution qui consacrerait la référence à l’Au-moins-Un, à la jouissance phallique et au symptôme, en prenant appui sur le Nom du Père et la norme mâle. Cela institue le transfert de travail sur l’Amour du Père. (réf à Freud et à Massen psychologie : le père tue les fils ou les fils tuent le père). Cela entraîne des guerres fratricides de verrouillage de la théorie….

A aucun moment finalement et malgré les interrogations de Lacan, la question de la référence à l’Un dans l’institution n’a été franchement posée, sauf peut être à l’ALI où Charles Melman interroge cette référence au Un sans tenir compte de la place qu’on lui suppose d’ordinaire.

Bien sûr à la fin de RSI Lacan évoque la nécessaire identification à un point du groupe. Mais Freud le rappelle tous les groupes ne se valent pas.

La question c’est un groupe organisé par le nœud à 3 ou le nœud à 4 ?

Pour les cartels Lacan fait référence au plus Un, un 4ème comme plus Un.

Le nouage est borroméen pour n éléments. C’est ce que nous montre le texte sur le temps logique et la sortie des trois prisonniers. (lire  Lacan dans Les non-dupent-errent)

« J’avais autrefois commis un truc qui s’appelait le temps logique et c’est curieux que j’y aie mis un second temps, le temps pour comprendre. Le temps pour comprendre ce qu’il y a à comprendre. C’est la seule chose dans cette forme que j’ai faite aussi épurée que possible, c’est la seule chose qu’il y avait à comprendre c’est que le temps pour comprendre ne va pas s’il n’y a pas trois. ».

Lacan parle de chaîne borroméenne qu’il introduit dans Encore et reprend dans RSI c’est à une sortie collective de la prison que nous invite Cathelineau

(.lire texte p5 Cathelineau Discours et Nœud )

« C’est pour autant que je fonde mon raisonnement sur la couleur du cercle que j’ai dans mon dos……Cette logique borroméenne est une façon d’atteindre ensemble à la vérité, de telle sorte que chacun y joue son rôle, y compris en commettant des erreurs. »

Pour certain il faut qu’il y ait Au-moins-Un quatrième incarné par le directeur de la prison pour que les prisonniers puissent sortir. Mais à lire Lacan cet Au-moins-Un fondateur n’est pas utile pour qu’un savoir se déduise de façon concertée.

Alors qu’en est-il réellement du point où nous en sommes ?

Cela devient difficile de se référer à l’Au-moins-Un guide, l’Au-moins-Un Père et l’Au-moins-Un Maître car ils représentent les effets mortifères du nœud et les guerres de successions qu’impliquerait pour l’institution ce dispositif.

Dans le nœud ici ce que l’on voit c’est la possibilité donnée à chacun d’engager son désir autour de la reconnaissance d’un trou, inhabité, inhabitable, par quiconque et par quoique ce soit et de s’engager ainsi avec les collègues dans un transfert de travail. Dans la chaîne présentée dans Encore (image p9 du texte de cathelineau) on trouve le trou central et également la place spécifiée du fondateur comme rond particulier.

Mais  nous dit Darmon dans la discussion, ce rond particulier ne fait pas exception car comme les autres si un est rompu lui aussi est défait. C’est donc cette solidarité que l’on trouve dans le principe du nœud borroméen que nous pourrions souhaiter retrouver dans un groupe d’analystes.

Plus d’identification à un symptôme qui justifierait exclusion et ségrégation.

La question qui reste à l’étude sera comment y parvenir ?

Le nœud borroméen à 3 instaure une autre logique que celle du nœud à 4, une logique des discours en tant que le nœud à 4 consacre le discours du Maître et les autres à sa suite.

Une autre logique que celle des mathèmes de la sexuation : l’universel ne relève plus de l’ensemble fermé donné par l’exception, l’exception n’est plus la seule marque du symbolique, elle est aussi celle du R et du S et ainsi les ensembles qui en résultent sont ouverts et l’universel relève d’une logique du potentiel. Il y a toujours plus Un à ajouter pour qu’elle se constitue.

La question qui vient alors pourquoi parler de choix éthique si justement on ne peut pas choisir son nœud (structure : pas de chirurgie des nœuds pour la changer) et on hérite ainsi de sa structure une fois pour toute.

Parce que c’est une chose de prendre le nœud à 4 au pied de la lettre, sans est une autre de la lire à l’éclairage du nœud à 3. Le nœud à 4 éclairé par les conséquences du nœud à 3 lui donne un jeu qu’il n’avait pas quand il restait centré sur l’exception, la jouissance phallique et le fantasme.

Finalement réintroduire une lecture borroméenne appuyée sur le nœud à 3 : relativité des jouissances, dépassement de la jouissance phallique et du fantasme, fin du prima de l’Au-moins-Un, sortie de la logique ségrégative et exclusive des discours et centrage sur le trou qui ordonne les jouissances.

La NEP a depuis longtemps renoncé au 4ème.Melman

Nous sommes en mesure en suivant Lacan de proposer une écriture du nœud qui soit tenable individuellement et collectivement en pariant sur la logique collective et solidaire.

Une logique solidaire qui se dégage d’un lien débarrassé de la référence à l’Au-moins-Un.

Cathelineau précisera un point voir même deux qui me paraissent essentiels et que je résumerai par apprenons à lire autrement.

C’est à dire que l’intérêt c’est la propriété borroméenne : chaque rond constitue l’exception. Nous pouvons lire le nœud borroméen à 3 ou à 4 de cette manière.

Il ajoutera que la pente naturelle des institutions est d’être constituées autour de l’Au-moins-Un

Mais suivre sa pente c’est la pente du symptôme et il semble que ce ne soit pas le dernier mot de l’analyse.

Charles Melman conclura par une logique qui découle de ce qui vient d’être dit que la psychanalyse c’est que dans le nœud borroméen il y a une subversion de tous les savoirs voir de tous les pouvoirs. en s’appuyant dans la clinique sur une autre façon de voir  qu’il nomme l’évidence.

Il rappelle qu’avec le symptôme ce dont nous jouissons c’est ce qui fait obstacle à la jouissance.

« Je souffre de ce dont je jouis ou je jouis de ce dont je souffre.

Avec le symptôme je me dégage de la responsabilité que je peux avoir dans cette affaire. Je ne m’autorise pas de mon symptôme pas plus que je ne m’autorise de mon désir quand je me réfère au Père. »

Dans le nœud à 4 l’évidence c’est qu’ils sont empilés les trois premiers et que le 4ème vient les nouer, vient assurer leur solidarité. L’évidence du nœud à 4 celle du symptôme n’est qu’un mode d’écriture et autrement dit la névrose c’est une faute d’orthographe. C’est peut-être la faute heureuse. Evidemment, ajoute-t-il il y a dans le nœud à 4 cette faculté d’une lecture sinthomatique comme l’illustre Joyce.

Il posera enfin la question de savoir comment faire pour enchaîner des petits a sachant qu’en tant que psychanalyste c’est la place que chacun est tenu d’occuper. « C’est déchaîner des petits a » Comment les faire tenir ensemble  sans qu’ils soient liés soit par l’exclusion soit par venir ternir les petits camarades ?

Pour terminer il rappelle que les discours c’est organisé par le phallus. Dans le nœud borroméen il y a une subversion de tous les savoirs, de tous les pouvoirs.

Et il conclue :

Voilà, voilà, voilà !!!

Mireille LACANAL-CARLIER

                                                                            Mars  2014

Séminaire Le sinthome : Leçon II du 9 décembre 1975 : Travail de Cartel par Sylvie Liotard avec Odile Boccard, Elisabeth Fradet, Astrid Ha et Frank Salvan

Frank nous a suggéré ce début très intéressant : « De retour des Etats-Unis, où il a passé 15jours, Lacan reprend ses considérations sur le nœud borroméen et cette leçon est pour lui l’occasion d’insister sur le rôle du 4ème rond. Le nœud rosace du tout début de la leçon, est bien là pour illustrer l’intérêt qu’il va porter au nouage du nœud borroméen par le 4ème rond ».

Cela nous ramène effectivement à ce que Lacan nous dit à la fin de la leçon, sous une forme interrogative en parlant de Joyce : « ….ce 4ème terme, celui à propos de quoi, aujourd’hui, j’ai voulu simplement vous montrer qu’il est essentiel au nœud borroméen lui-même ? ».

Après avoir terminé de lire cette leçon, je me suis dit : « Mais où nous a-t-il dit que c’est essentiel ? », ceci m’a fait reprendre ma lecture, d’autres personnes dans le cartel ont eu ce même sentiment.

 

Nous avons donc suivi la leçon pas à pas, comme nous le dit Lacan concernant le nœud borroméen ou la fonction du nœud, il nous dit cela : « C’est en effet pas par hasard, n’est-ce pas, c’est peu à peu que vous avez vu… que vous avez pu voir, c’est à dire entendre, pas à pas, comment j’en suis venu à exprimer par la fonction du nœud ce que j’avais d’abord avancé comme, disons, triplice du Symbolique, de l’Imaginaire et du Réel » p.34.

On dirait que Lacan nous suggère qu’avec le nœud borroméen, pour en saisir quelque chose, il faudrait voir, entendre et manipuler par le mouvement du pas à pas.

Ne pas aller trop vite, c’est également ce que Charles Melman nous suggère en nous proposant de revenir cette année sur les séminaires des « Non-dupes errent » et « RSI ».

 

Avec nos difficultés, nos hésitations et nos divergences, petit à petit, ce que nous pouvions en dire a pris forme, ce qui ne serait peut-être pas identique à un autre moment, dans un autre contexte.

Tout ceci me semble en relation avec ce que nous dit Lacan concernant son cheminement avec le nœud borroméen dans cette leçon.

Il nous dit ceci : « Il est très difficile de penser au nœud », un peu plus loin il reprend : « Le nœud borroméen est constitué par une géométrie qu’on peut bien dire interdite à l’imaginaire », il poursuit  « qui ne s’imagine qu’à travers toutes sortes de résistances, voire de difficultés », ceci donnant sa substance au nœud. On peut remarquer la forme négative devant « s’imagine ».

Il nous dit également que « le désir de connaître rencontre des obstacles », ce qui peut être mis en lien avec le Réel et la science qu’il évoque plus loin. Il termine dans cette leçon sur le registre de la difficulté de penser le nœud par : « C’est pour incarner cet obstacle que j’ai inventé le nœud, et que au nœud il faut se rompre ».

La première définition de se rompre est « se casser, se briser », on trouve ensuite « s’accoutumer à », dans le « il faut se rompre », nous pouvons entendre  toute la difficulté du nœud borroméen. Dans la même leçon Lacan nous dit que le nœud sert à nous repérer.

 

Dans son texte : « La Dentellière » du 19/06/2012, sur le site de l’ALI, Marc Darmon débute son texte par un extrait d’un texte de Descartes que Lacan citait et qui est celui-ci : « Il ne faut pas s’occuper tout de suite des choses difficiles et ardues, mais qu’il faut approfondir tout d’abord les arts les moins importants et les plus simples……ceux des femmes qui brodent ou font de la dentelle…..tous ces arts exercent admirablement l’esprit pourvu que nous ne les apprenions pas des autres mais que nous les découvrions par nous mêmes….. ».

Ce court extrait, aborde l’importance de pouvoir manipuler, en commençant par le plus simple et en découvrant par soi-même. Il permet également de faire une transition avec la suite du texte de Marc Darmon sur notre difficulté à manipuler les ronds de ficelle pour faire les nœuds, il parle même de « répugnance », peut-être due au fait, d’après ce que nous dit Lacan dans RSI, que le nœud borroméen serait du côté du refoulé primordial lui-même.

 

D’après Darmon le concept donne une image rassurante d’un cercle qui contient, nous pourrions dire du côté de l’Imaginaire, avec les ronds de ficelle les cercles sont évidés  et donc de cette façon, il faut faire avec ce qui leur ex-siste, ce qui se tient au dehors, peut-on dire du côté du Réel ?

 

Il nous invite ensuite à faire un nœud à 4, mais avant, nous allons revenir sur le nœud borroméen à 3, en s’appuyant sur la partie du livre de Jeanne Granon Lafont « La topologie ordinaire de Jacques Lacan » concernant les nœuds borroméens.

Le nœud borroméen est une certaine façon de nouer des brins de ficelle et dès qu’il y a plusieurs ficelles, on peut parler de chaîne, ce qui est important pour le nœud à 4.

Le nœud borroméen désigne en fait une chaîne borroméenne et bien sûr, une chaîne borroméenne est telle que si l’on coupe un rond, n’importe lequel, tout se sépare.

 

Avec la chaîne, nous voyons une certaine linéarité du nœud et la possibilité de multiplier le brin central en forme de croissant, ce qui permet de passer au nœud à 4. Lacan utilise le plus souvent la représentation permettant de voir dans le tracé « la fonction identique de chacun des ronds ». Le compte commence à 3, le nœud borroméen apporte la nécessité du 3.

Les 3 ronds jouent chacun le même rôle, 2 ronds sont posés l’un sur l’autre et le 3ème vient les lier ensemble, ce qui permet de voir les intersections et les coincements. L’écriture du nœud à 3 montre l’homogénéité des 3 consistances du Réel, du Symbolique et de l’Imaginaire. Dans le nouage, ils ont la même fonction, ils sont de « communes mesures ». Dans le nœud à 4, il y a toujours apparition de sous-groupes 2 à 2.

 

Pour revenir à l’invitation de Marc Darmon de fabriquer un nœud à 4, j’en ai effectivement fabriqué un, peut-être pour me sortir de l’imaginaire du nœud, en effet, sur le papier, je ne voyais pas comment en coupant l’un des ronds, les autres se détacheraient (voir figure p.34).

Avec la manipulation des ronds de ficelle, il me semble avoir avancé dans ce que peut représenter un nœud à 4. J’ai pu ainsi visualiser où se situent les faux-trous, notion qui jusque-là m’était totalement abstraite.

Dans un nœud à 4, il y a 2 faux-trous et les ronds sont solidaires 2 à 2. Marc Darmon nous dit que le milieu est composé du 3ème et du 4ème rond, faisant faux-trou et venant lier le 1er et le 2ème. Un faux-trou est le trou situé entre les deux consistances pliées en demi-oreille.

 

La manipulation permet également de s’apercevoir que le nœud à 4 introduit un certain ordre, il n’y a plus d’indifférenciation des ronds comme avec le nœud à 3 puisque le 4ème rond vient s’accrocher à un particulier.

Il faut noter l’importance de ce « un particulier » pour la question de la nomination. Je cite Marc Darmon pour passer de 3 à 4, en introduisant la nomination comme 4ème terme : « Il faut le nombre 3 pour que ça tienne, mais aller dire là-dedans lequel est le réel….., lequel fait nœud…..Il semble qu’avec le 4ème une distinction s’introduise : le Nom-du-Père avec le 4ème comme nomination, Lacan nous dit que c’est la seule chose dont nous soyons sûrs que ça fasse trou ; mais il n’est pas obligé que ce soit au trou du symbolique que soit conjointe la nomination ». A la fin  de la leçon, nous reviendrons sur le 4ème terme et la nomination.

 

Ce 4ème terme resterait noué à l’une des consistances, par exemple R et S noués par le quatrième et le I. De cette configuration nous dit Marc Darmon, Lacan parle de nomination imaginaire qui serait le faux trou, c’est une nomination qui ferait faux trou avec les trous du corps, si l’on peut dire.

Cette nomination imaginaire reste liée au rond imaginaire, il y a donc une distinction des ronds par rapport au nœud à trois.

Marc Darmon en déduit que l’on pourrait penser de la même manière à une nomination symbolique, entre réel et imaginaire, liée au rond du symbolique et une nomination réelle, entre imaginaire et symbolique, liée au rond du réel.

 

Lacan, dans sa relecture de Inhibition, Symptôme et Angoisse de Freud, dans le séminaire R.S.I, rapporte l’inhibition à la nomination imaginaire, le symptôme à la nomination symbolique et l’angoisse à la nomination réelle.

 

Colette Soler, dans son livre L’aventure littéraire ou la psychose inspirée, nous dit que pour Joyce, le quatrième rond aurait permis de faire tenir le nœud de façon borroméenne.

Ce serait par la publication de ses livres que Joyce parviendrait à la nomination symbolique.

 

Patrick Guyomard, lors des journées du séminaire d’été sur RSI, nous a dit que la question de la  nomination, c’est de « se faire un nom », c’est avec la question de la nomination que le nœud à 4 s’imposait et que Joyce, dans son œuvre, se fabriquait du père. Ceci introduisait le séminaire sur le Sinthome.

 

Dans la suite de la leçon, Lacan passe, a priori sans transition, à la problématique de l’initiation en psychanalyse, il nous dit «  qu’il n’y a pas à proprement parler d’initiation ». Si l’initiation suppose un savoir défini à transmettre, la psychanalyse, elle, transforme sur la base d’un savoir supposé avec l’ambiguïté que souligne Lacan d’un sujet non seulement double, mais divisé.

 

Dans la dernière leçon de RSI, du 13 Mai 1975, Lacan écrit : « Je n’y suis, moi, que pour peu de choses, étant déterminé comme sujet par l’inconscient, ou bien, par la pratique, une pratique qui implique l’inconscient comme supposé. Est-ce à dire, que comme tout supposé, il soit imaginaire ? C’est le sens même du mot sujet, supposé comme imaginaire. »

 

Colette Soler dans une émission de France Culture, Les nouveaux chemins de la connaissance, intitulée « le réel est-il supportable ? », nous dit : « qu’il n’y a qu’une façon pour la psychanalyse de se transmettre, c’est qu’il y ait des analystes ».

Tout ce qui est théorie bien sûr est capital, tout ce qui est de l’enseignement, l’étude de la clinique, est essentiel, aucun analyste ne s’avance dans la psychanalyse seulement avec son analyse. Mais, c’est par son analyse qu’il est supposé avoir été transformé comme sujet de telle sorte qu’il puisse assumer la tâche analytique.

On ne peut pas dire que cela se transmette de l’un à l’autre, ça se perpétue, par le fait qu’il y ait des analystes qui continuent : il y a de l’un, de l’un, de l’un…

 

Lacan dans RSI, leçon du 18 février 1975, nous dit que la pratique du nœud s’apparente à la pratique analytique.

Je le cite : « Il n’y a pas à ma connaissance, quoi que ce soit, sauf à apprendre à le constituer et à l’apprendre par la tresse, ce qui assurément n’est pas à proprement parler une façon mentale de résoudre la question… »

A la suite, toujours dans RSI, Lacan évoque le fait qu’il y aurait une relation entre l’expérience analytique et le nœud, est-ce dans son « il faut en user bêtement », ne pas être dans le savoir mais dans un décryptage.

Nous voyons courir dans cette leçon 2 du Sinthome, une intrication entre la pratique analytique et le nœud borroméen.

 

La parution contemporaine d’un ouvrage d’Erich Fromm intitulé La mission Sigmund Freud, va être l’occasion pour Lacan de revenir sur ce qu’il entend par vérité.

Il résume ainsi les propos de l’auteur « en quoi donc, si j’ai bien lu, Freud, un bourgeois, et un bourgeois bourré de préjugés, a-t-il atteint quelque chose qui fait la valeur propre de son dire, et qui n’est certes pas rien, qui est la visée de dire, sur l’Homme, la vérité ? ».

Lacan souhaite y apporter cette correction : la vérité dont la quête est l’objet ne peut que se mi-dire.

 

Toujours dans l’émission de France Culture, Colette Soler nous donne comme point de vue concernant la vérité ceci : «  Au début, Lacan valorise beaucoup la vérité. Puis il en est venu, à la dévaloriser. A dire, la vérité est trompeuse, c’est un mirage. De toute façon, elle ment. Pourquoi, il la dévalorise ? Parce que d’une part elle ment, -avec les mots on n’arrive pas à rejoindre le réel- (c’est ça son mensonge), mais en plus, elle n’est jamais que mi-dite ».

Comme il le dit, au début de Télévision en mars 74, les mots manquent. Le début du texte Télévision est celui-ci : « Je dis toujours la vérité : pas toute, parce que toute la dire, on n’y arrive pas. La dire toute, c’est impossible, matériellement : les mots y manquent. C’est même par cet impossible que la vérité tient au réel. »

 

Dans « L’envers de la psychanalyse » p.71, Lacan nous dit que la vérité n’est pas d’accès facile, comme certains oiseaux, quand il était petit, on lui disait qu’il fallait leur mettre du sel sur la queue pour les attraper.

Il évoque également son premier livre de lecture, qui  s’intitulait « Histoire d’une moitié de poulet », qui n’est pas plus simple à attraper quand il faut lui mettre du sel sur la queue. Il fait le rapprochement avec son enseignement qui pourrait s’intituler « Histoire d’une moitié de sujet ».

Sur l’image, le poulet était du bon côté. Il écrit : « on ne voyait pas l’autre, la coupe, celle où elle était probablement, puisqu’on voyait sur sa face droite : sans cœur, mais pas sans foie, dans les deux sens du terme. »

 

Il en conclut que la vérité est cachée, mais qu’elle n’est peut-être qu’absence. Freud montre par  le mot d’esprit, le mot sans queue ni tête, l’importance du non-sens. Lacan reprend que la vérité s’envole quand on ne veut plus la saisir, il écrit : « d’ailleurs puisqu’elle n’avait pas de queue, comment auriez-vous pu ? ».

 

Concernant la vérité et le savoir, dans un texte de Slavoj Zizek sur « Désir : pulsions= Vérité : savoir » dans le livre « La subjectivité à venir », l’auteur fait un rapprochement entre vérité, désir et interprétation, alors que le savoir serait du côté de la pulsion et de la construction mentale. Si l’on prend le sujet supposé d’un savoir inconscient et divisé, qui ne peut que mi-dire sa vérité, nous pourrions faire l’hypothèse que la vérité ne s’approche que par l’interprétation et l’émergence du sujet de l’inconscient et du désir.

En considérant également le nœud borroméen à 3 mis à plat, on remarque que Lacan place l’inconscient du côté du symbolique mais aussi pour une petite part du côté du réel et de l’imaginaire (schéma dans RSI p.25).

Peut-on ainsi penser que cette vérité ne pourrait que se mi-dire par le fait qu’elle ne peut s’approcher du Réel qui n’est pas pensable ? Une partie de la vérité fait partie du Réel.

 

 

Quatre points, dans la leçon 2 du séminaire de Lacan, nous ont interrogés et vont dans le travail de Sylvie, permettre un éclairage plus clinique.

   Sylvie vous a parlé de l’initiation  de la psychanalyse, que Lacan évoque p.35 du Sinthome et des problèmes que cela soulève, et Lacan continue, dans l’analyse : « tout sujet y livre ceci qu’il est toujours et n’est jamais qu’une supposition ».

 

  Nous avons cherché dans le Littré la définition du mot supposition: « Hypothèse de l’esprit, un point géométrique est une supposition, une conjecture de l’esprit ».

 Cette définition s’adapte parfaitement à la théorie lacanienne du sujet supposé savoir, qui est la position dans laquelle l’analysant met l’analyste dans le transfert, mais aussi s’applique à l’analyste qui suppose lui aussi un sujet qui doit advenir.

 

La définition du sujet,  qui a évolué au cours des années  chez Lacan, a toujours été mise au travail dans tous ses séminaires. On peut citer le dictionnaire  de la Psychanalyse de l’ALI, dans la partie étymologie, le sujet est le sujet du  désir que Freud a découvert dans l’inconscient, c’est un effet de l’immersion de l’homme dans le langage, il ex -siste ce sujet, au prix d’une perte, la castration.

       Lacan, dans la suite de la phrase commentée, écrit : « Je veux dire que le sujet comme tel  est toujours,  non pas seulement double,  mais divisé. Il s’agit de rendre compte de ce qui, de cette division, fait le réel ». Cela m’évoque le langage  et  la castration, nous ne pouvons jamais dire ce que nous voulons dire, nous sommes pris dans un réseau langagier qui ordonne et sociabilise, mais en même temps nous fait perdre sans cesse quelque chose,  que nous ne pouvons  jamais dire et quand nous parlons  nous disons  autre chose  que ce que nous croyons. Dire le réel ne peut être symbolisé dans la parole.

 

Je voudrais raccrocher ceci, à ce que dit Mr Melman dans sa conférence sur le Réel. Je le mets volontiers à la discussion critique. Ces éléments « discrets » qui  tombent dans le réel,  sont pris dans une  combinatoire.  Je peux écrire a b c mais pas a c b  dans une langue donnée et donc certains chutent dans le réel. Ces déchets de lettre ne pourraient- ils pas former la  lalangue, à travers le prisme de l’Autre ?

 

    Au  paragraphe  suivant, Lacan parle du livre d’ Erich Fromm, qu’il nomme  « la psychanalyse appréhendée à travers son père »,  en travaillant sur le père réel nous citerons dans le séminaire sur «  la relation d’objet »  page 220 : « le père  réel dont l’enfant n’ a jamais qu’une appréhension très difficile en raison de l’interposition des fantasmes  et de la nécessité de la relation symbolique…s’ il y a une chose qui  est au fondement de notre expérience analytique,  c’est bien que nous avons énormément de peine à appréhender ce qu’il y a de plus réel autour de nous,  c’est à dire les êtres humains. »

Cette citation de Lacan,  nous permet de saisir d’une autre manière, qu’il n’y a pas d’initiation de la psychanalyse  puisqu’il n’y a que de l’un, ce qui rejoint ce que disait Freud « chaque histoire est singulière ».

 

Dans notre cartel, Astrid se rappelait avoir écouté une émission de radio où Michel Onfray  parlait de son livre sur Freud, il ne cessait de citer Fromm. Il prenait la biographie de Freud et en sortait  une psycho- analyse, il cherchait  le sens, tel fait entraîne tel caractère, il était dans une explication  de l’œuvre par la biographie.  Je me  sers de ce que dit  Colette  Soler,  dans « L’aventure littéraire ou  la psychose inspirée » où elle met en avant que  Lacan s’est efforcé de montrer,  que nous pouvons apprendre,  aussi bien de l’œuvre que de l’auteur,  de sa personne ou de sa vie,  mais sans pouvoir déduire l’une de l’autre. La psycho- biographie est possible mais elle n’explique pas l’œuvre.

Rien,  ni personne ne peut expliquer pourquoi Lacan est Lacan et Joyce est Joyce.  Les trois dimensions lacaniennes et le quatrième rond,  peuvent- ils nous permettre de saisir quelque chose du sujet dans ce nouage?

 

     Une amie magistrate,  me disait combien l’explication psychologique,  dont certains se servent pour expliquer la délinquance, est un  effet pernicieux  de la vulgarisation de la psychanalyse. De plus, depuis  Freud,  nous savons qu’un enfant qui a subi des violences, ne devient pas obligatoirement un délinquant mais qu’un délinquant  a souvent  subi des violences dans sa jeunesse.  L’après- coup est une des grandes découvertes de Freud.

 

 Nous reprenons le texte de la leçon 2. Lacan parle de son voyage aux Etats Unis et raconte qu’il a été « soufflé » par sa rencontre avec Chomsky. J’ai écouté une émission de radio sur France Culture,  où un linguiste parlait de Chomsky, il nous apprenait  que Chomsky avait une formation de mathématicien  et travaillait pour la CIA. Pour lui,  le langage  et la biologie sont des sciences à rapprocher et le chiffrage de l’ADN pouvait faire lien. On  ne peut pas ne pas penser à l’écriture de la lettre dans l’inconscient,  mais le rapprochement s’arrête là. Pour Chomsky il n’y a pas de sujet, cela fait penser à l’homme neuronal de Changeux,  qui avait fait grand bruit,  il y a quelques années. Dans un autre séminaire  Mr H parlait de l’impossibilité de discuter entre neurologue et psychanalyste  au sujet du schéma corporel,  pour les uns et de l’image du corps propre pour les autres.  Ce sont deux représentations différentes d’un même sujet (ce paragraphe mériterait un approfondissement, il est réducteur par rapport au travail de Chomsky).

 

A propos de ce qu’écrit Lacan p.39 : « le langage mange le réel », Colette Soler, dans l’émission  de radio déjà citée, dit que dès qu’ il y a émission d’un signifiant, il y a évidage du réel; c’est ainsi que l’on peut dire, que la découverte de l’ADN a permis à la médecine de faire de grands progrès . Par  exemple, la police scientifique a fait une grande avancée grâce à la recherche de l’ADN,  qui permet d’élucider des crimes,  mais on sait aussi que le réel se referme toujours sur une nouvelle opacité.

 

  Page 44,  Lacan écrit le mot pense et panse, cela nous a fait repenser à l’ émission  de  Colette Soler, où elle  disait que  les mots  font « mouche »  sur le corps, le tout petit apprend les mots à travers le discours de l’Autre pendant le nourrissage et les soins corporels, il les enregistre aussi  avec le discours  fait autour de son corps, de son sexe…

Nous pensons aussi à ce que dit Mr Melman au cours de sa conférence, quand il parle  de la pensée du névrosé obsessionnel ou hystérique (de mémoire : « il pense avec sa tête,  l’obsessionnel ? Non et l’hystérique ? Non ». Nous attendons la suite avec impatience.

 

Pour terminer, un cas clinique. Une analysante,  qui a perdu ses parents jeunes,  vers  20 ans, commence à pouvoir évoquer des souvenirs heureux que la famille a connu,  en évoquant  l’ un d’ eux , un pique nique dont elle avait pu  regarder la photo  en pleurant mais heureuse elle dit: « j’aurais aimé  manger cette photo pour les mettre à l’abri »,  je précise que cette analysante n’est pas psychotique. 

 

              E F

 

 

 

 

Dans la dernière leçon du 13/05/75 du séminaire RSI, Lacan nous dit que : » Le Réel tient dans ces termes que j’ai déjà fomentés du nom d’ek-sistence, de consistance et de trou, de faire de l’ek-sistence écrite comme je l’écris, à savoir ce qui joue jusqu’à une certaine limite dans le nœud, cela supporte le Réel. Ce qui fait consistance est de l’ordre Imaginaire comme le suppose ceci qui nous est vraiment tangible que s’il y a quelque chose de quoi relève la rupture, c’est bien la consistance, à lui donner le sens le plus réduit. Il reste alors, mais reste-t-il ? Pour le Symbolique l’affectation du terme trou… ».

Dans la leçon 2, il amène ces notions de consistance, de trou et d’ek-sistence du côté de la triplicité du nœud et de son rôle fondamental. Il écrit ainsi :  « la triplicité qui résulte d’une consistance qui n’est affectée que de l’Imaginaire, d’un trou comme fondamental qui ressortit au Symbolique, et, d’autre part, d’une ek-sistence qui, elle, appartient au Réel ».

 

Jeanne Granon-Lafont dans « La topologie ordinaire de Jacques Lacan » part du fait qu’il faudrait définir les relations entre les 3 ronds (Réel, Symbolique, Imaginaire) par l’existence, le trou et la consistance. En fait, ces 3 ronds ont une consistance (la corde), une ek-sistence ( ce qui se tient au dehors), et un trou ( ce qui vient faire bord), donc pour chaque rond, comme pour le nœud borroméen, il y a triplicité de la consistance, du trou et de l’ek-sistence, est-ce là la commune mesure ?

La consistance est du côté de l’imaginaire et l’imaginaire renvoie au corps, à la problématique de l’image dans le miroir. Lacan a montré la fonction structurante, pour le sujet, de la découverte de l’image de son corps dans le miroir. Jeanne Granon-Lafont nous dit, je la cite : «  Image d’un petit autre auquel l’enfant s’identifie dans une précipitation qui signe son entrée dans le symbolique. Il s’agit d’un nouage de 3 registres ».

 

Nous avons réfléchi à ce nouage, au moment du stade du miroir, et nous avons pensé que le Réel pourrait être ce qui est avant que l’enfant que l’enfant se reconnaisse dans le miroir, l’Imaginaire serait l’image de l’enfant dans le miroir et le Symbolique la nomination par l’Autre maternel avec un grand A, de cette image dans le miroir : « oui, là, c’est toi, Pédro mon fils ». Par le nouage, dans cette image, Jeanne Granon-Lafon nous dit que « l’enfant reconnaît l’objet du désir de sa mère. Il s’y identifie, il s’en habille et, par ce moyen, se met à consister le trou symbolique, auquel équivaut le manque que présentifie le regard de la mère ».

 

En conclusion, nous nous rapportons à la dernière interrogation de Lacan pour  cette leçon 2. Il nous dit ceci : « Comment un art peut-il viser, de façon expressément divinatoire, à substantialiser dans sa consistance, sa consistance comme telle, mais aussi bien son ex-sistence, et aussi bien ce troisième terme, qui est le trou…. ce quatrième terme, celui à propos de quoi, aujourd’hui, j’ai voulu simplement vous montrer qu’il est essentiel au nœud borroméen lui-même ? ».

Comme je j’ai dit au début de l’exposé de notre travail, le fait qu’il nous dise comme ça, tout simplement à la fin qu’il a voulu nous montrer dans cette leçon, que ce quatrième est essentiel au nœud borroméen lui-même, nous laisse toujours dans cette interrogation par rapport au nœud à trois.

 

Claire Duguet dans un texte s’intitulant « Quelques notes sur le père dans RSI et le Sinthome », nous dit que dans RSI, Lacan aborde la question de la nécessité d’un quatrième terme qui pourrait représenter les Nom-du-Père en s’appuyant sur la théorie freudienne où la réalité psychique et le complexe d’Œdipe représente le quatrième terme. L’interdit représente le trou dans le symbolique car le symbolique est nécessaire pour qu’il y ait du Nom-du-Père. Le trou dans le symbolique est le trou du refoulé originaire, celui du réel de la castration.

A partir de son travail sur Joyce, Lacan pense le quatrième rond impliqué dans le nœud borroméen. La topologie des nœuds est telle, qu’il faut un quatrième rond pour distinguer les trois autres.

Dans le Sinthome, la fonction des Nom-du-Père devient nommante et Joyce permet de saisir, que si les trois registres ne sont pas noués, il est possible, si la personne se fait un nom aux yeux d’un public, que cet «événement de nomination » fasse acte de filiation.

 

Pour terminer, elle nous dit que pour Lacan, le nœud est une représentation de l’inconscient, c’est à dire, et elle le cite « nous sommes dedans, nous y sommes pris ».

Le sinthome, leçon IV du 13 Janvier 1976 par Mireille Lacanal-Carlier

 

Lacan dans cette leçon insiste sur le réel. C’est le fil qu’il nous donne à suivre.fil pour nous guider à travers le corps et l’écriture, le corps comme écriture, la lettre «  a letter, a litter » pour arriver à la question « Qu’est ce qui opère dans la cure ? »

 

7 décembre 1921 , 7 rue de l’Odéon, Jacques Lacan, il n’a que 20 ans assiste chez Adrienne Monnier à une lecture d’Ulysse par nul autre que James Joyce., Ainsi l’Irlandais ne quittera plus Lacan.

 

Lacan commence donc  la leçon en posant la question  « Qu’est ce que le savoir faire ? »

Il ébauche une réponse en disant que c’est l’art, l’artifice, ce qui donne à l’art dont on est capable une valeur remarquable « .Remarquable en quoi, puisqu’il n’y a pas d’Autre de l’Autre pour opérer le Jugement dernier » (fresque de Michel Ange peinte entre 1536 et 1541 alors qu’il avait une soixantaine d’année dans la chapelle Sixtine à Rome. Une des figures en bas à droite serait une représentation de lui-même qui enlève sa vieille peau) Pas de complétude à attendre.

Une limite est posée à la jouissance Quelque chose dont nous ne pouvons jouir.

Le sinthome comme nous le verrons sous-entend un savoir faire, un talent, quelque chose que le sujet a et propose.

 

Lacan prend appui dans ce séminaire sur le savoir faire de Joyce pour illustrer  ce point de rebroussement du symptôme au sinthome dans une création artistique.

Il nous propose comme paradigme le sinthome de Joyce.

« Joyce a orienté son art comme symptôme.

L’ics forme une consistance de nature langagière. Dans son œuvre c’est l‘embrouille des nœuds qui se trouvent faire le tissu, le texte essentiel de ce qu’il nous apporte ». Lacan 24 janvier 1976 Centre universitaire de Nice

Lacan fait l’hypothèse d’une suppléance au Nom du Père par un travail par rapport à l’art de la lettre qui s’appuie sur la vie et l’œuvre de Joyce.

 

Symptôme et sinthome

 

Philippe Julien dans Du symptôme au sinthome article cairn info nous informe que

le mot symptôme est né en 1495 dans la langue française en traduction du latin médical symptoma, pour signifier une co-incidence (cum incidere), c’est-à-dire ce qui « tombe ensemble » : telle maladie et tel signe pour le médecin.

Or le dico d’un certain  Bloch et von Wartburg nous dit que ce nom là s’écrivait « sinthome » qui vient du grec « suntithémi » qui veut dire  «  mettre ensemble. »

Equivocité homophonique

On voit donc là ce qui « tombe » du symptôme et ce qui se rassemble du sinthome.

 

Lacan a définit le symptôme de plusieurs façons : comme une métaphore, comme ce qui vient du réel, comme ce qui ne va pas et à la fin de son enseignement, comme un fait de structure dont la nécessité doit être interrogée.

A partir de 1953 Lacan fait valoir que le symptôme analytique est soutenu par une structure de langage, par des signifiants et par des lettres qui en sont les éléments matériels.

Le symptôme névrotique est l’équivalent d’une parole enclose à entendre et à déchiffrer. Lacan y voit à l’œuvre le mécanisme de la métaphore : la substitution du signifiant d’un trauma sexuel à un élément de la chaîne signifiante actuelle fixe le symptôme et produit son sens…..

Avec le nœud à quatre ronds, c’est la fonction du symptôme qui est précisé. La réalité psychique qui détermine avec Freud la formation du symptôme organisée par le complexe d’Œdipe ; cette réalité, Lacan l’a dit religieuse parce que fondée sur la croyance que le père est le castrateur, alors que ce sont les lois du langage qui imposent à renoncer à être ou à avoir le phallus. Le symptôme apparait comme ce qui maintient avec le Père un lien qui soutient l’identification et la jouissance sexuelle : le rond du symptôme dit aussi « rond du Nom du Père » permet de nouer RSI.

Pour Lacan le symptôme est la façon dont chacun jouit de son inconscient.

Dictionnaire international de la psy. Article de Valentin Nusinovici.

 

A partir de RSI (73-74) Lacan va donc montrer un nœud, un autre nœud, un nœud à quatre éléments. Le quart élément est compensatoire ; il a fonction de suppléance, dans la mesure où le nœud à trois ne tient pas de lui-même. Telle est la fonction du sinthome comme quart élément.

Le sinthome est réel c’est ce à quoi veut  arriver Lacan. Le sinthome comme réel et non comme « manifestations/formation » de l’Ics.

Le sinthome produit un tout autre abord du symptôme qui n’est plus forcément ce qui doit être réduit par l’interprétation. Lacan en vient à formuler le travail de l’analyse comme  produisant « un savoir y faire » avec son symptôme.

Et pour Lacan Joyce n’a pas un sinthome il est le sinthome. Il est ce quart élément de part son ego. Celui-ci à fonction  réparatrice grâce à l’art de Joyce. Cela lui permet de se faire un nom.

Il nous propose le sinthome de Joyce dans la mesure où il illustre par son écriture l’effet de l’usage du sens au point limite du hors sens, le sinthome donc inanalysable. Joyce est pour lui celui qui « sait y faire » avec son symptôme.

 

« l’ics c’est la face du réel…c’est la face du réel dont on est empêtré.

L’analyse ne consiste pas à ce qu’on soit libéré de ses sinthomes, l’analyse consiste à ce  qu’on sache pourquoi on est empêtré. » Le moment de conclure 10/01/78 Lacan

« Cela se produit du fait qu’il y a le symbolique. Le symbolique c’est le langage : on apprend à parler, ça laisse des traces,, ça laisse des traces et de ce fait ça laisse des conséquences qui ne sont rien que le « sinthome » et l’analyse consiste à rendre compte pourquoi on a ces « sinthomes » de sorte que l’analyse est lié au savoir »

Un savoir qui ne s’acquiert qu’à travers la perplexité.

Et Joyce l’illustre dans sa littérature par son opération de hachage de la langue, de brisure, de dislocation, de déchirure. Il dégage ainsi la langue de tout usage de communication et même de tout effet de littérature. Joyce arrive à être illisible.

Il laisse une œuvre qui pose mille énigmes pouvant entretenir les universitaires  pour de longues années. C’était d’ailleurs son souhait.

L e symptôme serait la non acceptation de la castration symbolique du père, alors que le sinthome serait de l’ordre d’une création de la part du sujet, comme dans Joyce, qui avec son art vidait de sens ce qui s’imposait à lui comme symptôme ( Hiltenbrand La clinique du réel)

 

Les vérités premières : le ronron des vérités premières : dieu et le jugement dernier. Les vérités premières qui sont une connaissance trompeuse.

Peut-on sortir du ronron des habitudes qui nous endorment ?

Ce ronron serait celui des religions qui induisent une manière de penser. Ce serait le ronron d’un Dieu créateur, du rapport du créateur à sa créature. Dans la perspective chrétienne nous parlons d’un dieu –père. C’est de cette religion dont Freud en la traitant d’illusion essayer de nous débarrasser.

L’idée de Dieu voir la croyance soutient la fonction et le sens du symptôme névrotique.

La psychanalyse peut-elle nous sortir de ce ronron ?

« Le ronron c’est la jouissance du chat »  ( La troisième Lacan 31/10/74)) Pour ne pas ronronner servons-nous des ronds de ficelle, de la topologie.

 

Le Nom du père est la forme laïque de cette présence dans la doctrine psy, de nos attaches à ce fond religieux.

Lacan va alors chercher à élaborer un nœud pour support des vérités premières. Le nœud ce qui supporte notre consistance .Et il pointe ici la différence entre une chaîne et un nœud ( le nœud se déduit de la chaîne).La chaîne est  au-delà  de 2.(Marie PierreBossy nous faisait remarquer que pourtant nous disons noeud.) D’ailleurs Lacan  p83, fin de la leçon  pose la question s’il n’y a pas abus à dire :

« faire un nœud avec ce que j’appellerai une chaî-neoud »

 

Il revient sur les vérités premières et nous amène à ce qu’on appelle la pensée. La pensée est liée à l’acte sexuel, elle gravite autour de cet acte. Cet acte qui de par sa nature implique une polarité actif-passif ce qui déjà engage dans un faux-sens. C’est ce qu’on appelle la connaissance

Mais la connaissance est trompeuse car l’actif c’est ce que nous connaissons mais comme nous faisons un effort pour connaître nous nous imaginons que nous sommes actif.. La pensée nous imaginons qu’elle est active . La connaissance participe du fantasme d’une inscription au lien sexuel.

En effet le sexuel ne fonde en rien quelque rapport qu’il soit. Il n’y a de rapport sexuel que sinthomatique

Le phallus n’appartient à aucun sexe, c’est ce qui circule entre, ce qui fait coupure. On ne peut saisir ce qui fait rapport, il n’y adonc pas de rapport. La fonction phallique c’est l’entre deux, le vide qui fait distinguer les choses.

« C’est en ça que consiste la pensée, que des mots introduisent dans le corps quelques représentations imbéciles » Lacan La troisième

Le sens se loge dans l’imaginaire. La pensée introduit des mots qui nous « rengorge », qui nous dégorge, que nous vomissons, ce qui va nous donner à vomir une vérité de plus.

« Vous vous imaginez que la pensée c’est ça,… se tient dans la cervelle…Moi je suis sûr …que ça se tient dans les peauciers du front….Enfin, si vous pouvez penser avec les peauciers du front, vous pouvez aussi penser avec les pieds » La troisième

Les pieds qui eux permettent de se mettre en marche. Ils permettent de faire un pas de côté.

 

Ainsi si la connaissance est trompeuse il nous faut repartir du début, de l’opacité sexuelle. Opacité car du sexuel ne fonde en rien quelque rapport que se soit. Et de nous rappeler qu’il n’y a de responsabilité dans le sens de réponse à côté que sexuelle. On est responsable que de notre position sexuelle .p 70 « On impute à Dieu ce qui est affaire de l’artiste » L’Autre de l’Autre c’est-à-dire impossible ce serait cela l’artifice ?

L’artiste est responsable au sens où c’est sa réponse c’est-à-dire son symptôme par rapport au fait qu’il n’y a pas de rapport sexuel.  Comment l’homme peut-il  être créateur si dieu l’est ? J. RUFF institut du champ freudien

« L’homme et non pas Dieu est un composé trinitaire » Lacan séminaire XXIII

 

Il revient sur la notion de Réel, distincte du symbolique et de l’imaginaire. Un Réel qui ne se fonde, n’existe qu’à en exclure le sens.

Le réel se fonde n’existe qu’à en exclure le sens.

 

Et il prend la consistance comme la forme la plus dépourvue de sens et qui pourtant s’imagine. Il n’y a de consistance que du nouage de RSI ( nœud c’est lier, relier, lire : c’est ce qui fait consistance).

La consistance c’est ce qui tient ensemble et c’est symbolisé par la surface ce qui nous donne l’idée du sac. Et de prendre l’exemple du corps qui se présente comme peau retenant dans son sac un tas d’organe et c’est comme ça que nous le sentons. Le corps comme amas de pièces détachées. C’est cette consistance qui nous montre la corde. Une corde comme résidu de la consistance et  qui exclut le nœud. Ainsi dans une corde le nœud est tout ce qui ex-iste à l’élément corde.

« Un nœud donc ça peut se faire » p 72 Le sinthome

 

Qu’est ce qu’un fait ? Il n’y a de fait que d’artifice car il n’y a de fait que du fait que le parlêtre le dise.

Il nous amène sur la voie de l’imagination. Le parlêtre parce qu’il parle ment et par là instaure dans la reconnaissance de faux faits. Et de revenir sur le corps qui est la seule consistance du sujet parlant et qui entretient avec son corps un rapport  d’adoration, un rapport imaginaire ( Je le pense donc j’essuie p72) imaginaire. Pour Lacan « Je suis où je ne pense pas » cad « Je suis où je n’articule pas, où je ne produis pas de sens ». Quand je pense, quand j’articule du sens je ne suis pas.

C’est le sexuel dit il qui ment la dedans à trop s’en raconter.

Mais finalement le seul concret que nous connaissons c’est toujours l’adoration sexuelle qui conduit à la méprise autrement dit au mépris même quand il adore un autre corps c’est le même mépris –véritable puisqu’il s’agit de vérité. (qui  elle ne peut être que mi-dite)

 

Alors qu’est ce que la vérité, qu’est ce que dire le vrai sur le vrai ? : suivre à la trace le réel qui ne consiste et qui n’existe que dans le nœud.

Mais ne nous hâtons pas et faisons comme si nous avions trouvé (« Je ne cherche pas je trouve » Picasso) Et pour cela Lacan repart de l’hystérie et sur la réalité de ce qu’il en est du rapport sexuel.

La tache de l’hystérique est de faire exister l’homme en l’incarnant, car il n’est pas question de laisser cette place vide. La douleur mal située de l’hystérique cherche dans son corps un lieu d’inscription.

Il y a toujours un problème majeur qui est celui de l’hystérique et de son corps, car ce corps lui

ek-siste parce que c’est le lieu de l’Autre

. « Ce lien de son corps est effectivement un lien étrange puisqu’il fonctionne comme un dépotoir, dépotoir de cet objet immonde qui est l’objet a, cause du désir de son partenaire » Melman  Problèmes posés à la psychanalyse

En tant qu’elle est – l’hystérique- la dernière réalité perceptible (husteron voulant dire « dernier » en  grec) pour nous rappeler que Freud n’a pu poser la question qui le taraudait «  Que veut la femme ?

(avec le sinthome il ne s’agira plus de résoudre l’énigme de la jouissance)

W w d W        Was will das Weib ,

Pour Lacan l’erreur de Freud c’est d’avoir pensé das weib au lieu de ein weib (une femme)

WweW

On ne peut pas parler de « La femme » qui n’ek-siste pas, une femme, pas toute.

« Toutes les femmes est un ensemble vide mais en revanche les femmes font série, une par une  Et si ça ek siste c’est donc du réel. Mais c’en est la consistance donc imaginaire du Réel. (Marie Charlotte Cadeau commentaire de RSI leçon du 21/01/1975)

L’énigme pour l’Homme c’est que la jouissance féminine n’est pas toute réglée par la loi de la castration. La jouissance féminine est hors langage, au-delà du phallus.

Cet excès de jouissance que la loi de la castration échoue à régler un symptôme peut l’appareiller et donner naissance à un art. Lacan écrit alors ce symptôme sinthome c’est-à-dire coupé du pêché.

«  sinthome » « sin » pêché.  «  Lacan fait le lien avec le pêché originel, la 1ère faute, de la doctrine chrétienne. Dans l’œuvre de Joyce le pêché en question c’est celui du père. Son père carent à suivi la même chute qu’Adam et Eve, et le sinthome de Joyce, sans la ptoma, sans la chute compense l’erreur de son père (Matinées lacaniennes Tom  Dezell)

 

Le sens en question révèle une énigme. En grec la parole est le radical d’énigme « ainos » « ainigma », en français parole et énigme n’ont aucune parenté. Enigme et réponse aussi énigmatique l’une que l’autre : registre de l’équivoque interprétative.

L’énigme c’est autre chose qu’une simple question. Chez les grecs c’est le Dieu qui prononce l’énigme par la voie de la Phytie : parole obscure qui défie l’entendement.

Ainigma l’énigme vient donc de ainos, parole prophétique. La puissance de l’énigme tient à ceci elle est une parole qui fait signe vers ce qui dépasse toute parole, fait vaciller la frontière du symbolique et du sens. Et au-delà  c’est le réel.

Le névrosé cherche à résoudre l’énigme des symptômes.

Joyce qu’en à lui croit à son sinthome et n’a pas intérêt à leur résolution. Il ne veut pas accepter la dette, l’héritage paternel.

Et Lacan présente cela comme une énigme : E énonciation e énoncé.

L’énigme c’est une énonciation tel qu’on en a pas trouve l’énoncé. L’énoncé se trouve dans la langue dans laquelle l’enfant a reçu ses premiers soins, celle de sa prime enfance, sa lalangue, la langue dans laquelle s’est constitué son symptôme ; ce qui fait retour en tant que lettre en est l’énonciation.

La lettre c’est le signifiant en tant que détaché de sa valeur de signification, détaché du signifié. Ce qui revient comme lettre n’est pas à lire puisque telle qu’elle elle ne nous dit rien du signifiant refoulé.

Lacan avec le travail sur la lettre nous indique que le travail de l’analyse consiste à réduire ce qui fait sens pour le patient, à réduire la lettre à un déchet. Il reprendra l’équivoque de Joyce sur «  a letter, a litter » «  une lettre, une ordure »

Avec ce glissement représentant la transformation de la lettre en déchet, Lacan montre l’usage que l’on peut faire pour aborder et réduire le symptôme dans l’analyse.

( Patricia Dahan La lettre entre savoir et jouissance)

La lettre contient une dimension de réel, elle n’est pas du côté du sens, elle est du côté du hors sens

L’énigme c’est l’art d’entre les lignes (allusion à la corde). et cela à un rapport avec l’écriture. C’est par des petits bouts d’écriture qu’on est entré dans le Réel, qu’on a cessé d’imaginer. L’écriture des petites lettres, des petites lettres mathématiques, c’est qui supporte le réel.p 75

Lacan  nous propose que l’écriture ça devait avoir un lien avec la façon dont nous écrivons le nœud et il fait référence à l’instance de la lettre. En dessinant un S avec une barre pour écrire un noeud. Cela nous rappelle aussi un corps.

La lettre est le support matériel que le discours concret emprunte au langage S/s  signifiant/signifié

« Ni dans ce que dit l’analysant, ni dans ce que dit l’analyste il n’y a autre chose que l’écriture »

leçon du 20/12/77 Lacan

Notre corps n’est-il pas porteur des traits, d’une écriture qui si nous savions les interpréter nous lirait.( lier) Marque sur le corps.

Histoire de Rémi.qui est en ULIS …….lui aussi aura à affronter de terribles épreuves avant de pouvoir peut être un jour mettre pied sur une terre d’accueil un Heim dont parle Freud. En attendant il se débat comme il peut avec une histoire de père dénié jusqu ‘à l’âge de 12 ans et mis en mots il y a quelques temps sous les signifiants « ordures déchets » induits «  Ton père je l’ai trouvé dans la rue tu ne crois pas que je me souviens de qui c’est ! »

Rémy tache sur les mains avec stylo de la mère en svt en cours sur les volcans. Il ne peut plus faire et cache ses mains dans ses poches.

Histoire de la banderole, prolongement du corps. Un corps de cortège avec sa tête et sa queue. Banderole comme un tatouage sur le corps.( Le Monde des livres 25 avril 2013)

MARINA

Revenons à Stephen ( S) qui est Joyce dans le roman. Il déchiffre sa propre énigme mais il ne va pas loin car il croit à tous ses symptômes. Le père de Joyce est un père carrant, toujours absent. Dans le livre Bloom cherche un fils. Stephen lui répond «  Non merci, trop peu pour moi. »

Ulysse est un témoignage de ce par quoi Joyce reste enraciné dans son père tout en le reniant : c’est ça son symptôme. «  J’ai dit qu’il était le symptôme » Lacan

 

Pour Lacan toute l’œuvre de Joyce est un long témoignage de cet enracinement du père tout en le reniant. Il fait référence à Exiles(1918). C’est l’unique œuvre théâtrale de Joyce. Le personnage est exilé de son propre pays comme l’était Joyce au moment d’écrire Exiles à Trieste. Lacan traduit « Les exils » : les différents exils du parlêtre ?

L’homme veut entraîner la femme à la trahison et il met en jeu une dialectique du doute qui accomplit un cycle en 4 temps  qui aboutit à « une blessure sans cause , ni origine, une blessure autonome qui ne peut se refermer »

Dans sa vie pour Joyce il n’y a qu’ « une seule femme » cad que Nora est alternativement la Vierge et la putain. Il  voudrait ne former qu’un seul être avec elle. L’Une femme c’est Nora.

« …qu’au regard de sa femme, il a les sentiments d’une mère…. » p 83

Exils exprime le non rapport sexuel, le fantasme de faire Un à deux.

Joyce : se faire livre aurait du se faire nœud.

 

Lacan revient à Ulysse et à l’énigme que propose Joyce sous les traits de Stephen (p 42 Ulysse folio)

Ulysse écrit entre 1914 et 1915, raconte un jour de la vie de L. Bloom le 16 juin 1904. Joyce rencontra sa femme cette journée là.

Lacan nous dit analysons Ulysse : mettons nous en position d’analyste et à cette énigme donnant ce fait  qu’elle est incompréhensible, et la réponse tout autant. L’analyse c’est la réponse à une énigme.

Réponse r tout à fait « conne » cad bête, déplacée, absurde. Et c’est pour cela qu’il faut garder la corde

L’analyste devra ainsi tenir la corde et apprendre à nouer d’un fil singulier les trous de cette singularité particulière. Nouages qui comme chez Joyce supposent une articulation  qui serve à retarder la rencontre fatidique avec les excès de la jouissance (Hétérité J. Adams ))

L’analyste celui qui peut soutenir la corde et devient ainsi « causeur de noeud. »

Il n’y a que des lettres dans l’ics, il n’y a que des cordes avec ses chaines et ses nœuds. La corde du noeud borroméen c’est l’écriture du réel, donc bien tenir la corde. Cela aboutit au nœud du non rapport sexuel.

« Le symptôme est le langage dont la parole doit être délivré » Les ecrits p 235 Lacan

 

Le sens résulte d’un champ entre Imaginaire et Symbolique. Faire une épissure pour obtenir un sens  qui se déplace : c’est l’objet de la réponse de l’analyste à l’exposé de l’analysant.

Quand nous faisons une épissure nous en faisons une autre entre symptôme et le Réel.

Qu’est ce qui opère dans l’analyse, c’est de suture et d’épissure qu’il s’agit dans l’analyse. C’est de structure et d’épissure qu’il s’agit. Qu’est ce qui opère dans la cure ?

Le statut de l’interprétation tient son efficacité à deux opérations : épissure et suture.

L’épissure consiste en un raccordement qui permet à une discontinuité de disparaître, de s’évanouir. C’est un raboutage. La suture (opération inverse de la coupure- métaphore est une coupure-) de 2 bords ou d’un bord sur lui-même- établit une nouvelle surface dont les propriétés dépendront de son articulation aux autres surfaces.

Cela permet le passage du 2 au 1 sans rupture.L’épissure comme mise en continuité.

La seconde qui procède de la première permet la fermeture, la clôture et installe donc une limite.et à un effet de surface avec la mise à plat du nœud.

La suture comme avènement d’une surface fermée.

Dans l’analyse il s’agit d’un raccordement d’une formation imaginaire avec le savoir inconscient. Cela produit un sens qui serait cette suture.

Qui produit une nouvelle épissure où symbolique vient toucher au réel : entrelacs entre symptôme et réel, réel parasite de la jouissance. Cela rend ainsi cette jouissance possible (par la suture) sous la forme  j’oui-sens cad ouïr un sens (ordinairement la compréhension d’un sens se met en travers d’un ouïr)

P83 « Trouver un sens implique de savoir quel est le nœud, et de le bien rabouter grâce à un artifice. » Sinthome Lacan

Ainsi le couple épissure suture contribue à résorber l’effet de sens dans un effet d’apprentissage ( un effet de faire, de savoir y faire) celui qui consiste à se faire une certaine jouissance.

 

L’analyse ne peut opérer qu’à partir de ce que se présentifie d’un réel par rapport au désir. ( Clinique du réel  Hiltenbrand leçon du 15 nov. 1995)

Le Réel se manifeste exclusivement sous la condition du désir cad que si vous vous abstenez, si vous inhibez votre désir vous êtes parfaitement tranquilles. Parce que ce réel alors à aucun moment ne risque de surgir.

Le Réel fait partie de la structure soit avec RSI soit avec le 4ème rond : l’impossible comme nécessaire ;

Lacan situe le réel en tant que c’est un heurt, un obstacle rencontré (Melman Ste Tulle le redit)

« Le réel n’est pas pour être su «  nous dit Lacan

Ca nous fait suer mais ce n’est pas pour être su, parce que c’est toujours de l’Autre que vient à se présenter le Réel pour un sujet. Et ce qui vient de l’Autre on ne sait pas. Et c’est dans cette perception de la réponse du manque qui est le sien ( réponse aperçue dans l’ Autre ) et où le sujet entrevoit sa propre perte, c’est là que se dessine la 1ère appréhension du Réel( ex ; du commandement de l’Autre)

 

La troisième : «  Le nœud il faut l’être…il n’en reste pas moins que de l’être, il faut que vous n’en fassiez que le semblant »

Le monde est imaginaire : fonction de représentation est dans le corps. Le réel n’est pas le monde. Aucun espoir d’atteindre le réel par la représentation.

« J’appelle symptôme ce qui vient du réel. »

Melman Travaux pratiques clinique psychanalytique p 57…………………..(à lire)

Le Réel dans la structure, c’est, pour reprendre une image de Lacan, la gueule d’un crocodile.

 

 

 

Mireille Lacanal-Carlier Juin 2012

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LE SINTHOME JACQUES LACAN

LECON IV  13 janvier 1976

Lacan dans cette leçon insiste sur le réel. C’est le fil qu’il nous donne à suivre.fil pour nous guider à travers le corps et l’écriture, le corps comme écriture, la lettre «  a letter, a litter » pour arriver à la question « Qu’est ce qui opère dans la cure ? »

 

7 décembre 1921 , 7 rue de l’Odéon, Jacques Lacan, il n’a que 20 ans assiste chez Adrienne Monnier à une lecture d’Ulysse par nul autre que James Joyce., Ainsi l’Irlandais ne quittera plus Lacan.

 

Lacan commence donc  la leçon en posant la question  « Qu’est ce que le savoir faire ? »

Il ébauche une réponse en disant que c’est l’art, l’artifice, ce qui donne à l’art dont on est capable une valeur remarquable « .Remarquable en quoi, puisqu’il n’y a pas d’Autre de l’Autre pour opérer le Jugement dernier » (fresque de Michel Ange peinte entre 1536 et 1541 alors qu’il avait une soixantaine d’année dans la chapelle Sixtine à Rome. Une des figures en bas à droite serait une représentation de lui-même qui enlève sa vieille peau) Pas de complétude à attendre.

Une limite est posée à la jouissance Quelque chose dont nous ne pouvons jouir.

Le sinthome comme nous le verrons sous-entend un savoir faire, un talent, quelque chose que le sujet a et propose.

 

Lacan prend appui dans ce séminaire sur le savoir faire de Joyce pour illustrer  ce point de rebroussement du symptôme au sinthome dans une création artistique.

Il nous propose comme paradigme le sinthome de Joyce.

« Joyce a orienté son art comme symptôme.

L’ics forme une consistance de nature langagière. Dans son œuvre c’est l‘embrouille des nœuds qui se trouvent faire le tissu, le texte essentiel de ce qu’il nous apporte ». Lacan 24 janvier 1976 Centre universitaire de Nice

Lacan fait l’hypothèse d’une suppléance au Nom du Père par un travail par rapport à l’art de la lettre qui s’appuie sur la vie et l’œuvre de Joyce.

 

Symptôme et sinthome

 

Philippe Julien dans Du symptôme au sinthome article cairn info nous informe que

le mot symptôme est né en 1495 dans la langue française en traduction du latin médical symptoma, pour signifier une co-incidence (cum incidere), c’est-à-dire ce qui « tombe ensemble » : telle maladie et tel signe pour le médecin.

Or le dico d’un certain  Bloch et von Wartburg nous dit que ce nom là s’écrivait « sinthome » qui vient du grec « suntithémi » qui veut dire  «  mettre ensemble. »

Equivocité homophonique

On voit donc là ce qui « tombe » du symptôme et ce qui se rassemble du sinthome.

 

Lacan a définit le symptôme de plusieurs façons : comme une métaphore, comme ce qui vient du réel, comme ce qui ne va pas et à la fin de son enseignement, comme un fait de structure dont la nécessité doit être interrogée.

A partir de 1953 Lacan fait valoir que le symptôme analytique est soutenu par une structure de langage, par des signifiants et par des lettres qui en sont les éléments matériels.

Le symptôme névrotique est l’équivalent d’une parole enclose à entendre et à déchiffrer. Lacan y voit à l’œuvre le mécanisme de la métaphore : la substitution du signifiant d’un trauma sexuel à un élément de la chaîne signifiante actuelle fixe le symptôme et produit son sens…..

Avec le nœud à quatre ronds, c’est la fonction du symptôme qui est précisé. La réalité psychique qui détermine avec Freud la formation du symptôme organisée par le complexe d’Œdipe ; cette réalité, Lacan l’a dit religieuse parce que fondée sur la croyance que le père est le castrateur, alors que ce sont les lois du langage qui imposent à renoncer à être ou à avoir le phallus. Le symptôme apparait comme ce qui maintient avec le Père un lien qui soutient l’identification et la jouissance sexuelle : le rond du symptôme dit aussi « rond du Nom du Père » permet de nouer RSI.

Pour Lacan le symptôme est la façon dont chacun jouit de son inconscient.

Dictionnaire international de la psy. Article de Valentin Nusinovici.

 

A partir de RSI (73-74) Lacan va donc montrer un nœud, un autre nœud, un nœud à quatre éléments. Le quart élément est compensatoire ; il a fonction de suppléance, dans la mesure où le nœud à trois ne tient pas de lui-même. Telle est la fonction du sinthome comme quart élément.

Le sinthome est réel c’est ce à quoi veut  arriver Lacan. Le sinthome comme réel et non comme « manifestations/formation » de l’Ics.

Le sinthome produit un tout autre abord du symptôme qui n’est plus forcément ce qui doit être réduit par l’interprétation. Lacan en vient à formuler le travail de l’analyse comme  produisant « un savoir y faire » avec son symptôme.

Et pour Lacan Joyce n’a pas un sinthome il est le sinthome. Il est ce quart élément de part son ego. Celui-ci à fonction  réparatrice grâce à l’art de Joyce. Cela lui permet de se faire un nom.

Il nous propose le sinthome de Joyce dans la mesure où il illustre par son écriture l’effet de l’usage du sens au point limite du hors sens, le sinthome donc inanalysable. Joyce est pour lui celui qui « sait y faire » avec son symptôme.

 

« l’ics c’est la face du réel…c’est la face du réel dont on est empêtré.

L’analyse ne consiste pas à ce qu’on soit libéré de ses sinthomes, l’analyse consiste à ce  qu’on sache pourquoi on est empêtré. » Le moment de conclure 10/01/78 Lacan

« Cela se produit du fait qu’il y a le symbolique. Le symbolique c’est le langage : on apprend à parler, ça laisse des traces,, ça laisse des traces et de ce fait ça laisse des conséquences qui ne sont rien que le « sinthome » et l’analyse consiste à rendre compte pourquoi on a ces « sinthomes » de sorte que l’analyse est lié au savoir »

Un savoir qui ne s’acquiert qu’à travers la perplexité.

Et Joyce l’illustre dans sa littérature par son opération de hachage de la langue, de brisure, de dislocation, de déchirure. Il dégage ainsi la langue de tout usage de communication et même de tout effet de littérature. Joyce arrive à être illisible.

Il laisse une œuvre qui pose mille énigmes pouvant entretenir les universitaires  pour de longues années. C’était d’ailleurs son souhait.

L e symptôme serait la non acceptation de la castration symbolique du père, alors que le sinthome serait de l’ordre d’une création de la part du sujet, comme dans Joyce, qui avec son art vidait de sens ce qui s’imposait à lui comme symptôme ( Hiltenbrand La clinique du réel)

 

Les vérités premières : le ronron des vérités premières : dieu et le jugement dernier. Les vérités premières qui sont une connaissance trompeuse.

Peut-on sortir du ronron des habitudes qui nous endorment ?

Ce ronron serait celui des religions qui induisent une manière de penser. Ce serait le ronron d’un Dieu créateur, du rapport du créateur à sa créature. Dans la perspective chrétienne nous parlons d’un dieu –père. C’est de cette religion dont Freud en la traitant d’illusion essayer de nous débarrasser.

L’idée de Dieu voir la croyance soutient la fonction et le sens du symptôme névrotique.

La psychanalyse peut-elle nous sortir de ce ronron ?

« Le ronron c’est la jouissance du chat »  ( La troisième Lacan 31/10/74)) Pour ne pas ronronner servons-nous des ronds de ficelle, de la topologie.

 

Le Nom du père est la forme laïque de cette présence dans la doctrine psy, de nos attaches à ce fond religieux.

Lacan va alors chercher à élaborer un nœud pour support des vérités premières. Le nœud ce qui supporte notre consistance .Et il pointe ici la différence entre une chaîne et un nœud ( le nœud se déduit de la chaîne).La chaîne est  au-delà  de 2.(Marie PierreBossy nous faisait remarquer que pourtant nous disons noeud.) D’ailleurs Lacan  p83, fin de la leçon  pose la question s’il n’y a pas abus à dire :

« faire un nœud avec ce que j’appellerai une chaî-neoud »

 

Il revient sur les vérités premières et nous amène à ce qu’on appelle la pensée. La pensée est liée à l’acte sexuel, elle gravite autour de cet acte. Cet acte qui de par sa nature implique une polarité actif-passif ce qui déjà engage dans un faux-sens. C’est ce qu’on appelle la connaissance

Mais la connaissance est trompeuse car l’actif c’est ce que nous connaissons mais comme nous faisons un effort pour connaître nous nous imaginons que nous sommes actif.. La pensée nous imaginons qu’elle est active . La connaissance participe du fantasme d’une inscription au lien sexuel.

En effet le sexuel ne fonde en rien quelque rapport qu’il soit. Il n’y a de rapport sexuel que sinthomatique

Le phallus n’appartient à aucun sexe, c’est ce qui circule entre, ce qui fait coupure. On ne peut saisir ce qui fait rapport, il n’y adonc pas de rapport. La fonction phallique c’est l’entre deux, le vide qui fait distinguer les choses.

« C’est en ça que consiste la pensée, que des mots introduisent dans le corps quelques représentations imbéciles » Lacan La troisième

Le sens se loge dans l’imaginaire. La pensée introduit des mots qui nous « rengorge », qui nous dégorge, que nous vomissons, ce qui va nous donner à vomir une vérité de plus.

« Vous vous imaginez que la pensée c’est ça,… se tient dans la cervelle…Moi je suis sûr …que ça se tient dans les peauciers du front….Enfin, si vous pouvez penser avec les peauciers du front, vous pouvez aussi penser avec les pieds » La troisième

Les pieds qui eux permettent de se mettre en marche. Ils permettent de faire un pas de côté.

 

Ainsi si la connaissance est trompeuse il nous faut repartir du début, de l’opacité sexuelle. Opacité car du sexuel ne fonde en rien quelque rapport que se soit. Et de nous rappeler qu’il n’y a de responsabilité dans le sens de réponse à côté que sexuelle. On est responsable que de notre position sexuelle .p 70 « On impute à Dieu ce qui est affaire de l’artiste » L’Autre de l’Autre c’est-à-dire impossible ce serait cela l’artifice ?

L’artiste est responsable au sens où c’est sa réponse c’est-à-dire son symptôme par rapport au fait qu’il n’y a pas de rapport sexuel.  Comment l’homme peut-il  être créateur si dieu l’est ? J. RUFF institut du champ freudien

« L’homme et non pas Dieu est un composé trinitaire » Lacan séminaire XXIII

 

Il revient sur la notion de Réel, distincte du symbolique et de l’imaginaire. Un Réel qui ne se fonde, n’existe qu’à en exclure le sens.

Le réel se fonde n’existe qu’à en exclure le sens.

 

Et il prend la consistance comme la forme la plus dépourvue de sens et qui pourtant s’imagine. Il n’y a de consistance que du nouage de RSI ( nœud c’est lier, relier, lire : c’est ce qui fait consistance).

La consistance c’est ce qui tient ensemble et c’est symbolisé par la surface ce qui nous donne l’idée du sac. Et de prendre l’exemple du corps qui se présente comme peau retenant dans son sac un tas d’organe et c’est comme ça que nous le sentons. Le corps comme amas de pièces détachées. C’est cette consistance qui nous montre la corde. Une corde comme résidu de la consistance et  qui exclut le nœud. Ainsi dans une corde le nœud est tout ce qui ex-iste à l’élément corde.

« Un nœud donc ça peut se faire » p 72 Le sinthome

 

Qu’est ce qu’un fait ? Il n’y a de fait que d’artifice car il n’y a de fait que du fait que le parlêtre le dise.

Il nous amène sur la voie de l’imagination. Le parlêtre parce qu’il parle ment et par là instaure dans la reconnaissance de faux faits. Et de revenir sur le corps qui est la seule consistance du sujet parlant et qui entretient avec son corps un rapport  d’adoration, un rapport imaginaire ( Je le pense donc j’essuie p72) imaginaire. Pour Lacan « Je suis où je ne pense pas » cad « Je suis où je n’articule pas, où je ne produis pas de sens ». Quand je pense, quand j’articule du sens je ne suis pas.

C’est le sexuel dit il qui ment la dedans à trop s’en raconter.

Mais finalement le seul concret que nous connaissons c’est toujours l’adoration sexuelle qui conduit à la méprise autrement dit au mépris même quand il adore un autre corps c’est le même mépris –véritable puisqu’il s’agit de vérité. (qui  elle ne peut être que mi-dite)

 

Alors qu’est ce que la vérité, qu’est ce que dire le vrai sur le vrai ? : suivre à la trace le réel qui ne consiste et qui n’existe que dans le nœud.

Mais ne nous hâtons pas et faisons comme si nous avions trouvé (« Je ne cherche pas je trouve » Picasso) Et pour cela Lacan repart de l’hystérie et sur la réalité de ce qu’il en est du rapport sexuel.

La tache de l’hystérique est de faire exister l’homme en l’incarnant, car il n’est pas question de laisser cette place vide. La douleur mal située de l’hystérique cherche dans son corps un lieu d’inscription.

Il y a toujours un problème majeur qui est celui de l’hystérique et de son corps, car ce corps lui

ek-siste parce que c’est le lieu de l’Autre

. « Ce lien de son corps est effectivement un lien étrange puisqu’il fonctionne comme un dépotoir, dépotoir de cet objet immonde qui est l’objet a, cause du désir de son partenaire » Melman  Problèmes posés à la psychanalyse

En tant qu’elle est – l’hystérique- la dernière réalité perceptible (husteron voulant dire « dernier » en  grec) pour nous rappeler que Freud n’a pu poser la question qui le taraudait «  Que veut la femme ?

(avec le sinthome il ne s’agira plus de résoudre l’énigme de la jouissance)

W w d W        Was will das Weib ,

Pour Lacan l’erreur de Freud c’est d’avoir pensé das weib au lieu de ein weib (une femme)

WweW

On ne peut pas parler de « La femme » qui n’ek-siste pas, une femme, pas toute.

« Toutes les femmes est un ensemble vide mais en revanche les femmes font série, une par une  Et si ça ek siste c’est donc du réel. Mais c’en est la consistance donc imaginaire du Réel. (Marie Charlotte Cadeau commentaire de RSI leçon du 21/01/1975)

L’énigme pour l’Homme c’est que la jouissance féminine n’est pas toute réglée par la loi de la castration. La jouissance féminine est hors langage, au-delà du phallus.

Cet excès de jouissance que la loi de la castration échoue à régler un symptôme peut l’appareiller et donner naissance à un art. Lacan écrit alors ce symptôme sinthome c’est-à-dire coupé du pêché.

«  sinthome » « sin » pêché.  «  Lacan fait le lien avec le pêché originel, la 1ère faute, de la doctrine chrétienne. Dans l’œuvre de Joyce le pêché en question c’est celui du père. Son père carent à suivi la même chute qu’Adam et Eve, et le sinthome de Joyce, sans la ptoma, sans la chute compense l’erreur de son père (Matinées lacaniennes Tom  Dezell)

 

Le sens en question révèle une énigme. En grec la parole est le radical d’énigme « ainos » « ainigma », en français parole et énigme n’ont aucune parenté. Enigme et réponse aussi énigmatique l’une que l’autre : registre de l’équivoque interprétative.

L’énigme c’est autre chose qu’une simple question. Chez les grecs c’est le Dieu qui prononce l’énigme par la voie de la Phytie : parole obscure qui défie l’entendement.

Ainigma l’énigme vient donc de ainos, parole prophétique. La puissance de l’énigme tient à ceci elle est une parole qui fait signe vers ce qui dépasse toute parole, fait vaciller la frontière du symbolique et du sens. Et au-delà  c’est le réel.

Le névrosé cherche à résoudre l’énigme des symptômes.

Joyce qu’en à lui croit à son sinthome et n’a pas intérêt à leur résolution. Il ne veut pas accepter la dette, l’héritage paternel.

Et Lacan présente cela comme une énigme : E énonciation e énoncé.

L’énigme c’est une énonciation tel qu’on en a pas trouve l’énoncé. L’énoncé se trouve dans la langue dans laquelle l’enfant a reçu ses premiers soins, celle de sa prime enfance, sa lalangue, la langue dans laquelle s’est constitué son symptôme ; ce qui fait retour en tant que lettre en est l’énonciation.

La lettre c’est le signifiant en tant que détaché de sa valeur de signification, détaché du signifié. Ce qui revient comme lettre n’est pas à lire puisque telle qu’elle elle ne nous dit rien du signifiant refoulé.

Lacan avec le travail sur la lettre nous indique que le travail de l’analyse consiste à réduire ce qui fait sens pour le patient, à réduire la lettre à un déchet. Il reprendra l’équivoque de Joyce sur «  a letter, a litter » «  une lettre, une ordure »

Avec ce glissement représentant la transformation de la lettre en déchet, Lacan montre l’usage que l’on peut faire pour aborder et réduire le symptôme dans l’analyse.

( Patricia Dahan La lettre entre savoir et jouissance)

La lettre contient une dimension de réel, elle n’est pas du côté du sens, elle est du côté du hors sens

L’énigme c’est l’art d’entre les lignes (allusion à la corde). et cela à un rapport avec l’écriture. C’est par des petits bouts d’écriture qu’on est entré dans le Réel, qu’on a cessé d’imaginer. L’écriture des petites lettres, des petites lettres mathématiques, c’est qui supporte le réel.p 75

Lacan  nous propose que l’écriture ça devait avoir un lien avec la façon dont nous écrivons le nœud et il fait référence à l’instance de la lettre. En dessinant un S avec une barre pour écrire un noeud. Cela nous rappelle aussi un corps.

La lettre est le support matériel que le discours concret emprunte au langage S/s  signifiant/signifié

« Ni dans ce que dit l’analysant, ni dans ce que dit l’analyste il n’y a autre chose que l’écriture »

leçon du 20/12/77 Lacan

Notre corps n’est-il pas porteur des traits, d’une écriture qui si nous savions les interpréter nous lirait.( lier) Marque sur le corps.

Histoire de Rémi.qui est en ULIS …….lui aussi aura à affronter de terribles épreuves avant de pouvoir peut être un jour mettre pied sur une terre d’accueil un Heim dont parle Freud. En attendant il se débat comme il peut avec une histoire de père dénié jusqu ‘à l’âge de 12 ans et mis en mots il y a quelques temps sous les signifiants « ordures déchets » induits «  Ton père je l’ai trouvé dans la rue tu ne crois pas que je me souviens de qui c’est ! »

Rémy tache sur les mains avec stylo de la mère en svt en cours sur les volcans. Il ne peut plus faire et cache ses mains dans ses poches.

Histoire de la banderole, prolongement du corps. Un corps de cortège avec sa tête et sa queue. Banderole comme un tatouage sur le corps.( Le Monde des livres 25 avril 2013)

MARINA

Revenons à Stephen ( S) qui est Joyce dans le roman. Il déchiffre sa propre énigme mais il ne va pas loin car il croit à tous ses symptômes. Le père de Joyce est un père carrant, toujours absent. Dans le livre Bloom cherche un fils. Stephen lui répond «  Non merci, trop peu pour moi. »

Ulysse est un témoignage de ce par quoi Joyce reste enraciné dans son père tout en le reniant : c’est ça son symptôme. «  J’ai dit qu’il était le symptôme » Lacan

 

Pour Lacan toute l’œuvre de Joyce est un long témoignage de cet enracinement du père tout en le reniant. Il fait référence à Exiles(1918). C’est l’unique œuvre théâtrale de Joyce. Le personnage est exilé de son propre pays comme l’était Joyce au moment d’écrire Exiles à Trieste. Lacan traduit « Les exils » : les différents exils du parlêtre ?

L’homme veut entraîner la femme à la trahison et il met en jeu une dialectique du doute qui accomplit un cycle en 4 temps  qui aboutit à « une blessure sans cause , ni origine, une blessure autonome qui ne peut se refermer »

Dans sa vie pour Joyce il n’y a qu’ « une seule femme » cad que Nora est alternativement la Vierge et la putain. Il  voudrait ne former qu’un seul être avec elle. L’Une femme c’est Nora.

« …qu’au regard de sa femme, il a les sentiments d’une mère…. » p 83

Exils exprime le non rapport sexuel, le fantasme de faire Un à deux.

Joyce : se faire livre aurait du se faire nœud.

 

Lacan revient à Ulysse et à l’énigme que propose Joyce sous les traits de Stephen (p 42 Ulysse folio)

Ulysse écrit entre 1914 et 1915, raconte un jour de la vie de L. Bloom le 16 juin 1904. Joyce rencontra sa femme cette journée là.

Lacan nous dit analysons Ulysse : mettons nous en position d’analyste et à cette énigme donnant ce fait  qu’elle est incompréhensible, et la réponse tout autant. L’analyse c’est la réponse à une énigme.

Réponse r tout à fait « conne » cad bête, déplacée, absurde. Et c’est pour cela qu’il faut garder la corde

L’analyste devra ainsi tenir la corde et apprendre à nouer d’un fil singulier les trous de cette singularité particulière. Nouages qui comme chez Joyce supposent une articulation  qui serve à retarder la rencontre fatidique avec les excès de la jouissance (Hétérité J. Adams ))

L’analyste celui qui peut soutenir la corde et devient ainsi « causeur de noeud. »

Il n’y a que des lettres dans l’ics, il n’y a que des cordes avec ses chaines et ses nœuds. La corde du noeud borroméen c’est l’écriture du réel, donc bien tenir la corde. Cela aboutit au nœud du non rapport sexuel.

« Le symptôme est le langage dont la parole doit être délivré » Les ecrits p 235 Lacan

 

Le sens résulte d’un champ entre Imaginaire et Symbolique. Faire une épissure pour obtenir un sens  qui se déplace : c’est l’objet de la réponse de l’analyste à l’exposé de l’analysant.

Quand nous faisons une épissure nous en faisons une autre entre symptôme et le Réel.

Qu’est ce qui opère dans l’analyse, c’est de suture et d’épissure qu’il s’agit dans l’analyse. C’est de structure et d’épissure qu’il s’agit. Qu’est ce qui opère dans la cure ?

Le statut de l’interprétation tient son efficacité à deux opérations : épissure et suture.

L’épissure consiste en un raccordement qui permet à une discontinuité de disparaître, de s’évanouir. C’est un raboutage. La suture (opération inverse de la coupure- métaphore est une coupure-) de 2 bords ou d’un bord sur lui-même- établit une nouvelle surface dont les propriétés dépendront de son articulation aux autres surfaces.

Cela permet le passage du 2 au 1 sans rupture.L’épissure comme mise en continuité.

La seconde qui procède de la première permet la fermeture, la clôture et installe donc une limite.et à un effet de surface avec la mise à plat du nœud.

La suture comme avènement d’une surface fermée.

Dans l’analyse il s’agit d’un raccordement d’une formation imaginaire avec le savoir inconscient. Cela produit un sens qui serait cette suture.

Qui produit une nouvelle épissure où symbolique vient toucher au réel : entrelacs entre symptôme et réel, réel parasite de la jouissance. Cela rend ainsi cette jouissance possible (par la suture) sous la forme  j’oui-sens cad ouïr un sens (ordinairement la compréhension d’un sens se met en travers d’un ouïr)

P83 « Trouver un sens implique de savoir quel est le nœud, et de le bien rabouter grâce à un artifice. » Sinthome Lacan

Ainsi le couple épissure suture contribue à résorber l’effet de sens dans un effet d’apprentissage ( un effet de faire, de savoir y faire) celui qui consiste à se faire une certaine jouissance.

 

L’analyse ne peut opérer qu’à partir de ce que se présentifie d’un réel par rapport au désir. ( Clinique du réel  Hiltenbrand leçon du 15 nov. 1995)

Le Réel se manifeste exclusivement sous la condition du désir cad que si vous vous abstenez, si vous inhibez votre désir vous êtes parfaitement tranquilles. Parce que ce réel alors à aucun moment ne risque de surgir.

Le Réel fait partie de la structure soit avec RSI soit avec le 4ème rond : l’impossible comme nécessaire ;

Lacan situe le réel en tant que c’est un heurt, un obstacle rencontré (Melman Ste Tulle le redit)

« Le réel n’est pas pour être su «  nous dit Lacan

Ca nous fait suer mais ce n’est pas pour être su, parce que c’est toujours de l’Autre que vient à se présenter le Réel pour un sujet. Et ce qui vient de l’Autre on ne sait pas. Et c’est dans cette perception de la réponse du manque qui est le sien ( réponse aperçue dans l’ Autre ) et où le sujet entrevoit sa propre perte, c’est là que se dessine la 1ère appréhension du Réel( ex ; du commandement de l’Autre)

 

La troisième : «  Le nœud il faut l’être…il n’en reste pas moins que de l’être, il faut que vous n’en fassiez que le semblant »

Le monde est imaginaire : fonction de représentation est dans le corps. Le réel n’est pas le monde. Aucun espoir d’atteindre le réel par la représentation.

« J’appelle symptôme ce qui vient du réel. »

Melman Travaux pratiques clinique psychanalytique p 57…………………..(à lire)

Le Réel dans la structure, c’est, pour reprendre une image de Lacan, la gueule d’un crocodile.

 

 

 

Mireille Lacanal-Carlier Juin 2012

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Leçon I du séminaire « Le sinthome » par Catherine Prudhomme

Cette première leçon fait le lien entre le travail en devenir dans le séminaire, soit les pistes que Lacan va emprunter, et le travail effectué dans le dernier séminaire R.S.I. qui se poursuit ici : Le symptôme, dans la triade Inhibition, Symptôme, Angoisse, localisé dans le nœud borroméen entre Symbolique et Réel, les trois nominations, seule la nomination symbolique sera reprise, et le nouage par le Nom du Père.

L’écriture du mot sinthome montre d’emblée le lien entre :

– L’écriture de Joyce et le rôle qu’elle a tenu dans sa structure, soit la fonction de l’écriture pour Joyce. L’écriture comme un effet du dit, du langage.

– et L’écriture de Lacan, écriture du nœud borroméen, élaboré à partir de sa pratique analytique, écriture primaire qui appelle un dit.

Lacan dit helléniser sa lalangue pour réinventer ce mot sinthome en fait ancienne graphie du symptôme, passage dû à Rabelais, sous tendu par la  science, la médecine. Cette nouvelle graphie sinthome fait apparaitre la chute (ptôme), le sin, la faute, au cœur de l’œuvre de Joyce ainsi que la nomination le saint homme en référence à l’admiration qu’avait Joyce pour saint thomas d’Aquin, sous la forme d’une discussion que l’on retrouve dans Portrait de l’artiste en jeune homme, autour de la claritas et du beau. Cette nomination de Joyce en Saint Homme éclaire cette identification à son symptôme que Lacan met en évidence dans le titre de sa conférence « Joyce le symptôme ».

L’écriture de Joyce, celle d’Ulysse et de Finnegans wake, par l’intermédiaire de la langue anglaise et non sa lalangue gaélique,  joue sur la langue, les langues, les homophonies, allant du sens au hors sens, devenant quasi illisible sinon à la lecture à haute  voix, jouissance à ciel ouvert. La langue pour Joyce n’a pas trouvé à s’ordonner dans le régime du Père dont c’est pourtant la mission celle de délivrer un sens, la jouis-sens phallique, à la langue. Mais cette langue a été recrée d’une certaine façon, ce devoir auquel Joyce se tient comme il l’exprime à la fin du Portrait, point de bascule vers une écriture plus singulière, «Je pars rencontrer la réalité de l’expérience et façonner dans la forge de mon âme  l’esprit incréé de ma race ». De renouer sa lalangue à sa langue cela amène son écriture qui fait tenir sa structure.

Avec le nœud borroméen, ce n’est pas seulement la parole qui a une fonction chez le sujet, ce nœud intéresse la manière par laquelle un sujet s’accommode de l’existence du langage. Lacan a promu le concept de parlêtre à la place du sujet dès lors qu’il ne repère plus celui-ci de la seule articulation du signifiant mais de l’articulation du nouage du Réel, Symbolique ,Imaginaire .Dans les névroses, cette articulation s’organise par un nouage entre les trois registres enserrant un trou, le nœud est borroméen, mais à la fin du séminaire R.S.I.lacan  introduit le Nom du Père pour renforcer ce nouage toujours borroméen. Ce nouage est différent dans les psychoses, soit d’une part, par la mise en continuité des trois registres : le nœud de trèfle, soit d’autre part, par l’impossibilité pour l’un de ces registres de se lier aux autres, donc ratage du nœud. Chez Joyce, la possibilité d’existence d’un symptôme psychotique a permis à Lacan de souligner que le rond de l’imaginaire ne se nouait pas aux ronds du symbolique et du réel. Par contre, l’absence avérée du développement d’un délire psychotique et l’originalité de l’écriture de Joyce amènent Lacan à considérer que l’écriture comme œuvre d’art avait une fonction particulière dans ce nouage ; elle ferait tenir les trois R.S.I. à la condition d’un quatrième rond. Mais ce nouage à quatre sera –t-il encore borroméen ,et le sinthome sera-t-il  le nom de ce quatrième rond ou bien le nom de cette équivalence du nom du père et du symptôme , ou bien encore le nom de cette identification au symptôme ? Pour Joyce, mal structuré sur du trois, dont l’imaginaire fuit de façon indépendante et qui agit en son insu, son écriture, création d’un objet condensateur de jouissance, son sinthôme, va consolider ce nouage lui permettant d’en faire un usage logique. Lacan parle de lapsus du nœud chez Joyce.

En ce début de séminaire, Lacan revient sur la nomination : «La nature ne se spécifie que d’être un potpourri de hors nature. » Elle est donc nommée c’est-à-dire appartenant aux trois registres R.S.I. L’unité du corps vivant le UN n’est plus supporté par la seule image et opération symbolique du passage par le A mais des trois dimensions, le réel participant de l’animation du corps vivant. Ainsi le parlêtre est donc ce passage relatif à un déplacement du sujet du signifiant au corps parlant. Ceci impliquant d’une part que le Un n’existe pas dans la nature, autrement dit qu’il  il n’y a pas de rapport naturellement sexuel, et d’autre part que pour comprendre le clivage entre nature et chaos, il nous faut saisir en quoi une part de réel est informé par le symbolique alors, qu’une autre part ne reçoit aucune information. Dans le séminaire R.S.I, « On ne remarque pas que l’idée  créationniste du fiat lux inaugural n’est pas une nomination. Que du symbolique surgisse le réel c’est ça l’idée de la création, n’a rien à faire avec le fait que dans un temps second, un nom soit donné. »

Ainsi dans la clôture des journées d’avril 75, « c’est à ce niveau qu’intervient la distinction du trou de l’urverdräng (non pas fiat lux mais fiat trou) et la nomination de ce trou. » Cela amène la question de la différence entre ce que Lacan nomme nomination symbolique où il repère l’activité de nomination par laquelle un nom est donné, par Adam, à chacun des animaux, et la nomination du réel qu’il impute au père nommant, ce dans R.S.I.

Lacan reprend   cette nomination   en pastichant Joyce dans Ulysse.  Joyce lequel par le nom de Joyce va nommer son père. Dieu charge Adam (jeu avec la dame chez Joyce) de nommer. Mais cette nomination ne peut se faire que dans lalangue, « l’Evie », Eve étant la première personne qui se sert de la langue pour parler au serpent, le serre-fesse, faille, phallus pour faire un faux-pas. La faute, sin du sintome, de la femme sera attribuée par Joyce à la femme, soit une autre façon de la désigner. La faute, le péché, sin du sinthome contre lequel Stephen règle sa conduite face à la défaillance du père. Donc il y a jeu entre la nomination et le jeu des signifiants A barré pour que ne cesse pas la faille. Le symptôme, comme on l’a vu antérieurement est  ce qui ne cesse pas de s’écrire. Pour Joyce, il en va un peu différement,ce que Lacan décrit en reprenant  la proposition logique « ce qui cesse de s’écrire » modalité du possible, Lacan  dit «  il faut y mettre la virgule , une petite verge  », ce que désigne la latin virgula, «  qui joue comme coupure, comme cesse de la castration. » Le sinthome. Le sinthome est une nomination, réponse au défaut d’un Autre du nom. C’est en raison de sa fonction connectrice  partagée du Nom du Père, réduit à sa fonction de nomination et du symptôme que Lacan peut finalement faire équivaloir le père et le symptôme, d’où l’équivalence sémantique entre symptôme et saint homme dont se fonde le terme de sinthome.

Mais note Lacan, pour Joyce la position de la femme, liée à la faute, serait une position d’exception particulière, non pas pas-toute, le pas tout écarté de la logique aristotélicienne mais plutôt du côté de « mais pas ça ».Le tout mais pas ça, de Socrate qui se voulant dans cette position d’exception donc immortelle, ne veut pas que sa femme vienne assister à sa mort. « Le mais pas ça, c’est ce que j’introduis sous mon titre de cette année le sinthome » faisant apparaitre que pour Joyce le sinthome pourrait faire exister le rapport sexuel. Cela ouvre des conséquences importantes :  jusque-là quand Lacan disait la femme est le symptôme de l’homme, cela conservait cet impossible du rapport sexuel sous tendu par : La femme n’existe pas et elle n’est pas-toute dans le rapport phallique.

Le sinthome apparait comme une construction  par le travail d’écriture de Joyce, entre le sinthome madaquin et le sint’home rule, du religieux au politique, comme un choix, un autre rapport à la Vérité, une hérésie. Hérétique du Nom du Père mais soumettant son hérésie à L’Autre. Il faut en passer par l’Autre pour qu’il y ait réalisation du sinthome, Lacan parle d’une soumission à la confirmation de l’Autre. « La bonne façon est celle qui, d’avoir bien reconnu la nature du sinthome, ne se prive pas d’en user logiquement c’est-à-dire d’en user jusqu’à atteindre son réel, au bout de quoi il n’a plus soif. »

Le symptôme de Joyce crée artificiellement un Nom-du Père qui fait défaut, il ne s’agit pas d’une forclusion du Nom-du Père mais d’une autre façon d’atteindre le Réel. Joyce décrit son père comme un père carent : « Etudiant en médecine, champion d’aviron, ténor, acteur amateur,  politicien braillard, petit propriétaire terrien, petit rentier, grand buveur, bon garçon, conteur d’anecdotes, secrétaire de quelqu’un, quelque chose dans une distillerie, percepteur de contributions, banqueroutier et actuellement laudateur de son propre passé ». De même sur sa manière d’être père « je te parle en ami Stephen, jouer les pères rigides ce n’est pas mon genre. Je ne crois pas qu’un fils doive craindre son père. Non je te traite comme ton grand-père me traitait quand j’étais jeune. Nous étions deux frères plutôt que père et fils »

Le sinthome de Joyce est cette suppléance au Père, suppléance du phallus, et Lacan ajoute que comme il avait un phallus un peu lâche, c’est son art qui a suppléé à la fonction phallique, son art comme vrai répondant de son phallus.

Joyce soutient le père, il va être chargé de père, projet qu’il énonce à la fin du livre Le Portrait : « façonner dans la forge de mon âme la conscience incréé de ma race » Joyce se fait un nom lequel soutient le père, et ce qui a fondé son S1 c’est la notoriété de son nom, S1 qui ne tient que par les appuis de l’Imaginaire et du Réel. La particularité de Joyce de son symptôme ou plus précisément sinthome c’est qu’il est le produit d’un art, d’un savoir-faire, l’inconscient n’intervenant pas dans sa fabrication, Lacan dira Joyce est désabonné de l’inconscient. Qu’en est-il alors du S2 ?

Lacan propose de mettre en relation le nœud à quatre et l’inscription dans le discours du Maître.

Lacan revient sur L’imaginaire. L’Imaginaire serait un sac non pas infatué d’un Un mais un sac vide, l’ensemble vide où l’Un trouve son origine dans les mathématiques modernes, c’est le réel qui est ici en jeu.

Chez Joyce l’Imaginaire ne serait lié au symbolique que par le réel. On peut illustrer cela par :

– Le déplacement de L’imaginaire de sens. Dans son écriture le sens évacué, évidé  se déverse au niveau phonologique, donnant du sens décalé, du hors-sens. C’est du niveau de la lettre.

– L’analyse de la scène de la raclée, narration où Stephen coincé contre des barbelés reçoit une raclée de Héron et ses deux amis. Se remémorant la scène, Stephen, dans l’après-coup « se demandait pourquoi il ne portait pas malice à ceux qui l’avait tourmenté. Il n’avait pas oublié un seul détail de leur lâcheté mauvaise, mais leur souvenir n’éveillait en lui aucune colère. Toutes les descriptions d’amour et de haine farouches qu’il avait rencontrée dans les livres lui paraissaient, de ce fait, dépourvues de réalité. Même cette nuit-là, pendant qu’il s’en retournait en titubant par la Jones’road, il avait senti qu’une certaine puissance le dépouillait de cette colère subitement tissée aussi  aisément qu’un fruit se dépouille de sa peau tendre et mûre ». Il n’y a pas morsure du signifiant sur le corps, mais ce n’est pas du côté de la perversion car il n’y a pas trace de jouissance dans le récit, mais il y a écriture.

– Les épiphanies, où la langue est en semi-extériorité. Le signifiant à l’extérieur produit un effet sur le corps. Joyce reçoit ces signifiants pour en faire quelque chose, un écrit. Les sons, fragments sonores qui se détachent de la langue prennent une valeur d’extériorité (scène du réfectoire, de l’infirmerie) de même le regard, ces lettres inscrites sur le bureau, Joyce écrit, il décide d’épiphaniser. Lacan rappelle que les pulsions ne sont que l’écho dans le corps du fait qu’il y ait un dire.

On voit donc là et dans l’écriture de Joyce comment c’est par le réel, réel de la lettre que tiennent ensemble Symbolique et Imaginaire

C’est par l’objet voix que Joyce rejoint ce qui permet à la pulsion de faire le tour du vide, d’en passer par l’Autre avant de revenir, trajet de la pulsion qui permet à Joyce de se faire artiste.

Donc l’imaginaire serait noué mais alors cela implique que S2, lieu du savoir inconscient, non opérationnel chez Joyce, à la place de l’Autre dans le discours du Maître, soit divisé en symbole et sinthome, division qui permet le nouage à quatre.

Le symbolique se trouve divisé entre le symbole qui selon Lacan en remet sur l’imaginaire et un symptôme qui vise le réel.

En citant Pierre-Christophe Cathelineau : « Lacan parle d’une division du savoir qui coïnciderait avec celle du symbole et du symptôme. Il est plausible d’y reconnaître  la division qu’institue la pensée médiévale entre les vérités de Foi et les vérités de raison, celles qu’on accepte et celles qu’on démontre. C’est le nouage de ces deux savoirs en une seule tresse, qui constitue la division du symbole et du symptôme. Le rond est successivement appelé sinthome ou symptôme. Lacan le désigne comme une version du Père, une père-version. Sans doute, il y a une différence entre la révélation comme savoir et le savoir rationnel qui répond à cette révélation par le Saint Homme (Saint Thomas). Ainsi le Saint Homme apparait-il à la frontière de la Trinité chrétienne pour en faire tenir par la raison les trois dimensions, en y ajoutant une quatrième, celle du sinthome. C’est du moins l’assertion que je souhaite soutenir. »

« En quoi l’art, l’artisanat peut-il déjouer ce qui s’impose du symptôme ? – à savoir la vérité ». Lacan reprend le discours du maître, où la vérité est la division subjective du sujet. Cette vérité est déjouée par cet artifice qu’est l’art. Joyce soutient le père et déjoue par cette suppléance la vérité de la faillite paternelle. Symptôme et symbole ne forme qu’un faux trou, cela s’entend par le fait que le symbole que propose l’artiste, c’est son symptôme, identifiable à son œuvre, donc selon Lacan Joyce en rajouterait sur S1 et déjouerait la vérité de sa division à travers la production de son œuvre, l’artiste avec son œuvre illustre son nom.